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Un délai supplémentaire pour les agriculteurs français

La polémique sur le remboursement, exigé par la Commission européenne, de 500 millions d’euros d’aides aux producteurs de fruits et légumes français, semble provisoirement apaisée. Le ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire, chargé de ce dossier explosif, a obtenu un délai de 2 mois supplémentaires pour fournir un rapport précisant le montant de ces subventions. Une décision qui offre un court répit aux agriculteurs.

La Commission mêne l’enquête

Bien que le montant des aides versées ne soit pas établi pour le moment, le remboursement avoisinerait, selon Le Parisien, les 500 millions d’euros (338 millions d’aides et de 100 à 150 millions d’euros d’intérêts). La France doit soumettre fin septembre un rapport à la Commission précisant le montant total de ces aides.
Face à une conjoncture économique difficile, l’Etat français a accordé des aides “exceptionnelles” aux producteurs de fruits et légumes à partir de 1992. Celles-ci se composaient d’aides au stockage, à la destruction, à la transformation du produit frais ou à l’exportation vers des pays tiers, et visaient à soutenir les prix à l’heure où la production française était excédentaire. Gérées par l’Office National Interprofessionnel des Fruits, des Légumes et de l’Horticulture (ONIFLHOR), elles étaient attribuées aux producteurs par le biais des comités économiques agricoles. S’ajoutant aux subventions européennes prévues dans le cadre de la Politique agricole commune, le versement de ces aides d’Etat, qui devait être temporaire, dura de fait jusqu’en 2002.

Dès 2002, informée de ce dispositif et inquiétée par les distorsions de concurrence qu’il implique, la Commission européenne adresse une lettre à la France pour demander des renseignements sur ces “plans de campagne” , “plans stratégiques” ou “plans conjoncturels” , comme les nomme l’Etat français. Après les informations fournies par ce dernier ou par des institutions telles que la Fédération des Comités économiques Agricoles rattachés à la filière de production des fruits et légumes (FEDECOM, qui rassemble en France les comités économiques agricoles et les fédérations spécialisées en fruits et légumes), la Commission impose le 28 janvier 2009 la récupération par l’Etat français des sommes versées dans le cadre de ces “plans de campagne” .

Une “patate chaude” pour les ministères

La Commission demande à l’Etat français, qui a versé illégalement des aides financières à certains producteurs de fruits et légumes, de prendre “toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire” . La Commission européenne ne percevrait quant à elle (sauf en cas d’amende, si la France refuse de se plier à la décision la concernant) aucun remboursement.
Informés depuis 2002 des soupçons, puis des exigences de la Commission européenne, les ministres français de l’Agriculture semblent avoir tour à tour ajourné la décision de se mettre en conformité avec le droit communautaire. La décision de janvier a imposé à l’Etat français de fournir, d’abord fin mars puis (à la demande des autorités françaises) fin juillet, un rapport complet précisant les bénéficiaires de ces mesures, les montants alloués, et les raisons du versement de ces aides. Réaction du ministre de l’époque Michel Barnier : le dépôt, en avril 2009, d’un recours devant la Cour de justice des communautés européennes, afin de contester le caractère illégal de certaines aides.

Dans sa décision du 28 janvier 2009, la Commission précise cependant que certains documents “indiquent que les autorités françaises étaient informées de la nature douteuse de ces actions au regard du droit communautaire” et que, plus tard, celles-ci n’ont pas “contesté l’analyse préliminaire de la Commission concernant l’incompatibilité de ces aides avec le marché commun au regard de la législation communautaire” .

M. Bruno Le Maire, qui hérite du dossier à l’heure où le malaise agricole est particulièrement prégnant, est parvenu à repousser au 29 septembre la livraison dudit rapport, mais à déclaré vouloir se conformer à la décision de la Commission. Lundi 3 août, le ministre a annoncé que les producteurs de fruits et légumes devraient rembourser des aides publiques versées par l’Etat entre 1992 et 2002, mais souhaite cependant renégocier cette somme à la baisse.

Le malaise paysan

Parallèlement à la crise du lait et au mécontentements des pêcheurs, la décision de la Commission vient frapper le secteur des fruits et légumes, déjà confronté à d’importantes difficultés financières, à une baisse des cours mais aussi, comme les producteurs le soulignent, à une main-d’œuvre plus chère que chez les voisins européens, ce qui crée également une distorsion de concurrence. Mais, à ce jour, il n’existe pas de règles européennes sur ce dernier point.

Si les producteurs ont pu être rassurés par le report et la possibilité d’un nouveau calcul du remboursement pour fin septembre, ainsi que par la promesse du ministre d’apporter de nouvelles aides financières, beaucoup reprochent à l’Etat français d’être seul responsable dans cette affaire. Les producteurs les plus en difficulté ne devraient pas, selon M. Le Maire être concernés par ce remboursement. Quant à ceux ayant bénéficié des aides mais ayant cessé leur activité depuis, leur traitement risque d’être difficile à déterminer.

Sources

Subventions aux producteurs de fruits et légumes : réactions de Bruno Le Maire - Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche

Décision de la Commission du 28 janvier 2009 concernant les “plans de campagne” dans le secteur des fruits et légumes mis à exécution par la France [C 29/05 (ex NN 57/05)] [PDF] - Commission européenne

En savoir plus

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