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Covid-19 : quelle réponse de l’Union européenne pour soutenir l’agriculture ?

Le secteur de l’agriculture en Europe n’a pas échappé aux conséquences de la pandémie de Covid-19. D’abord touchés par les mesures de confinement et la fermeture des frontières, les agriculteurs ont ensuite été frappés de plein fouet par le ralentissement économique. Une situation qui a conduit l’Union européenne à réagir.

Face au coronavirus, les producteurs ont du s'adapter pour maintenir l'approvisionnement des denrées alimentaires
Face au coronavirus, les producteurs ont du s’adapter pour maintenir l’approvisionnement des denrées alimentaires - Crédits : Fertnig / iStock

Avec l’arrivée du coronavirus, les images des rayons de supermarché vides ont fait le tour des journaux télévisés en Europe, faisant craindre une pénurie de certaines denrées alimentaires. Finalement, des ruptures de stock limitées ont été à déplorer. Mais “la crise sanitaire et le confinement ont modifié profondément le comportement alimentaire des Français, au moins temporairement, depuis les circuits d’achat jusqu’à leurs assiettes”, souligne l’établissement public FranceAgriMer dans une étude sur la consommation alimentaire des Français, parue en septembre 2020.

Cet épisode a également remis le sujet de la souveraineté alimentaire européenne sur la table, alors qu’à Bruxelles se joue en ce moment même le destin de la réforme de la politique agricole commune (PAC) qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2023.

Une réponse d’urgence au printemps 2020

Les mesures de confinement appliquées dans les Etats membres au mois de mars 2020 ont rapidement bousculé l’ensemble de l’économie. “Les agriculteurs et l’ensemble des acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire de l’UE mettent tout en œuvre pour continuer de nourrir l’Europe, malgré les difficultés qu’ils rencontrent”, déclarait au printemps dernier le commissaire européen en charge de l’Agriculture Janusz Wojciechowski.

Face à ces circonstances exceptionnelles, la Commission souhaite alors faire du maintien de la sécurité alimentaire l’une de ses priorités. Début avril, l’exécutif européen présente ainsi un train de mesures destinées à soutenir le secteur agricole, complétées quelques semaines plus tard avec l’adoption de plusieurs dispositifs exceptionnels.

Pour s’adapter au rétablissement des contrôles aux frontières et pour maintenir l’approvisionnement, l’UE a incité les Etats membres à instaurer des voix réservées pour le transport de marchandises aux points de passage frontaliers.

Sur le plan financier, la Commission a proposé une flexibilisation de l’utilisation des fonds européens, dont le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), dans le cadre de son Initiative d’Investissement de Réponse au Coronavirus (CRII). Ainsi, les agriculteurs ont pu bénéficier d’aides à hauteur de 7 000 euros par professionnel et de 50 000 euros pour les petites et moyennes entreprises (PME) agroalimentaires. A ce dispositif sont venus s’ajouter des prêts ou des garanties aux conditions avantageuses et pouvant aller jusqu’à 200 000 euros, pour leurs frais de fonctionnement.

De plus, afin de stabiliser les marchés, de nouveaux dispositifs ont été instaurés, tels que le soutien au stockage privé pour certaines denrées comme les produits laitiers ou la viande. La Commission a également mis en place un système de dérogation aux règles de concurrence de l’UE.

Enfin, dans l’optique de surmonter les difficultés pratiques qu’impliquent certaines exigences de la PAC, les agriculteurs se sont vus proposer des mesures de prolongation de certains délais administratifs ainsi qu’une diminution des contrôles.

La relance, après la réponse d’urgence

Après l’adoption de dispositifs d’urgence, l’UE cherche désormais à redynamiser son économie et s’est pour cela dotée d’un plan de relance inédit d’un montant de 750 milliards d’euros, en premier lieu destiné aux transitions écologique et numérique. Mais ce nouvel instrument, baptisé Next Generation EU, ne se limite pas à ces deux seules composantes.

Les fonds alloués au développement rural

Ainsi 7,5 milliards d’euros (en prix courants de 2018, soit un peu plus de 8 milliards d’euros en prix constants) viendront s’ajouter à l’enveloppe dédiée au FEADER, portant le total à 85,4 milliards d’euros (95,6 milliards d’euros en prix constants) pour la période 2021-2027. Le budget total de la PAC sur la période est quant à lui de 386,7 milliards d’euros (en prix constants).

Le 21 juillet 2020, les chefs d’Etat et de gouvernement européens s’accordaient autour du plan de relance ainsi que sur les montants du cadre financier pluriannuel de l’UE pour la période 2021-2027. Parmi les nombreux éléments de négociation, le budget alloué à la PAC est apparu, comme souvent, comme l’un des premiers enjeux côté français.

Avec une enveloppe de 66,2 milliards d’euros pour la période 2021-2027, soit plus de 18 % des enveloppes pré-allouées, la France reste de très loin la première bénéficiaire de cette politique. C’est d’ailleurs le premier élément que le Président Emmanuel Macron mettait en avant dans son interview télévisée sur TF1 à la suite du sommet, se félicitant d’avoir “protégé le revenu des agriculteurs pendant sept ans”.

