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Référendum britannique : la campagne officielle est lancée

Alors que débute au Royaume-Uni la campagne officielle du référendum sur une sortie possible du pays de l’Union européenne, Toute l’Europe propose une piqûre de rappel sur la question du “Brexit”. Contexte, calendrier et enjeux, tout pour vous permettre de comprendre la situation outre-Manche sur un des sujets les plus fondamentaux pour l’avenir de l’Europe.

Brexit scrabble

Brexit or Bremain ?

C’est le vendredi 15 avril que la campagne officielle du référendum sur l’appartenance à l’Union européenne sera lancée. Même si, dans les faits, les partis britanniques ont depuis plusieurs mois organisé leur stratégie, qu’ils soient en faveur d’un départ de l’UE (“Brexit” , abréviation de “British exit” - sortie britannique) ou au contraire pour le maintien dans l’UE - avec un statut spécial (un “Bremain” ou “British remain” - maintien britannique).

Dans l’éventualité où les citoyens du Royaume-Uni décident de rester dans l’Union européenne, le pays conservera sa singularité, en raison de l’accord passé entre le Premier ministre David Cameron et les dirigeants européens en début d’année. Le chef du gouvernement a notamment négocié que son pays soit écarté du processus “d’union toujours plus étroite” évoqué dans les traités européens, qu’il garde sa précieuse livre sterling et qu’il puisse réduire les aides sociales aux immigrés pendant les quatre premières années suivant leur arrivée sur le territoire. Toutefois cela n’a pas convaincu le camp des eurosceptiques qui jugent que les concessions négociées par David Cameron sont insuffisantes pour garantir une indépendance durable au sein de l’UE.

La campagne s’annonce rude car elle bouleverse le clivage politique habituel, et il peut être difficile d’y voir clair à première vue. Le tableau suivant présente la position des principaux partis nationaux et régionaux du pays :

Position Parti politique Bord Région(s)
Parti travailliste Centre-gauche National
Libéraux-démocrates Centre National
Les verts Gauche Angleterre, Ecosse et Pays de Galles
Maintien Parti national écossais (SNP) Centre-gauche Ecosse
Plaid Cymru Gauche Pays de Galles
Sinn Féin Gauche Irlande du Nord
Parti des unionistes d’Ulster (UUP) Centre-droit Irlande du Nord




Sortie Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP) Droite National
Démocrates unionistes d’Ulster (DUP) Droite Irlande du Nord




Neutre Parti conservateur Centre-droit National

Si l’on peut ainsi distinguer les positions officielles des partis politiques, cela ne reflète pas les prises de positions individuelles, qui sont les plus frappantes au sein du Parti conservateur et du gouvernement. Si les deux entités sont officiellement neutres, David Cameron - qui milite pour le maintien dans l’UE - a autorisé ses ministres à se positionner sur la question et à rejoindre l’un ou l’autre camp. Ainsi, sur une trentaine de membres du gouvernement, cinq militent pour le Brexit.

Le camp du maintien regroupe des grands noms de la politique britannique, comme l’ancien Premier ministre John Major, mais également de nombreux patrons d’entreprises locales comme Richard Branson du groupe Virgin, les groupes de supermarchés ASDA et Marks and Spencer, la compagnie aérienne easyJet, etc.

A l’inverse dans le camp du Brexit, on retrouve le turbulent maire conservateur de Londres Boris Johnson - en guerre ouverte avec son meilleur ennemi David Cameron - ou le chef du parti UKIP Nigel Farage qui a toujours milité pour une sortie de l’UE. Ils sont rejoints par cinq ministres du gouvernement, et des députés minoritaires des autres partis qui soutiennent le maintien.

Quelques dates à retenir :

23 juin 2016 : référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’UE.
5 mai 2016 : élections régionales en Ecosse, en Irlande du Nord, au Pays de Galles et municipales à Londres et dans certains villes anglaises.
Avril 2016 : début de la campagne
Février 2016 : le Conseil européen approuve le statut spécial pour le pays en cas de maintien dans l’UE. Cameron soutient le camp “remain” .
Mai 2015 : les conservateurs remportent les élections, Cameron réitère son engagement.
Janvier 2013 : Cameron propose pour la 1ère fois un référendum s’il est réélu en 2015.

La campagne ne pouvant donc pas s’appuyer sur les seuls partis politiques, deux groupes de campagnes officiellement investis par la commission électorale britannique ont été nommés le 14 avril. Du côté des partisans du maintien dans l’UE, une seule campagne a déposé sa candidature, “Britain Stronger in Europe” - Le Royaume-Uni plus fort en Europe. Son président est d’ailleurs l’ancien patron de Marks and Spencer, Lord Stuart Rose. Le groupe est bien entendu soutenu par le Premier ministre.

