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V. Arnault - B. Schultz : “Le consommateur doit savoir qu’il n’a aucune obligation de payer avant la conclusion d’un contrat de timeshare”

DF - Véronique Arnault et Bianca Schulz Véronique Arnault est chef d’unité de la DG Consommation et protection des consommateurs. En compagnie de Bianca Schulz, responsable du Centre européen des consommateurs, elle commente la proposition de révision de la directive sur le timeshare.


Bianca Schulz, vous êtes responsable du Centre Européen des Consommateurs, quel est le rôle de cette structure ?

Bianca Schulz : Le Centre Européen des Consommateurs France est basé à Kehl, en Allemagne. Sa structure mère est une association franco-allemande de protection des consommateurs. C’est la seule structure binationale de protection des consommateurs qui existe. Nous avons donc, dans nos locaux, le Centre Européen des Consommateurs France et le Centre Européen des Consommateurs Allemagne. De par sa structure mère, on peut dire que le Centre Européen des Consommateurs représente assez bien l’esprit européen.

Le Centre Européen des Consommateurs France existe dans sa forme actuelle depuis 2005. Jusqu’à cette date, il y avait deux réseaux de protection des consommateurs. Les anciens Centres Européens des Consommateurs qui proposaient de l’information et de la prévention et ce qu’on appelait le réseau de résolution extrajudiciaire des litiges transfrontaliers. Les deux ont été fusionnés à l’initiative de la Commission européenne. Nous avons maintenant le fameux ECC-Net.

La Commission européenne propose de nouvelles règles pour que les consommateurs jouissent d’une protection accrue en matière de vacances, qu’il s’agisse d’acheter ou de revendre des séjours en temps partagé, des séjours en multipropriété sur des navires de croisière ou encore d’adhérer aux fameux “clubs de vacances à tarif préférentiel” . En quoi consistent ces propositions ?

Bianca Schulz : La Commission européenne propose en effet de réviser la directive sur le timeshare. En premier lieu, il faut être très clair sur les termes. Dans notre jargon, nous utilisons le terme “timeshare” pour désigner de nombreux types de contrats, contrats annexes et accessoires également. L’ancienne directive de 1994 qui a été transposée en droit français en 1998, couvrait une certaine définition, le fameux droit d’occupation, droit d’usage d’un immeuble à temps partagé.

Depuis, le marché a beaucoup évolué. D’autres phénomènes et d’autres contrats, qui selon nous rentrent dans la même catégorie, sont apparus. Ils ne concernent pas le droit d’usage d’un immeuble mais plutôt la revente de son droit d’usage, l’échange de son droit d’usage, ou encore des contrats “accessoires” , tout ce qui concerne les “packs vacances” et les “clubs vacances” .

La proposition de révision de la directive sur le timeshare regroupe toutes ces définitions et étend la protection des consommateurs également à ces nouveaux types de contrats. La nouvelle proposition de directive de la Commission se substituera à l’ancienne directive en mettant en place un cadre moderne, simplifié et cohérent applicable à la multipropriété et aux produits de vacances à long terme, ainsi qu’aux échanges et reventes.

Quelles sont les prochaines étapes pour l’adoption de la révision de la directive sur le timeshare ?

Véronique Arnault : La Commission européenne a présenté sa proposition le 7 juin 2007. Elle va être envoyée au Conseil de l’UE et au Parlement européen. Maintenant, chacun d’eux doivent examiner le texte et peuvent proposer des amendements.

Si malgré toutes les consultations extensives réalisées avec toutes les parties - les professionnels, les consommateurs, les Etats membres - il y a encore des éléments que certains veulent apporter, il est encore possible d’apporter des modifications et des améliorations grâce au processus de discussion avec le Parlement et le Conseil.

Si tout se déroule correctement, on peut imaginer que le texte soit adopté dans deux ans. Ensuite, il y a encore un délai pour sa transposition et une certaine période pour son application.

C’est une directive, ce qui signifie qu’il y a certains éléments importants fixés dans le texte, comme le délai de rétraction de 14 jours pour tout le monde. Les informations sont très détaillées selon les produits, pour faciliter la vie des professionnels, et établir un équilibre entre leurs obligations et leurs avantages.