Compte tenu des négociations en cours sur la future PAC, cette enveloppe n’aurait dû être distribuée qu’à partir du mois de janvier 2023, au moment de l’entrée en vigueur de la réforme. Mais l’urgence de la situation a poussé les institutions européennes à accélérer. “C’est un fond de relance et nous avons besoin de relancer maintenant, pas dans deux ou trois ans”, déclarait le commissaire Janusz Wojciechowski devant les eurodéputés le 7 septembre 2020.

Au mois de décembre, le Parlement européen votait en faveur de mesures transitoires pour la PAC pour la période 2021-2022, suivi du Conseil quelques jours plus tard, permettant l’allocation de cette enveloppe dès cette année. Ainsi, 30 % de cette somme devraient être versés avant le 31 décembre, le reste le sera au cours de l’année 2022.

Le versement de ces fonds est toutefois conditionné au respect de certains critères. Ainsi, 37 % des montants devront être alloués à des mesures liées à l’environnement et au climat ainsi qu’au bien-être animal. De plus, 55 % de l’enveloppe aura vocation à soutenir des jeunes agriculteurs ainsi que des “investissements dans des exploitations agricoles qui contribuent à une relance résiliente, durable et numérique”, précise un communiqué du Parlement européen. “Nous faisons ainsi preuve d’une solidarité européenne concrète avec un secteur qui, même pendant les jours les plus sombres de la pandémie de COVID-19, n’a jamais laissé tomber les citoyens de l’UE”, s’est félicité l’eurodéputé Paolo De Castro (S&D), rapporteur du texte ayant acté ces mesures transitoires.

A l’occasion du vote en faveur du déblocage de l’enveloppe FEADER le 16 décembre 2020, les eurodéputés ont également exprimé leur soutien aux mesures transitoires pour la PAC sur la période 2021-2022. Ces mesures comprennent :

  • la continuité des règles actuelles de la PAC en matière de paiements directs et de développement rural ;
  • le maintien du niveau actuel de soutien aux régions ultrapériphériques (POSEI) et aux îles mineures de la mer Égée (ISC) ;
  • la prolongation de la mesure exceptionnelle de développement rural adoptée dans le contexte de la crise du coronavirus. Les États membres disposeront d’un délai supplémentaire de six mois pour introduire les demandes et effectuer les paiements, sous réserve du respect de certaines conditions.

Les premiers paiements seront par ailleurs effectués lorsque la procédure de ratification de la décision ressources propres par les Parlements nationaux sera effective. En effet, c’est ce texte qui permettra à l’UE de lever l’emprunt pour financer son instrument Next Generation EU et donc de procéder aux versements. Au 19 mai, 22 Etats membres sur 27 avaient terminé le processus. Après un vote du Sénat le 4 février 2021, la France était le cinquième pays de l’UE à ratifier le texte.

Les fonds alloués dans le cadre de la reprise et de la résilience

L’enveloppe attribuée au FEADER dans le cadre de Next Generation EU n’est pas la seule dont peuvent bénéficier les agriculteurs des Vingt-Sept. Ces derniers peuvent en effet prétendre aux subventions (312,5 milliards d’euros) ainsi qu’aux prêts (360 milliards d’euros) de la facilité pour la reprise et la résilience, un instrument de financement de réformes et d’investissements dans les États membres et dont la mise en œuvre se fera à l’échelle nationale.

Pour toucher ces sommes, chaque Etat membre présente un plan national pour la reprise et la résilience (PNRR) détaillant les mesures à mettre en place. Ce plan doit par ailleurs respecter plusieurs critères comme l’allocation de 37 % des dépenses à des objectifs environnementaux européens, dont la neutralité carbone à horizon 2050. La France a choisi de faire figurer son “plan en faveur de l’indépendance protéinique” au sein de son PNRR présenté le 27 avril dernier. La volonté affichée de cette mesure est de ne plus dépendre de l’importation de soja originaire d’Amérique du Sud et dont la production a des répercussions importantes sur la déforestation en Amazonie.

Une relance pour répondre aux conséquences de la crise

La pandémie de Covid-19, dont le bilan humain ne cesse de s’alourdir depuis le printemps 2020, a engendré un ralentissement économique inédit depuis la Seconde Guerre mondiale dans plusieurs pays. En France, selon l’Insee, le Produit intérieur brut (PIB) français, principal indicateur de l’activité économique, s’est en effet effondré de 8,3 %. Une crise économique qui a eu des répercussions sur l’ensemble des secteurs d’activité, parmi lesquels l’agriculture.

Selon le rapport annuel de France AgriMer, les exportations françaises de produits agricoles et agroalimentaires auraient en effet baissé de 3,4 % en 2020, soit une diminution de 61,8 milliards d’euros. La première filière du secteur, celle des vins et spiritueux, connait pour sa part un recul “historique” avec une diminution de 12 % des ventes à l’étranger. Si des taxes imposées par l’administration américaine fin 2019 ont fait chuter les ventes de vin français aux Etats-Unis, premier importateur, la principale raison reste les mesures de confinement et la fermeture des établissements de restauration en Europe.

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