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Réforme de la zone euro : la France et l’Allemagne en quête d’un compromis

La réforme de la zone euro, qui anime actuellement les discussions franco-allemandes, est au cœur du projet européen d’Emmanuel Macron. L’objectif du président : renforcer la solidarité entre les Etats membres après plusieurs années de rigueur budgétaire. Une ambition à laquelle Angela Merkel répond pour l’heure par la prudence, la chancelière refusant tout mécanisme de redistribution entre les Etats membres. Pour Anne Sander, eurodéputée LR interrogée par Toute l’Europe, il faut assurer la “responsabilité” avant d’organiser la “solidarité”.

Deux événements successifs doivent, au mois de juin, être l’occasion pour les Européens d’avancer dans la réforme de la zone euro. Il s’agira d’abord du sommet franco-allemand du 19 juin, qui se déroulera au château de Meseberg, près de Berlin. Puis les discussions s’élargiront aux 17 autres pays ayant l’euro comme monnaie, lors du Conseil européen des 28 et 29 juin à Bruxelles.

Responsabilité vs. Solidarité

En prévision de ces deux rendez-vous, le dialogue entre Paris et Berlin est logiquement intense. Car s’il ne sera pas seul décisionnaire en la matière, le couple franco-allemand se trouve comme souvent au centre du jeu. Les deux pays réactivent à cet égard le clivage désormais ancien entre la solidarité et la responsabilité.

La France plaide ainsi pour l’établissement de mécanismes à même d’inverser un cycle économique négatif et pour la relance de la convergence, principalement par l’intermédiaire d’un “budget d’investissement” qui serait supérieur à 100 milliards d’euros. L’Allemagne, elle, défend la prolongation du sérieux budgétaire actuel et entend limiter une éventuelle augmentation des fonds à 25 milliards d’euros. Leur allocation serait de surcroît conditionnée à des programmes de réformes structurelles.

Fonds monétaire européen

Les divergences entre Emmanuel Macron et Angela Merkel apparaissent par conséquent importantes. Elles concernent également la possible création d’un Fonds monétaire européen (FME), qui autonomiserait la zone euro vis-à-vis du Fonds monétaire international et qui succèderait au Mécanisme européen de stabilité comme filet de sécurité en cas de nouvelle crise financière.

Une proposition concrète a été formulée par la Commission européenne en décembre dernier, mais la France et l’Allemagne n’ont, ici aussi, pas les mêmes idées quant au mode de fonctionnement d’un tel Fonds. Pour Berlin, il devrait s’agit d’un outil technique qui ne pourrait être activé qu’avec l’accord des gouvernements. Au contraire, pour Paris, un FME aurait vocation à constituer un instrument politique, prenant en compte les situations nationales spécifiques et sous le contrôle de la Commission et du Parlement européens.

Comme l’explique Anne Sander, eurodéputée membre des Républicains, interrogée par Toute l’Europe, les propositions françaises ne sont actuellement pas majoritaires. “Je pense que nous devons aller vers un budget d’investissement, mais il faut le soutenir en l’encadrant” , estime Mme Sander. “En échange d’un soutien financier, il faut que les pays s’engagent à des réformes” , ajoute-t-elle, reprenant ainsi la position de la droite européenne. Même si pour l’élue LR, s’éloignant des déclarations d’Angela Merkel, la création d’un Fonds monétaire européen devrait se faire dans “le giron communautaire” et ne pas relever du cadre “intergouvernemental” .

La prospérité, pas la redistribution de la prospérité

Pour tenter de convaincre la chancelière, le président français a pour argument principal le possible décrochage de certains Etats membres, principalement d’Europe méditerranéenne, si rien n’est fait en matière de solidarité. Les indicateurs économiques tendent aujourd’hui à repasser dans le vert, mais des pays comme l’Espagne, la Grèce, l’Italie et le Portugal sortent essorés de plusieurs années d’austérité. Les taux de chômage, particulièrement des jeunes, culminent en effet toujours à des niveaux très élevés.

Un discours qui ne semble pour l’heure pas porter ses fruits. En atteste l’intervention du Premier ministre néerlandais Mark Rutte devant le Parlement européen le 13 juin. “La promesse de la zone euro, c’est la prospérité, pas la redistribution de la prospérité” , a-t-il déclaré. Sur une ligne encore plus intransigeante qu’Angela Merkel, M. Rutte estime ainsi que l’assainissement des finances publiques et les réformes structurelles sont de nature à constituer une “stabilisation suffisante” pour la zone euro.

Et les discussions relatives à l’avenir du budget européen après 2020 sont susceptibles de prendre la même tournure, avec une confrontation virulente entre les pays de l’UE. Pour Mark Rutte, le budget européen comporte déjà des “centaines de milliards d’euros” et devra “refléter le sérieux de l’Europe vis-à-vis des réformes” . Une manière univoque de prévenir que les Pays-Bas s’opposeront à une hausse des dépenses. Le 12 juin, lors d’un débat sur l’avenir de la zone euro, l’eurodéputé écologiste belge Philippe Lamberts avait fait valoir une opinion inverse et aussi tranchée, estimant que le budget européen actuel est un “budget de divergence et pas de convergence” .

Union bancaire

La capacité des Européens à s’entendre sur une réforme substantielle de la zone euro suscite donc un scepticisme généralisé. A ce stade, seul l’approfondissement de l’Union bancaire semble à portée de main. La mise en place d’une “garantie européenne des dépôts bancaires” , apparaît à cet égard comme la prochaine étape et pourrait faire l’objet d’un accord transpartisan.

L’Union bancaire, initiée par Michel Barnier lorsqu’il était commissaire européen au Marché intérieur (2010-2014) a pour raison d’être d’éviter que ce soit aux contribuables de payer en cas de difficultés bancaires, résume Anne Sander. “Il nous faut maintenant un système garantissant les dépôts des citoyens européens” .

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