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Qu’est-ce que la Conférence sur l’avenir de l’Europe ?

Lancée le 9 mai 2021, la Conférence sur l’avenir de l’Europe s’est achevée le 9 mai 2022, après un an de travail. A la clé, 49 propositions citoyennes réparties en plus de 300 mesures concrètes pour faire évoluer l’UE, issues de près de 40 000 contributions. Pour certaines, la modification des traités serait nécessaire. Une initiative soutenue par le Parlement européen, la présidente de la Commission européenne mais également par le président français Emmanuel Macron.

Le rapport final de la Conférence sur l'avenir de l'Europe, remis officiellement le 9 mai 2022 à Strasbourg, comporte 325 mesures concrètes pour atteindre 49 objectifs
Le rapport final de la Conférence sur l’avenir de l’Europe, remis officiellement le 9 mai 2022 à Strasbourg, comporte 325 mesures concrètes pour atteindre 49 objectifs - Crédits : Mathieu Cugnot / Parlement européen 

Un an de travail, 800 citoyens européens répartis en quatre panels, 12 réunions, 9 thématiques : lundi 9 mai, la Conférence sur l’avenir de l’Europe a officiellement pris fin avec la remise officielle d’un rapport final aux présidents des institutions politiques européennes : Roberta Metsola pour le Parlement européen, Ursula von der Leyen pour la Commission ainsi qu’Emmanuel Macron, au titre de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne.

Les propositions formulées dans ce document conclusif sont au nombre de 325, réparties entre 9 thèmes : environnement, santé, économie/justice sociale, l’Europe dans le monde, valeurs/état de droit, transformation numérique, démocratie européenne, migrations, éducation/jeunesse/sport. Ce rapport avait déjà été finalisé les vendredi 29 et samedi 30 avril, lors de la dernière session plénière des membres de la Conférence. Lui-même issu d’un précédent rapport publié le 17 mars.

Ces mesures ont émergé de la participation de plus 50 000 Européens, à travers le travail de panels citoyens. Certains ont également pris part à des événements organisés dans les Etats membres et le rapport final intègre aussi des contributions formulées avant le 20 février 2022 sur la plateforme numérique multilingue (au nombre de 43 000).

Vers une révision des traités ?

Les citoyens européens ont ainsi proposé, entre autres, de mieux orienter les subventions vers l’agriculture biologique, de pouvoir voter aux élections européennes dès l’âge de 16 ans ou de tenir périodiquement des assemblées citoyennes. Le rapport contient aussi la fin du droit de veto, l’idée d’accorder au Parlement européen le droit d’initiative sur les lois européennes, une plus large place à la majorité qualifiée, la création de référendums à l’échelle de l’Union ou encore la mise en place d’une compétence européenne partagée dans le domaine de la santé. Ces dernières mesures nécessiteraient donc une révision des traités européens.

Les institutions semblent être prêtes à voir ces derniers évoluer. Le 4 mai, les députés européens ont voté une résolution en faveur d’une révision des traités, tout en reconnaissant l’ensemble des mesures mises en avant par la Conférence. Ils ont été suivis le 9 mai par la présidente de la Commission européenne qui a annoncé être encline à une réforme de l’UE, y compris “en changeant les traités si nécessaire”. Une position endossée également par Emmanuel Macron qui a évoqué la convocation d’une convention de révision des traités européens. Le président français a soutenu en particulier la prise de décision à la majorité qualifiée au sein du Conseil (même si cette proposition trouve déjà une opposition parmi 13 pays de l’UE). 

Des mois de débats en France et en Europe

Il s’agit là d’un aboutissement pour un projet dont la création a été évoquée dès le mois de mars 2019. Reportée en raison de la crise sanitaire, la Conférence sur l’avenir de l’Europe avait finalement été lancée le 9 mai 2021. A cette occasion, le président français Emmanuel Macron avait prononcé le discours d’ouverture dans l’hémicycle du Parlement européen à Strasbourg, avant que les présidents du Parlement européen David Sassoli (décédé depuis le 11 janvier 2022), du Conseil de l’Union européenne António Costa, et de la Commission européenne Ursula von der Leyen ne s’expriment également.

