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Pêche électrique : un vote attendu au Parlement européen

Réunis cette semaine en session plénière à Strasbourg, les députés européens trancheront aujourd’hui sur la généralisation de la pêche électrique dans l’Union européenne. Si la technique est défendue par les Pays-Bas, ses effets sur les écosystèmes sont encore méconnus, inquiétant les associations de défense de l’environnement.

Chalutier à perche
Chalutier à perche

Ce mardi 16 janvier, les députés européens décideront “du sort de la pêche électrique dans l’Union européenne”. “Interdite en 1998 dans les mers communautaires” , “la pêche électrique consiste à envoyer, depuis un chalutier à perche, des impulsions électriques dans le sédiment afin d’y capturer des poissons étourdis vivant au fond des mers” [Libération].

Malgré l’interdiction, “cette pratique est tout de même utilisée en vertu d’une dérogation obtenue en 2007” [La Croix]. La pêche électrique est tolérée dans “le sud de la mer du Nord” [Libération] : dans cette zone, “5 % de la flotte de chaque pays de l’Union européenne” peut ainsi “recourir à la pêche par impulsion électrique, uniquement à titre expérimental” [La Croix].

Fin novembre, la commission pêche du Parlement européen s’était prononcée pour un possible élargissement de cette technique” [Libération], un vote que les “eurodéputés doivent confirmer ou infirmer” aujourd’hui [France Culture]. Plus précisément, ils doivent se prononcer sur une disposition qui autoriserait “les pays à équiper 5% de leur flotte de filets électrifiés, tous ‘métiers’ compris, c’est à dire quel que soit le type de bateau et donc le type de poisson visé” [Europe 1].

Les Pays-Bas, premiers défenseurs de la pêche électrique

Les Pays-Bas sont des “ardents défenseurs de cette technique” [Libération] et sont parvenus à obtenir “deux dérogations supplémentaires, leur permettant d’équiper 84 navires, soit 30 % de leur flotte de pêche industrielle” [La Croix]. Ils mettent en avant les avantages de la pratique. Au niveau économique tout d’abord, “les prises sont beaucoup plus rapides et coûtent moins cher en frais de fonctionnement” [Europe 1]. Résultat, les pêcheurs néerlandais utilisant cette pêche ont vu “leur rentabilité augmente[r] de 20% par rapport à la pêche traditionnelle” [France Culture].

Des avantages environnementaux sont également mis en avant par Amsterdam. La pêche électrique permettrait “d’économiser jusqu’à 50 % de fuel” “grâce à des chaluts plus légers” [Le Soir] et de “diminuer de 50% les ‘captures accessoires’, ces prises qui n’intéressent pas le marché et qui sont souvent rejetées directement en mer” [Europe 1]. Un autre avantage mis en avant est la préservation des fonds marins “puisque le chalut ne racle plus le sol, mais le ‘survole’ en capturant les poissons (soles, plies…) choqués par la décharge et se laissant attraper” [Le Soir].

Un flou scientifique

Comme le rapporte Europe 1, “du côté des scientifiques, les avis ne sont pas aussi tranchés pour la simple et bonne raison qu’il n’existe pas d’étude sur les effets de la pêche électrique” . Dans un rapport publié en février 2016, le “Conseil international pour l’exploration de la mer” a appelé au “principe de précaution” , et [a invité] à investiguer afin de connaître les effets à long terme” [Europe 1].

L’effet des décharges électriques reste donc “méconnu” [Le Soir]. Interrogé par Libération, Didier Gascuel, professeur à l’Université de Rennes affirme néanmoins que la pêche électrique “fait courir un risque évident à la ressource exploitée”. Europe 1 rapporte également les propos de Philippe Cury, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement et spécialiste de la pêche, qui appelle à la “prudence” et rappelle que “l’utilisation de l’électricité ‘impacte tous les animaux qui vivent sur les fonds marins’ ” , incluant “une partie importante de l’écosystème dont dépendent les poissons pour se nourrir”. Même nuances apportées par France Culture, qui ajoute que les “décharges électriques des chaluts à perche pourraient toucher les œufs ou d’autres espèces”

Les ONG de défense de l’environnement et les pêcheurs français farouchement opposées au texte

Contrairement aux Pays-Bas, “les environnementalistes estiment (…) que la pêche électrique n’est pas aussi écologique que cela” [Le Soir]. L’association française Bloom met en avant “ ‘l’hyper efficacité destructrice’ de la pêche électrique et ‘ses impacts très violents sur la ressource’ ” , les poissons remontés montrant “souvent des brûlures, des ecchymoses et des déformations du squelette consécutives à l’électrocution” [Libération]. Bloom relève également que la pêche électrique est “interdite partout ailleurs dans le monde” [Le Soir]. “Une vingtaine de pays dont les États-Unis, le Brésil et la Chine qui, autrefois, autorisaient la pêche électrique” l’ont en effet aujourd’hui prohibée [La Croix]. En début d’année, Bloom accusait la Commission européenne d’avoir “cédé face au lobby de la pêche néerlandaise” [France Info], ce que cette dernière a réfuté arguant que la proposition est “basée sur des données scientifiques” [Politico].

L’opposition “fédère les défenseurs de l’environnement et les pêcheurs concurrents des Hollandais” [Le Soir]. Pour les pêcheurs français, des espèces sont “décimées par la pêche électrique néerlandaise” [Europe 1], obligeant les fileyeurs à “aller chercher le poisson plus loin en mer” [France Culture]. Ils s’inquiètent ainsi de la “diminution des stocks de poissons plats” , mais aussi d’une “atteinte à la concurrence” pour ceux pêchant aux filets [Le Soir].

Un vote à l’issue incertaine

Aujourd’hui, “l’inconnue du vote réside dans la position des députés européens d’Etats membres qui ne sont pas des nations de pêche maritime” [Libération]. Il existe “une fracture ‘géographique’ au sein de l’Union, les Français et les Belges opposés à l’idée, les Pays-Bas et les pays nordiques plutôt acquis à sa cause” [Le Soir].

Des députés opposés au texte ont déposé deux amendements : un premier demandant “l’éradication de la pratique” , et un second qui propose “l’interdiction de la pêche électrique comme principe général et [limitant] la pratique à 5 % de la flotte des Etats membres riverains de la mer du Nord” [Libération]. Si les deux amendements sont rejetés, et le texte adopté, “le Parlement européen, la Commission et les Etats membres devront [ensuite] s’accorder sur un texte commun” [RTBF].

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