Eurobonds : oui, mais …
C’est ce que coûterait l’Allemagne chaque année la mutualisation des emprunts souverains voulus par M. Juncker, a rappelé Angela Merkel. L’Allemagne est la première économie européenne, et le plus gros contributeur au budget européen.
L’affaire est partie du Luxembourg, et plus précisément de son Premier ministre, qui se trouve également être le président de l’Eurogroupe. Jean-Claude Juncker a en effet reproché la semaine dernière à Angela Merkel son comportement “anti-européen” en continuant de refuser la mise en place d’euro-obligations, mieux connues sous le nom d’eurobonds (en anglais).
Il s’agit d’obligations d’un nouveau type, dans lesquelles une partie des dettes souveraines des Etats membres de l’Union serait mutualisée, ce qui permettrait aux pays actuellement en difficulté de se financer à moindres frais. Mais la Chancelière allemande craint que des pays bénéficiant de ces euro-obligations n’aient plus vraiment d’incitation à diminuer leurs déficits.
Plusieurs économistes, à l’image de l’eurodéputé socialiste Liêm Hoan-Ngoc, sont favorables au recours à ces eurobonds, souhaitant que l’Europe n’ait plus peur de l’emprunt. Cependant, cette méthode est rejetée par l’Allemagne qui veut avant tout un renforcement de la discipline budgétaire, via le Pacte de stabilité et de croissance, souhaitant même des sanctions automatiques en cas de non-respect des critères de convergence de la zone euro.
Pourtant, son ministre des Finances a été plus loin ce week-end. Dans une interview au Bild, Wolfgang Schäuble a en effet déclaré que le mécanisme des eurobonds pourrait convenir à Berlin … si les Etats membres transfèrent plus de compétences à l’Union européenne notamment en matière de surveillance budgétaire. M. Schäuble a cependant refusé de commenter les propos de M. Juncker, bien que ce dernier considère que leurs points de vue convergent.
Le ministre des Finances s’opposerait-il à sa chancelière ? Wolfgang Schäuble est un atout majeur du gouvernement, est un poids lourd du parti majoritaire, la CDU. Difficile de le contredire sans se compromettre. Mais pour certains commentateurs, le ministre et la chancelière pourraient miser sur une stratégie “bon flic/mauvais flic” afin de convaincre leurs partenaires européens d’aller vers une union plus politique. Car pour le moment, Angela Merkel ne cède ni ne plie.
Un rapprochement, mais pas de mutualisation
En effet si M. Schäuble n’a pas rejeté les eurobonds, bien que sous conditions, la chancelière elle, n’a pas hésité à le faire très ouvertement pendant le Conseil des ministres franco-allemand qui se tenait à Fribourg ce week-end.
Soutenue par Nicolas Sarkozy, elle a d’ailleurs affirmé que ce mécanisme ne serait pas à l’ordre du jour des discussions du Conseil européen de la fin de semaine. Elle a également rejeté les appels à augmenter la taille du fonds de stabilisation de la zone euro mis en place au printemps dernier, à hauteur totale de 750 milliards d’euros, soulignant que le plan d’aide à l’Irlande ne représente que 10 % du mécanisme.
Seul signe de convergence affiché, Angela Merkel a annoncé que Paris et Berlin allaient travailler à rapprocher leur fiscalité et leur droit du travail, mais on est loin d’une harmonisation sur les 16 Etats de la zone euro, voire les 27 Etats membres de l’Union.
La chancelière peut cependant compter sur l’indéfectible soutien de la France, Nicolas Sarkozy ayant réagi aux propos de M. Juncker en déclarant qu’on “ne peut pas traiter d’égoïstes” les pays qui contribuent au fonds de secours, dans lequel l’Allemagne et la France sont en première ligne.
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