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Union bancaire : comment fonctionnera le mécanisme de résolution ?

Mardi 15 avril, le Parlement européen a adopté à une large majorité les derniers pans de l’Union bancaire : le mécanisme de résolution bancaire et le système actualisé de garantie pour les déposants. Que vont changer ces nouvelles dispositions ? Permettront-elles d’éviter une nouvelle crise ? Comment les contribuables seront-ils épargnés ? Réponses ci-dessous.

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Sur quoi portent les textes adoptés le 15 avril par le Parlement européen ?

Le calendrier de l’Union bancaire

30 mai 2012 : La Commission européenne appelle à la création d’une union bancaire

29 juin 2012 : Le Conseil européen s’accorde sur la mise en place d’une union bancaire

Septembre 2012 : la Commission européenne présente le projet de supervision

Juillet 2013 : la Commission européenne présente le projet de résolution

Automne 2013 : Adoption par le Parlement et le Conseil du Mécanisme de supervision unique

Mars 2014 : la Banque centrale européenne entame l’étude des principales banques de la zone euro

Mars 2014 : accord politique entre Conseil et Parlement européen sur le Mécanisme de résolution unique et le système de garantie des dépôts

15 avril 2014 : le Parlement européen adopte les 2e et 3e piliers de l’Union bancaire

Juin 2014 : la Commission européenne doit rendre son avis sur la répartition des contributions bancaires au fonds de résolution

Novembre 2014 : la Banque centrale européenne publie les résultats des stress tests de 128 banques

1er janvier 2015 : entrée en vigueur du mécanisme de résolution unique

Mai-juin 2015 : entrée en vigueur du nouveau système de garantie des dépôts

1er janvier 2016 : entrée en vigueur du mécanisme de renflouement interne

Janvier 2016 : entrée en vigueur des dispositions créant le fonds de résolution unique, déjà mutualisé à 40%

2024 : le fonds de résolution unique est entièrement capitalisé, à hauteur de 55 milliards d’euros.

2025 : les fonds de garantie des dépôts nationaux sont entièrement capitalisés

2025 : les fonds nationaux de redressement et de résolution des défaillances bancaires (pour les pays en dehors de l’union bancaire) sont entièrement capitalisés (environ 55 milliards d’euros pour l’ensemble des fonds également)

Le 15 avril, le Parlement a adopté trois textes portant sur deux principaux piliers de l’Union bancaire :

  • Le système de résolution bancaire, adopté le 15 avril (rapport d’Elisa Ferreira sur le mécanisme et le fonds de résolution uniques, rapport de Gunnar Hökmark sur la recapitalisation et la résolution), permettra d’organiser la recapitalisation ou la fermeture (“résolution”) des banques en difficulté.
  • Le système de garantie des dépôts : le vote du 15 avril (rapport de Peter Simon), met à jour la directive de 1994 permettant aux déposants de recouvrer leur argent en cas de faillite de leur établissement bancaire.

Par ailleurs, le premier pilier, le mécanisme de supervision unique, avait fait l’objet d’un accord à l’automne 2013. Il confie à la Banque centrale européenne, et plus particulièrement à son Conseil de supervision unique, la surveillance des 6000 banques de la zone euro, à partir de novembre 2014. Actuellement, 128 banques font déjà l’objet d’études de la BCE pour tester leur solidité.

Outre ces trois piliers, un grand nombre de mesures ont été adoptées ces dernières années (ou sont en cours d’adoption) pour réguler la finance européenne : mesures sur les fonds propres des banques, sur les assurances, sur les divers instruments financiers…

Quels sont les objectifs de ces textes ?

Etant donné le degré d’interdépendance des banques européennes, les difficultés financières d’une seule d’entre elles peut avoir d’énormes répercussions sur l’ensemble du continent.

Lorsque certaines ont manqué de liquidités suite à l’éclatement de la crise à partir de 2008, les Etats européens ont dû les renflouer afin d’éviter toute contagion. Mais ces sauvetages nécessaires ont entraîné d’importantes dépenses publiques (plusieurs centaines de milliards d’euros, selon la Commission).

L’objectif du nouveau mécanisme de résolution bancaire est d’éviter que l’argent public (et donc les contribuables) soit à nouveau sollicité en cas de nouvelle crise bancaire.

Il s’agit également de faire en sorte que les banques soient, comme les autres entreprises, les premières à supporter les risques inhérents à leurs activités, et ne fassent pas supporter le coût d’une éventuelle faillite à l’ensemble de la collectivité.

Par ailleurs, le mécanisme doit permettre de restaurer la confiance des banques européennes les unes envers les autres, et donc de relancer leurs investissements dans l’économie réelle.

Enfin, la supervision opérée par la BCE a pour but de déceler et résoudre la sous-capitalisation d’une banque le plus tôt possible.

Comment fonctionnera le mécanisme de résolution unique ?

En vertu du 1er pilier de l’Union bancaire, la Banque centrale européenne est chargée de la surveillance de 128 établissements financiers de la zone euro.

Si elle constate une défaillance dans l’un deux (ou dans l’une des 6000 autres banques de l’Union européenne) elle le notifie à la Commission européenne, à l’Etat concerné et à un Conseil de résolution unique, composé de fonctionnaires européens et de représentants des Etats membres.

Ce dernier est alors chargé d’élaborer un plan de résolution, que la Commission européenne valide s’il est jugé conforme aux règles sur les aides d’Etat.