Dans le processus législatif, il peut y avoir encore des changements. Le texte doit être transposé pratiquement automatiquement mais il y a tout un tas d’aspects de la directive, où les Etats membres eux-mêmes, ont à faire un effort selon leur législation nationale d’adaptation. C’est le cas par exemple dans le droit de l’immobilier sur la nature du contrat…

Certains aspects ressemblent plus à un règlement, car on va plus loin qu’actuellement et on fixe des règles pour tout le monde, et d’autres aspects sont vraiment ceux d’une directive comme la nécessité de la transposition en droit national, donc le fait qu’ils doivent être transposés, adaptés.

Concrètement, à qui doit-on s’adresser en cas de litige dans un contrat de timeshare ?

Véronique Arnault : En premier lieu, le consommateur doit surtout savoir qu’il n’a aucune obligation de payer quoi que ce soit avant la conclusion d’un contrat de timeshare. Avant de s’engager dans un contrat, il faut prendre le temps de se renseigner car après sa conclusion, il sera très difficile d’en sortir, même si l’on est dans son droit.

Par exemple, si l’on se trouve en Espagne, il est possible de s’informer auprès du Centre Européen des Consommateurs espagnol, ou bien d’appeler le CEC français. On peut également s’adresser à l’administration nationale si l’on a des renseignements suffisants ou encore appeler les autorités locales. Normalement, un bureau de tourisme peut donner les coordonnées de ces contacts. Les Centres Européens de Consommateurs peuvent aussi vous guider.

La Commission européenne œuvre pour la protection des consommateurs depuis de nombreuses années. Quelles sont les priorités à venir de la Commission ?

Véronique Arnault : Pour la Commission européenne, l’une des principales priorités à venir est le règlement des litiges et l’amélioration de tout ce qui est préventif. Les litiges auxquels se trouvent confrontés les consommateurs entraînent de nombreux coûts mais ne justifient pas d’aller en justice. Même si, bien entendu, cette solution est ouverte à tous, il faut développer des moyens alternatifs de résolution des conflits par la médiation et la conciliation.

Sous l’initiative de notre la nouvelle commissaire européenne, Magdalena Kuneva, nous sommes en train de réfléchir aux possibilités de faire une action en recours collectif. Il ne s’agit pas d’un système de class-action à l’américaine mais d’un système de règlement collectif des litiges pour que les consommateurs se réunissent en cas de litige commun.

Nous allons lancer, à Louvain (Belgique), un processus de réflexion pendant 6 mois, qui devrait culminer avec une conférence le 8 novembre 2007, sous présidence portugaise, à Lisbonne. Cette conférence nous permettra de faire le point sur l’action en recours collectif et de savoir s’il existe ou non un intérêt de faire quelque chose au niveau européen. Nous avons choisi de lancer ce chantier parce qu’il y a dans tous les Etats membres une réflexion sur les procédures collectives. En France, cette réflexion est actuellement bloquée.

La deuxième priorité de la Commission concerne toute la modernisation de la législation européenne, avec la révision de l’acquis communautaire. Huit directives sont principalement concernées parmi lesquelles celles sur la vente à distance concernant les services financiers et le timeshare. Nous voyons actuellement les incohérences entre les textes, comme par exemple les périodes de rétractations qui ne sont pas toujours les mêmes.

La période de consultation est terminée et nous allons présenter une proposition l’année prochaine pour savoir ce que l’on va faire au niveau communautaire pour toutes ces directives. Il s’agit de remettre à plat ce qui est incohérent, démodé, étudier quels sont les nouveaux besoins. Nous devons définir davantage le rôle de Bruxelles et celui des Etats membres.

Il existe tout un potentiel d’activités au niveau européen, tant pour nous en tant que consommateurs que pour les professionnels. Ce potentiel n’est pas exploité parce que les consommateurs ont peur en cas de litige. Toutes les enquêtes montrent que la langue n’est pas vraiment un problème mais que c’est plutôt le manque d’informations sur les structures vers lesquelles les consommateurs peuvent se tourner en cas de litige.

Propos recueillis le 07/06/07

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