Ce sera un exercice inédit : prendre le pouls du continent et envisager notre avenir”, avait ainsi déclaré le président de la République, la Conférence sur l’avenir de l’Europe se présentant comme un exercice de démocratie participative. Son objectif était de donner aux citoyens des 27 Etats membres la possibilité d’exprimer ce qu’ils attendaient de l’Union européenne.

Pendant plusieurs mois, des débats, conférences et autres événements sur l’avenir de l’Europe ont donc été organisés dans tous les pays membres de l’Union. Côté français, des conférences se sont tenues dans l’intégralité des régions de métropole et d’outre-mer, du 10 au 12 septembre puis du 24 au 26 septembre 2021, où 18 villes étaient concernées, dont Lille, Dijon, Bordeaux ou encore Fort-de-France. 

En tout, 830 personnes tirées au sort se sont réunies par groupe afin de répondre à la question suivante : “En tant que citoyen français, quels changements souhaitez-vous pour l’Europe ?”. “C’est simple et très ouvert, de manière à laisser le champ libre à toutes les expressions, tout en acceptant d’emblée l’idée que l’Europe est imparfaite”, avait commenté le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes Clément Beaune dans une interview à Ouest-France en septembre 2021. Parmi ces citoyens, 100 d’entre eux ont participé à une conférence de restitution en octobre à Paris afin de produire une synthèse des débats régionaux. 

En complément, une consultation en ligne intitulée “Parole aux Jeunes” a été menée par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères en partenariat avec Make.org. Plus de 50 000 jeunes de 15 à 35 ans ont ainsi exprimé leurs idées et leurs priorités pour l’Europe de 2035.

La contribution citoyenne fait la synthèse entre les résultats des consultations régionales et celle menée en ligne. Le document est disponible ici.

En mars 2021, l’ancien président du Parlement européen en exercice David Sassoli, insistait pour que la réforme des traités ne soit pas un “tabou”. “Tout doit être possible”, avait-t-il expliqué dans une interview au Figaro, en mars 2021. 

Soucieux d’influer sur le résultat de la Conférence, 12 Etats membres ont fait part de leurs ambitions, à l’occasion d’une réunion des ministres des Affaires européennes le 23 mars 2021. L’Autriche, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Irlande, la Lettonie, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie ont listé leurs priorités comme le respect de l’état de droit, la transition numérique, la relance économique, le climat et les migrations. Ces derniers ont également insisté pour que la Conférence ne “crée pas d’obligations légales”, dans le but d’éviter les débats sur la réforme des institutions. 

Pourquoi une Conférence sur l’avenir de l’Europe ?

L’idée avait été formulée dans une tribune du président français Emmanuel Macron, publiée au mois de mars 2019 dans de nombreux journaux européens. “Jamais depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Europe n’a été aussi nécessaire. Et pourtant, jamais l’Europe n’a été autant en danger”, expliquait-il alors, soulignant les difficultés politiques de l’UE rencontrées depuis plus de 10 ans : la crise économique et le sort réservé à la Grèce, la crise migratoire et enfin, plus récemment, le Brexit, un “piège” qui “menace toute l’Europe”, selon le chef de l’Etat. S’ajoutera un temps de crispation institutionnelle quelques mois après cette déclaration, lorsque les Vingt-sept se sont livrés à d’âpres discussions pour désigner les dirigeants des institutions, après les élections européennes.

Un processus de nomination que la France et l’Allemagne se sont depuis engagées à clarifier. Leur contribution commune, dévoilée au mois de novembre la même année, avait relancé l’idée d’une Conférence sur l’avenir de l’Europe. Elle sera reprise quelques semaines plus tard par la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, dans ses orientations politiques de janvier 2020. Avant que la date du 9 mai 2020 ne soit avancée pour le lancement.

Pourquoi ce retard ?

A l’image des Jeux Olympiques de Tokyo et de l’Euro de football, la Conférence sur l’avenir de l’Europe a été repoussée en raison de l’épidémie de coronavirus qui a, évidemment, mobilisé toutes les énergies. Les efforts et prises de décisions se sont concentrés sur la réponse d’urgence à cette crise sanitaire et notamment à la création d’un ambitieux plan de relance. Le projet de conférence et de consultation des citoyens a ainsi été suspendu, non seulement parce qu’il s’avérait impossible d’organiser des évènements, mais également parce que le sujet de la santé vampirisait tout autre débat. 