Les Etats membres réunis en Conseil peuvent ensuite se prononcer dans deux cas : si la Commission a modifié de manière substantielle le montant des ressources du fonds de résolution qui sont nécessaires à la résolution, ou bien si elle s’oppose à la résolution.

Si la Commission et/ou le Conseil de l’UE s’opposent au plan du Conseil de résolution, ce dernier doit le modifier. S’il est adopté, le plan de résolution est appliqué par les autorités nationales.

Nous disposons d’un système véritablement européen pour superviser toutes les banques de la zone euro et traiter leurs faillites éventuelles

Michel Barnier, commissaire européen chargé des services financiers

Le plan de résolution peut alors faire appel à deux types de contributeurs. En premier lieu, ce sont les actionnaires de la banque et les détenteurs d’obligations (inférieures à 100 000 euros) qui devront renflouer la banque. C’est ce qu’on appelle le “bail-in” , ou renflouement interne. Celui-ci pourrait éliminer, selon le Parlement européen, jusqu’à 8% des obligations financières d’une banque pour couvrir les pertes. Ce mécanisme entrera en vigueur le 1er janvier 2016.

Les éventuels coûts supplémentaires doivent être pris en charge par un “fonds de résolution unique” , alimenté par l’ensemble des banques de la zone euro à hauteur de 55 milliards d’euros.

En théorie, ces seuls instruments doivent permettre de supporter le coût d’une faillite. Mais plusieurs analystes jugent que les montants ainsi levés risquent de s’avérer insuffisants, et que les Etats membres pourraient tout de même être contraints de prendre en charge une partie de ces coûts.

Comment fonctionnera le fonds de résolution ?

“Le rôle du Parlement européen a été décisif pour que cet accord, au-delà des positions défendues par chaque Etat-membre, soit à la hauteur des enjeux”

Pervenche Berès, députée européenne (S&D, France)

Le fonds de résolution unique est donc chargé d’intervenir en cas d’insuffisance du renflouement interne.

D’abord composé de compartiments nationaux dédiés au sauvetage des banques nationales, il doit être progressivement mutualisé pour atteindre 55 milliards d’euros en 2024. 40% de ce fonds seront mutualisés dès 2015, puis 60 % en 2016 et 70% en 2017.

Le fonds est financé par une taxe bancaire sur les établissements de la zone euro. La répartition de leurs contributions respectives doit encore faire l’objet d’un accord intergouvernemental.

Le fonds pourra également, selon le Parlement européen, emprunter auprès des marchés financiers, dès 2015. Mais il ne pourra pas accéder aux fonds du Mécanisme européen de stabilité.

Comment fonctionnera le système de garantie des dépôts ?

Ces textes ont pour objectif final de redonner confiance aux citoyens européens dans le système bancaire et devraient permettre d’éviter la survenue de nouvelles crises systémiques et de mettre la finance et les banques au service de l’économie

Jean-Paul Gauzès, député européen (PPE, France) membre de la commission des Affaires économiques et monétaires

Ce système vise à garantir les dépôts inférieurs à 100 000 euros, dans l’ensemble de l’Union européenne.

Avec la révision de la directive votée le 15 avril, en cas de faillite d’une banque, les citoyens qui y possèdent un compte (courant ou épargne) pourront être remboursés de la totalité de leur solde. Le délai de remboursement doit passer de 20 jours ouvrables actuellement à 7 en 2024, lorsque les fonds de garantie seront totalement capitalisés.

De plus, ce sont désormais les banques elles-mêmes qui devront progressivement financer ces systèmes nationaux de garantie des dépôts. Ceux-ci atteindraient environ 43 milliards d’euros en 2024.

Quelles sont les limites de ce mécanisme ?

Considéré par l’ensemble du Parlement européen comme une avancée fondamentale, le mécanisme de résolution bancaire pose néanmoins quelques questions quant à son efficacité.

Tout d’abord, en termes de calendrier : le fonds ne sera abondé qu’à 40% en 2015, et le mécanisme de renflouement interne ne sera opérationnel qu’en 2016. Or les résultats de la supervision bancaire de la BCE sont attendus à l’automne 2014. Dès lors, le sauvetage ou le démantèlement des banques considérées comme non viables ne pourra, pendant ce laps de temps, qu’être organisé selon les outils traditionnels, notamment par la dette publique.

Ensuite, en termes de montants financiers : au regard des coûts entraînés par la faillite d’une grande banque, et plus encore de sa transmission aux autres banques, les 55 milliards d’euros du fonds de résolution paraissent faibles.

Enfin, concernant la crédibilité de la BCE : étant donnés les points précédents, certains doutent de l’objectivité de l’institut monétaire européen lorsqu’il s’agira d’annoncer la faillite d’une banque.

Face à ces critiques (et à d’autres), le Parlement européen répond que :

  • Les banques européennes sont plus sûres qu’avant grâce aux dispositions sur les fonds propres,
  • Elles sont tenues d’élaborer préventivement des plans de recapitalisation et de résolution,
  • Les mesures de “renflouement interne” s’appliquent avant le recours au fonds extérieur,
  • Avant que les ressources du fonds soient totalement mutualisées, des contributions ex-post des banques pourront être demandées dans le but de renflouer le fonds jusqu’à son niveau cible,
  • Le fonds peut temporairement emprunter pour accroître sa capacité.

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