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Pacte vert : le Parlement européen pose ses conditions

Pour parvenir à la neutralité carbone en 2050, le Parlement européen appelle les Etats membres à s’engager sur des objectifs intermédiaires. Et à doter l’Union de fonds “adéquats” pour assurer la transition. A défaut, les députés n’hésiteront pas à amender les propositions législatives qui lui seront soumises dans le cadre du Pacte vert et du prochain budget européen pour la période 2021-2027.

David Sassoli, le président du Parlement européen, et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, en décembre 2019 - Crédits : Parlement européen
David Sassoli, le président du Parlement européen, et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, en décembre 2019 - Crédits : Parlement européen

Le Parlement européen a adopté le 15 janvier sa position concernant le Pacte vert européen, le programme écologique de la nouvelle Commission européenne. Celle-ci l’a présenté aux eurodéputés le 11 décembre, avant de détailler un mois plus tard les moyens qui seraient mis en œuvre pour le financer.

Dans une résolution adoptée par 482 voix contre 136 (et 95 abstentions), les députés européens soulignent “l’urgence d’une action ambitieuse […] pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 ° C et pour éviter une perte massive de biodiversité” . Par conséquent, ils “saluent le fait que le plan [de la Commission européenne] vise la neutralité carbone d’ici 2050″ , résume un communiqué. Mais le Parlement “veut encore plus d’ambition” , précise cette publication.

Fixer des objectifs intermédiaires et rehausser les objectifs existants

Pour parvenir à la neutralité carbone, les députés exhortent notamment les Etats membres à adopter rapidement (avant la COP26 de novembre 2020) de nouveaux objectifs intermédiaires pour 2040. Et à rehausser les cibles déjà fixées pour 2030.

A l’heure actuelle, les Etats membres se sont engagés à porter la part des énergies renouvelables à 32 % de leur production d’énergie à l’horizon 2030. De même qu’à réduire de 40 % les émissions européennes de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990 (objectifs contraignants). Dans son Pacte vert, la Commission européenne propose de porter la réduction des émissions à “au moins 50 %” en 2030. Mais le Parlement européen, qui a décrété en novembre “l’état d’urgence climatique” en Europe préconise, lui, une réduction de 55 %.

Dans sa résolution adoptée le 15 janvier, il appelle aussi les Etats membres à se fixer des objectifs contraignants en matière d’efficacité énergétique, alors que seul un objectif non contraignant a été adopté en 2018 : améliorer d’au moins 32,5 % l’efficacité énergétique par rapport aux projections faites en 2007 pour 2030.

Garantir un financement “adéquat” pour le fonds de transition

Le deuxième volet qui retient particulièrement l’attention des parlementaires est celui de l’aide apportée aux régions, aux secteurs d’activité et aux citoyens qui seront les plus touchés par cette transition verte.

Le Pacte vert, ça passera ou ça cassera, tout dépendra du financement. Nous l’avons vu au Conseil européen de décembre” , a ainsi prévenu le 14 janvier Siegfried Mureșan, au nom du Parti populaire européen (PPE, centre droit). En décembre à Bruxelles, la Pologne - encore très dépendante du charbon - a refusé de soutenir l’objectif de la neutralité carbone pour 2050. Pour embarquer tous les pays de l’UE vers cet horizon vert, le Parlement européen appelle donc à “garantir une transition juste et inclusive” , grâce à la mise en place rapide d’ “un mécanisme de transition doté d’un financement adéquat” . “Il faudra une enveloppe importante pour minimiser l’impact” , a expliqué l’élu roumain du PPE.

Quelques minutes plus tôt, la Commission européenne venait de présenter dans l’hémicycle strasbourgeois son “Fonds pour la transition juste” . Doté de 7,5 milliards d’euros - qui permettraient de mobiliser “au moins 100 milliards d’euros” entre 2021 et 2027 selon Frans Timmermans, vice-président de la Commission en charge du climat - ce fonds pourrait être utilisé pour former les travailleurs aux “emplois d’avenir” ou “revoir les installations nationales pour préparer le terrain pour les nouvelles activités” . Il s’agit d’un message envoyé aux mineurs des Asturies, ou à ceux qui exploitent le gaz de schiste dans les pays baltes […]. Nous sommes à vos côtés tout au long de cette transition” , a-t-il promis.

Mais “7,5 milliards d’euros en 7 ans ; 108 régions minières… cela signifie environ 10 millions d’euros par région et par an. Est-ce que cela suffit ?” , s’est interrogé l’écologiste allemand Niklas Nienaß (Verts/ALE). “Vous voulez multiplier l’effet avec des investissements privés, mais il n’y a pas 100 milliards dans le mécanisme de transition” , a-t-il observé. Selon son groupe parlementaire, il faudrait donc “un financement plus cohérent, afin que les travailleurs miniers ne soient pas les otages des négociations du cadre financier pluriannuel tous les 7 ans” .

Plus de ressources propres pour le budget de l’UE

Ce cadre financier de sept ans - actuellement en cours de négociation pour la période 2021-2027 - est la troisième grande préoccupation du Parlement européen.

Car le Pacte vert, dans son ensemble, est un “projet colossal” qui “nécessite une véritable transformation de notre système socio-économique et de notre mode de vie” , a souligné le 14 janvier l’eurodéputée espagnole Iratxe Garcia Pérez, la cheffe des sociaux-démocrates (S&D) au Parlement européen.

Au total, la Commission européenne chiffre à 260 milliards d’euros annuels les investissements supplémentaires nécessaires pour réaliser les objectifs de l’UE en 2030. Sa présidente Ursula von der Leyen mise sur un vaste plan d’investissement public/privé. Mais un quart du budget de l’Union devrait, lui aussi, être mis à contribution des ambitions climatiques. Or “nous ne savons pas d’où viendront les ressources” , a déploré l’élu d’extrême droite (ID) Gianantonio Da Re. “Si elles proviennent d’autres programmes, quels seront-ils ? Quels seront ceux qui seront revus à la baisse ?

Il faut des fonds supplémentaires, pour ne pas réduire la politique de cohésion ni la politique agricole commune. C’est essentiel” , a pour sa part martelé Iratxe Garcia Pérez.

Pour augmenter les recettes de l’UE, plusieurs projets sont dans les cartons (comme une taxe sur les déchets plastiques non recyclés, une taxe sur l’économie numérique ou encore une assiette commune pour l’impôt sur les sociétés), mais certains sont bloqués depuis des mois, voire des années. Si les Etats membres rechignent à augmenter leurs contributions pour alimenter les caisses de l’UE entre 2021 et 2027, et que de nouvelles ressources propres ne sont pas adoptées, le Parlement européen a d’ores et déjà averti qu’il serait prêt à retoquer le prochain projet de CFP.

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