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Planifions notre avenir écologique !

Simon Latham du think tank britannique Policy Network et coauteur de l’ouvrage “Construire un futur pauvre en carbone : les politiques du changement climatique” explique à Touteleurope.fr les voies à suivre pour lutter efficacement contre le changement climatique.

“Le Sommet de Copenhague est l’archétype du paradoxe de la société mondialisée, dans laquelle nous vivons.

D’un côté, il s’agit d’un événement mondial ; le simple fait que ces cycles successifs aboutissant au Sommet de Copenhague aient eu lieu a servi à mettre en lumière les impératifs politiques, économiques, moraux pour ne pas parler des impératifs climatiques, de réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre (GES).

En matière de changement climatique, le spectre menaçant du Sommet de Copenhague, et la pression qui pèse sur celui-ci, ont donc été utiles pour encourager et construire un consensus entre les très différents membres de la communauté internationale. Enfin, ce processus a aussi conduit les Etats et l’opinion publique à soutenir des objectifs de réduction de GES ambitieux.
Policiy Network Simon Lathan CopenhagueSimon Latham est le conseiller principal de Roger Liddle, le Président du thinktank international Policy Network. Ils ont corédigé l’ouvrage ” Construire un futur pauvre en carbone : les politiques du changement climatique” , téléchargeable ici.

Mais, en un sens, le sommet de Copenhague connaît aussi des limites.

Récemment, un des plus éminents scientifiques spécialisés sur le climat, James Hansen, a expliqué que quelque soit l’accord conclu lors des négociations au Danemark, il serait tellement floué au départ, qu’il vaudrait mieux tout recommencer à zéro.

‘Je préférerais qu’il n’y ait pas d’accord, plutôt que de voir les gens se réjouir de ce qui ne serait que la continuation d’une voie désastreuse’ a-t-il déclaré.

La question du “si et comment” un accord international sur la réduction du carbone peut être conclu à Copenhague, est, à juste titre, une question de premier ordre, et pas uniquement pour les raisons mentionnées ci-dessus.

C’est pour cela qu’on peut d’ailleurs être optimiste sur la conclusion d’un accord - la compréhension internationale de cet impératif ayant considérablement avancé depuis le Protocole de Kyoto.

Un accord international a donc un rôle clé à jouer dans la fixation d’objectifs chiffrés, de répartition des rôles, et de détermination d’actions efficaces à mener après le sommet, en empêchant les actions dites de “passagers clandestins” . Mais quelque soit le résultat des négociations, il dépendra essentiellement des pays industrialisés et de leur politique nationale en matière de lutte contre le changement climatique, qui seuls peuvent faire une vraie différence.

Un accord international est sans aucun doute très important mais pas crucial.

Par définition et comme l’éminent professeur de la LSE, Anthony Giddens, l’a parfaitement démontré, dans le monde développé, nous manquons d’une politique efficace de lutte contre le changement climatique. Cette politique est nécessaire si nous voulons un futur pauvre en carbone.

Etant donnée l’importance des réductions d’émission à réaliser, c’est une politique forte, porteuse d’espoir et d’opportunités, et soutenue par une coexistence revisitée de l’économie de marché et de l’Etat, qui est nécessaire.

A cette fin, Policy Network, le think tank international de centre gauche, basé à Westminster, a développé au cours de ces 18 derniers mois une recherche menée par Anthony Giddens et intitulée ” les politiques du changement climatique” .

C’est un projet qui cherche à comparer les différentes perspectives nationales pour trouver un intérêt commun à agir. Relever le défi du changement climatique passe par la reconnaissance d’un intérêt commun à la réduction des émissions, mais aussi par l’acceptation qu’il n’existe pas qu’une solution valable pour traiter ce problème.

Le débat sur le changement climatique devrait même nous pousser à aller plus loin que les questions nous liant tous, plus loin que le marchandage de compromis et le projet détaillé d’accord sur les réduction de GES. Le débat devrait se concentrer sur les analyses des actions nationales dans les pays développés.

Voilà une grande mission. Trouver les solutions adéquates et les bonnes alternatives pour réduire la consommation des dangereux GES est un défi technologique énorme. Cela nécessite la formulation d’une réponse économique sophistiquée pour corriger ce que Nicholas Stern décrivait à raison comme ‘la défaillance de l’économie de marché la plus grosse de l’histoire’.

Afin de faciliter ces percées technologiques et pour créer un cadre économique plus rationnel pour combattre efficacement le changement climatique, un profond changement est nécessaire dans la façon de voir les choses et dans le choix des politiques à mener.

Afin de se donner toutes les chances d’atteindre des réductions d’émission sur le long terme, le défi pour les politiques nationales se trouve dans le développement de formes nouvelles et sophistiquées de planification gouvernementale.

En effet, le défi du changement climatique est tel qu’il pose des problèmes complexes de gouvernance que la composition actuelle des Etats ne permet pas de dépasser. Cela s’explique car cela ne correspond pas tout à fait aux obligations habituelles relevant de la responsabilité locale et qu’il s’agirait de définir de nouvelles priorités de politiques publiques.

Cela requiert également un plus grand rôle et même un rôle pilote des gouvernements dans l’économie, nécessaire notamment dans la planification à long terme, permettant par exemple, le financement d’infrastructures pour faciliter l’économie de carbone.

Cependant, ce besoin de planification va à l’encontre de l’orthodoxie néo-libérale qui a dominé les politiques publiques ces dernières années, alors que nous exigions des gouvernements qu’ils évitent justement les erreurs d’une planification de l’économie centralisée, telle que pratiquée dans la période de l’après-guerre.

Aujourd’hui, certains Etats sont plus avancés que d’autres dans ce domaine, et, bien sûr, ce défi de renouveau est un projet difficile à envisager surtout pour les pays en voie de développement. Néanmoins, dans les pays développés, c’est uniquement et avant tout au niveau national que les progrès en matière de lutte contre le changement climatique peuvent être réels.

Il semble que la rhétorique du Sommet de Copenhague soit donc viciée à la base. Cette théorie consistant à dire que si un accord international contraignant n’est pas atteint, les efforts pour lutter contre le changement climatique s’affaibliront inévitablement et perdront leur soutien dans le discours politique national est sans compter sur la conscience grandissante, à travers le monde, de l’importance morale et économique du combat environnemental.

En effet, les efforts pour lutter contre le changement climatique se feront rapidement et indépendamment du Sommet de Copenhague. L’échec potentiel du sommet n’affectera pas les missions que les gouvernements nationaux ont déjà entamées, et qu’ils continueront à mener pendant les décennies à venir.

Il en est ainsi car la mondialisation signifie précisément que les problèmes sont mondiaux. Les Etats luttent donc ensemble contre ces problèmes qui les concernent tous d’une manière ou d’une autre. Mais se lier par un accord international est une autre histoire. ”

Simon Latham, Policy Network

Simon Latham est le conseiller principal de Roger Liddle, le Président du thinktank international Policy Network. Son opinion ne représente pas nécessairement celui du Policy Network http://www.policy-network.net/

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