Une situation face à laquelle l’eurodéputé belge Guy Verhofstadt, n’avait pas manqué d’ironiser, à l’occasion d’un débat dans l’hémicycle en juin 2020. Car la pandémie n’est pas seule en cause. Les tractations ont traîné sur un point essentiel : la gouvernance. Guy Verhofstadt n’y est d’ailleurs pas étranger. Soutenu par les principaux partis européens et par le président français, le député européen a finalement dû partager la présidence, certains dirigeants européens s’inquiétant de sa vision trop “fédéraliste” .

Mais la Conférence a finalement franchi un pas important le 10 mars 2021. A l’occasion de la session plénière du Parlement européen, les présidents des trois institutions qui mènent conjointement le projet (Commission, Conseil, Parlement) ont signé une déclaration commune qui en précise les grandes lignes.

La crise sanitaire et ces longues tractations ont également eu des conséquences sur la durée du projet. Initialement pensé pour s’étaler sur deux ans (2020-2022), celui-ci sera raccourci pour se conclure au printemps 2022. Un délai soutenu par la France, l’échéance arrivant pendant sa présidence tournante du Conseil. 

Qui la dirige ?

La déclaration commune mentionne une “structure de gouvernance simple”. Pour autant, à défaut d’une seule tête, la Conférence en était dotée de trois. Un compromis trouvé entre la présidence du Conseil et le Parlement européen instaure donc une présidence tripartite, au sein de laquelle les deux institutions occupent un siège chacune. Le troisième échoit à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.

Cette présidence conjointe est assistée d’un comité exécutif composé de neuf membres, trois par institution, ainsi que de quatre “observateurs”. Ce dernier a débuté ses travaux en tenant sa réunion constitutive le 24 mars 2021. 

Enfin, une assemblée plénière s’est réunit plusieurs fois à Strasbourg, avec des citoyens, des membres des institutions et organes européens, dont le Comité des régions et le Comité économique et social européen, ainsi que des parlementaires nationaux.

Les citoyens, principaux intéressés par cet exercice de démocratie participative, pouvaient contribuer au débat à travers une plateforme numérique multilingue mise en ligne le 19 avril 2021 et clôturée le 9 mai 2022. Selon le communiqué de la Commission européenne, cet outil est “le pôle central” de la Conférence et permet aux Européens de “proposer leurs idées, de commenter celles des autres, de créer des événements et d’y participer”. Cette plateforme donnait également une image en temps réel de la mobilisation des citoyens et de leurs propositions dans les 27 pays de l’Union. Enfin, entre septembre 2021 et février 2022, des panels citoyens, réunissant des Européens de tous bords ont été organisés pour débattre de grands thèmes européens. 

Qu’en pensent les citoyens européens ?

En mars 2021, ceux-ci semblent voir la Conférence sur l’avenir de l’Europe d’un bon œil, selon les résultats d’un Eurobaromètre publié le 9 mars, la veille de la signature de la déclaration. 76 % des sondés s’accordaient à dire que celle-ci était un “progrès significatif pour la démocratie en Europe”. 51 % estimaient d’ailleurs qu’ils pouvaient s’impliquer dans ce projet, cachant de grandes disparités entre les plus enthousiastes comme les Irlandais (81 %) et les moins intéressés, comme les Portugais et les Bulgares (34 % chacun). Les Français, eux, étaient 58 % à déclarer qu’ils ne s’impliqueraient pas, soit 10 points au-dessus de la moyenne européenne (48 %).

L’Eurobaromètre listaient également les attentes des sondés. 45 % des Européens plaçaient le changement climatique parmi leurs principales préoccupations, devant le terrorisme (38 %) et les risques liés à la santé (37%). Celles-ci différaient toutefois d’un Etat membre à l’autre. Si 71 % des Portugais estimaient que la santé étaient le principal défi pour l’avenir de l’UE, 64 % des Suédois pointaient du doigt les problématiques environnementales. Tandis que 59 % des Français semblaient préoccupés avant tout par le terrorisme.