La chose était plus compliquée du côté des partisans du Brexit puisque ce sont deux formations qui étaient en concurrence : Vote Leave (Votez pour partir), soutenu par Boris Johnson et Grassroots Out (le peuple veut sortir) qui avait les faveurs de Nigel Farage. Le 14 avril, la commission électorale a désigné Vote Leave pour représenter officiellement le camp de la sortie de l’UE.

Comme le précise la BBC, la campagne peut désormais dépenser jusqu’à sept millions de livres sterling, pourra prospecter par email, aura accès à des spots télévisés et à 600 000 livres de fonds publics.

L’économie et l’immigration au cœur de la campagne

La question qui domine les débats concernant un possible retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne est son effet sur l’emploi. Le camp favorable au Brexit estime qu’une fois levée les barrières de la bureaucratie bruxelloise - ce que les britanniques appellent le “red tape” , ou ruban rouge - il sera plus facile pour le pays de créer des emplois. Leurs opposants menacent au contraire qu’à terme des millions d’emplois pourraient être perdus.

Autre thème de discorde, la question du commerce extérieur : si les pro-européens évaluent à plus de 50% de la part totale du commerce extérieur du pays qui est effectué avec l’Union européenne, les détracteurs remarquent que cette part est en diminution depuis ces dernières années et qu’une sortie de l’UE serait l’occasion de se placer sur le marché des pays émergents.

Enfin côté budget, la part de ce que le Royaume-Uni dépense pour l’UE et ce qu’elle reçoit en contrepartie est un sujet sur la table depuis les années 80 et le célèbre “I want my money back!” de Margaret Thatcher. Le pays était en 2013 le deuxième contributeur au budget de l’UE avec une participation d’environ dix milliards d’euros, une dépense que le camp du Brexit qualifie de “droits de douanes dissimulés” pour les produits exportés. A cela le camp du maintien répond que ces dépenses sont largement contrebalancées par les effets bénéfiques du marché unique sur les entreprises britanniques.

La question de l’immigration, déjà posée dans les négociations sur le statut spécial en début d’année, reste au centre des préoccupations. La libre circulation au sein de l’UE, qui concerne les voyages mais aussi l’installation dans un autre pays, implique que de nombreux citoyens européens ont émigré au Royaume-Uni et y travaillent. Pour les partisans du “remain” , cela a un effet positif sur l’économie et sur la croissance. Le camp adverse affirme qu’une réduction de l’immigration réduira la pression sur les services publics (écoles, hôpitaux) tout en favorisant des emplois pour les Britanniques.

Dernier débat sensible, la question de l’unité du Royaume-Uni en cas de sortie de l’Union européenne. Alors que l’Ecosse, qui a rejeté lors d’un référendum en 2014 une possible indépendance, est majoritairement europhile, les politiques locaux -dont le Parti national écossais qui milite pour cette cause depuis sa création - pourrait émettre l’hypothèse de la tenue d’un second référendum sur l’indépendance. L’institut de sondage Ipsos-Mori a ainsi réalisé un sondage en février 2016 auprès des écossais, qui a révélé que 54% d’entre eux voteraient “oui” à l’indépendance si le Royaume-Uni décidaient de quitter l’UE.

Le Premier ministre du Pays de Galles Carwyn Jones, dont la région n’a pourtant pas de mouvement indépendantiste aussi fort que l’Ecosse, a déclaré que “si la nation galloise votait pour un maintien mais que le Royaume-Uni votait pour un retrait, le pays ferait face à une crise constitutionnelle et ne pourrait pas continuer dans sa forme actuelle” .

Dans les sondages, une large part d’indécis

Ce n’est pas dans les sondages qu’il faut chercher une tendance quant à l’issue du référendum. D’autant plus que lors du dernier déplacement des Britanniques aux urnes, en mai 2015 pour les élections législatives, les instituts de sondages s’étaient largement trompé sur les résultats, prédisant une coalition comme en 2010 alors que les conservateurs ont emporté une majorité. L’opinion publique et les politiques sont donc très prudents sur les enquêtes publiées régulièrement.

Depuis le début de l’année, une cinquantaine de sondage ont été effectués, et dans une majorité c’est le camp du maintien qui était en tête. Toutefois, la part des indécis s’étant régulièrement située autour des 20%, les deux scénarios semblent envisageables.

On peut toutefois, comme l’a fait l’institut de sondages YouGov, dresser une carte des régions de la plus eurosceptique à la plus europhile. En se basant sur les profils des quelques 80 000 utilisateurs de cette plateforme de sondages en ligne, on remarque que l’Ecosse est la région la plus favorable à l’UE, comme la plupart des zones urbaines du pays. En revanche, les zones rurales du nord et de l’ouest de l’Angleterre ainsi que le Somerset sont les régions les plus eurosceptiques.

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