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Nous avancerons en faisant la pédagogie de l’interdépendance, par Marcel Grignard

Le 25 mars prochain, l’Europe fêtera ses 60 ans à l’occasion de l’anniversaire du traité de Rome. Or fragilisée par la défiance grandissante des citoyens et par le Brexit, l’Union européenne semble à un tournant de son histoire.

Pour envisager l’avenir et les pistes de relance de la construction européenne, Toute l’Europe donne la parole à Marcel Grignard, président de Confrontations Europe. Selon lui, “les solidarités ont été mises à mal” et la relance de l’Europe passera par la “pédagogie de l’interdépendance”.

Marcel Grignard (c) CESE

Par Marcel Grignard, président de Confrontations Europe

Les raisons de redonner de la vigueur au projet européen sont nombreuses : garantir sécurité intérieure et extérieure face aux menaces terroristes et à un voisinage belliqueux, assurer notre devenir économique dans un monde bousculé par la révolution du numérique, porteur d’opportunités mais aussi lourd de menaces, relever les défis climatiques et environnementaux…

Mais on ne passe pas si facilement des sujets à traiter, qui peuvent faire a priori consensus, au contenu des politiques à mettre en œuvre. Et comment faire pour dépasser les crises multiples dans lesquelles l’Europe se débat ? Soixante ans d’Europe nous ont apporté beaucoup : paix et consolidation de la démocratie sur notre continent, une certaine prospérité… Il reste que l’Europe d’aujourd’hui est confrontée à la montée des replis nationaux, reflet d’une défiance des citoyens à son égard. Qu’il s’agisse de la gestion de la crise de l’euro, de l’accueil des réfugiés, des concurrences sociales et fiscales, des inégalités, les solidarités ont été mises à mal.

Marcel Grignard est président de Confrontations Europe, think tank européen, depuis 2014. Il est ancien secrétaire général adjoint de la CFDT, et ancien secrétaire général de la Fédération de la Métallurgie.

Nos Etats membres sont pour la plupart traversés par des crises du politique et de la démocratie et l’Union Européenne en est le réceptacle. Rien ne peut s’y faire sans les responsables de nos gouvernements trop occupés à la gestion de leurs intérêts nationaux alors qu’ils sont co-responsables des politiques européennes. Le faible pouvoir politique de la Commission européenne, ainsi qu’une démarche trop réglementaire et descendante, laissent à penser que l’Europe est inefficace.

Relancer le projet Européen, c’est décider des politiques pour relever les défis communs, donner du sens à l’action, mais c’est aussi une question de méthode. L’enjeu est d’autant plus démocratique qu’il s’agit d’avancer dans une souveraineté partagée.

Que voulons-nous faire ensemble ? Comment envisageons-nous notre destin commun d’Européens ? C’est à ces questions que nous devons répondre. Cela exige de connaître ce que sont les autres Européens, reconnaître nos différences qui sont sources de richesses, bien plus qu’un frein à faire ensemble, les dépasser pour agir ensemble. Nous avancerons ensemble en faisant la pédagogie de l’interdépendance et de la plus-value de la subsidiarité. Nous assurerons mieux notre sécurité dans des frontières communes en y mettant les moyens et cela nous coûtera moins cher que la gestion des frontières nationales. Sans mutualisation de nos politiques de défense, nous n’aurons pas les moyens de rivaliser avec les grandes puissances militaires. Sans monnaie commune, nous ne pèserons pas dans les politiques indispensables à la stabilité monétaire.

Et que dire de la nécessité de maîtriser la protection et l’utilisation des données du big data, véritable enjeu de société ? De la régulation de la finance afin qu’elle soit au service de l’économie et réponde aux enjeux sociétaux ? De notre capacité à réaliser les investissements de long terme dont nous avons besoin en termes d’industries clés, d’infrastructures, d’innovation, de développement humain.

Autre enjeu vital : l’articulation des différents espaces européens. Une Europe à plusieurs vitesses, qui accentuerait les clivages entre le centre (c’est-à-dire les fondateurs) et la périphérie (notamment l’Europe centrale et orientale), conduirait à renoncer à unir les peuples qui composent l’Union alors que c’en est l’esprit fondateur.

Relancer le projet européen, décider de ce que doit être l’avenir commun des Européens ne doit pas se limiter aux conciliabules entre chefs d’Etats, préparés dans le secret des cabinets. Nous ne croyons pas davantage à la voie qui passerait par la réforme des institutions. Redonner sens et vigueur au projet européen passe par la délibération aux différents niveaux, de nos territoires à l’Europe en associant les acteurs de la société civile. Elus et responsables institutionnels doivent la mettre en œuvre. Nous avons chacun une part de responsabilité dans ce que l’Europe a fait, n’a pas fait, et dans ce qu’elle doit faire.

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