Eurobaromètre : principales préoccupations des Européens

Un nouvel Eurobaromètre publié conjointement par la Commission et le Parlement en janvier 2022 mettaient en évidence la demande des Européens à ce que la Conférence “débouche sur des résultats concrets”. En effet, les personnes interrogées “seraient davantage incitées à participer aux actions organisées dans le cadre de la Conférence si elles étaient convaincues de l’incidence réelle de leur participation (53 %)”, expliquait le communiqué. 

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6 commentaires

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    Jack ALEXANDER

    Le titre de cette campagne de ‘com’ est déjà trompeur. Le Royaume-Uni, la Suisse, la Turquie,… la Russie sont dans l’Europe et se soucient fort peu de notre opinion sur leur avenir. Il fallait parler de l’avenir de l’UNION !
    A la cérémonie de clôture, ni Van der Leyen, Michel n’était présent. Ce président fantôme et transparent du Conseil a immédiatement déclaré que la renégociation des traités n’était pas à l’ordre du jour. La porte est refermée, circulez, il n’y a plus rien à voir. Pas toucher à la règle de l’unanimité qui empêchera tout progrès, à la double taxation des revenus mobiliers et des patrimoines transfrontaliers, à l’interdiction des citoyens de voter aux législatives dans l’Etat membre d’accueil, etc…, à la responsabilité personnelle des politiciens lorsqu’ils contribuent à la violation du droit de l’Union. Macron, Michel, Reynders, Orban, Morawiecki, Borissov, Babis & co devraient être à la retraite forcée depuis longtemps. Mais ils vous ont bien eu, une fois de plus…
    Et surtout crescendo en cette période de poches trouées, de vaches maigres pour le citoyen mais pas pour eux, vous ne trouverez nulle part le montant de la facture exorbitante de cette campagne de marketing orchestrée par des politiciens imperméables au changement. C’est pourtant votre pognon qu’ils ont dépensé.

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    Vidal CB

    Sur le sujet concernant non pas l’avenir de l’Europe, mais plutôt le devenir de l’Europe, j’ai déjà eu l’occasion d’exprimer mon opinion et surtout en ce qui concerne le traité de Lisbonne, le quel traité est a mes yeux « antidémocratique » les Français ayant dits « non » sur la forme mais pas obligatoirement sur le fond, après consultation par référendum, par la suite le Président de l’époque « Nicolas Sarkozy » a tout simplement trahis le peuple, Sarkozy ayant reconnu son erreur qui a payé très cher en 2012 (le peuple s’étant rappelé à son bon souvenir.
    Ceci n’engage que ma personne, mais cependant le fait que certains pays optent pour être en retrait du fédéralisme, n’empêche pas ceux qui veulent se fédérer de le faire, et surtout n’empêche pas l’Union Européenne de fonctionner normalement… L’union Européenne se doit d’être un exemple de démocratie et de respect des citoyens qui sont des électeurs en puissance.
    Cordialement CBV (Christian-Bernard Vidal)

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    Mons

    Bonjour @ tou(te)s, j’ai appris seulement ce samedi qu’un tirage au sort de citoyen(ne)s s’était fait pour participer à 1 conférence sur l’avenir de l’Europe.….! Manifestement, l’information est loin d’être passée, pourquoi, s.v.p.? Merci pour vos réponses motivées car, en France, de nombreux problèmes existent & la population est peu & mal informée.….!

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    Gérard Devillers

    Excellente initiative qui doit accélérer la constitution d’une Europe lisible, dégagée des principes anciens qui assurent son immobilité, volontariste et humaniste comme l’a précisé le Président Macron.

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    Rachida Nieto

    Bonjour, Face à la crise épidémique et ses conséquences qui fragilisé le système économique et sociale, le problème du sécurité, la crise migratoire et l’enjeu environnemental et numérique. Il est nécessaire et urgent que les Etats-membres coopèrent et collaborent entre eux dans l’objectif d’affirmer l’identité Européenne et établir sa souveraineté sans replis économique et numérique et dans la recherche médicale, basée sur la compétitivité et le créer un bon marché concurrentiel pour promouvoir l’investissement et l’emploi ainsi prévoir les crises épidémiques pour faire face par une meilleure gestion. donc trouver un model Européen plus juste pour renforcer le système économique et pour une inclusion sociale.
    NB je souhaite participer, je vous prie de bien vouloir m’envoyer le lien pour participer. Merci par avance.

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      Rachida Nieto

      vous avez tord
      .