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Lutte contre le terrorisme : l’Europe tient-elle ses promesses ?

“Nous devons montrer aux terroristes qu’ils n’ont aucune chance de s’attaquer aux valeurs européennes”. Le 14 septembre 2016, à l’occasion de son traditionnel discours sur l’état de l’Union, Jean-Claude Juncker a, sur un ton austère, une nouvelle fois insisté sur la question de la sécurité de l’Union européenne. Un sujet particulièrement sensible un an après les attentats de Paris et sur lequel les Européens sont en attente de résultats concrets. PNR, échange de renseignements, renforcement d’Europol, les outils et les acteurs de la lutte contre le terrorisme sont à l’ordre du jour et pas à pas des progrès sont enregistrés.

Policiers à Bruxelles

Le terrorisme, une préoccupation en nette progression en Europe

Depuis les attentats du World Trade Center en 2001 et ceux de 2004 à Madrid, l’Union européenne s’est dotée d’instruments pour renforcer sa capacité d’action. Les attentats en France de janvier et novembre 2015, ceux de Bruxelles et Zaventem en mars 2016, puis celui de Nice en juillet 2016 ont accru la détermination des 28 Etats membres à apporter une réponse commune à la lutte contre le terrorisme. Une réponse qui correspond à une vraie attente des Européens.

L’opinion publique dans l’Union européenne - Eurobaromètre juillet 2016

Publié en juillet 2016, le dernier Eurobaromètre de la Commission européenne montre que la lutte contre le terrorisme est la seconde principale préoccupation des Européens, après l’immigration et juste avant la situation économique des Etats membres qui occupe la troisième place.

Ce chiffre qui résulte d’une étude réalisée après deux années particulièrement marquées par des attentats, mais juste avant la tuerie du 14 juillet à Nice, montre également que cette préoccupation est sans grande surprise en nette progression. Une préoccupation qui arrive en tête dans huit Etats membres - en Irlande (50%), à Chypre (50%), en Roumanie (49%), en Croatie (48%), au Luxembourg (47%), au Portugal (40%), en France (39%) et en Espagne (35%) - et se trouve en seconde position dans 19 pays.

A l’approche des élections présidentielles en France, la question de la lutte contre le terrorisme occupe une place parfois prioritaire dans les programmes politiques. Mais même si elle reste avant tout une compétence nationale, le cadre juridique permet aux Etats membres de coordonner les moyens d’actions et les autorités chargées de la politique antiterroriste. Dotée de nombreux outils, l’Union européenne mène un long combat depuis plusieurs années et particulièrement depuis les attentats de Charlie Hebdo.

Renforcer la coopération policière et judiciaire

C’est un constat qui revient souvent : l’Union européenne dispose d’outils et d’acteurs pour lutter contre le terrorisme mais leurs pouvoirs ne sont pas assez accrus et leur coordination doit être améliorée. Ce devrait être le cas à partir du mois de mai 2017. A cette date, de nouvelles règles concernant le mandat d’Europol, l’Office européen de police créé en 1995, entreront en vigueur.

Ainsi, Europol devrait être en mesure d’échanger des informations directement avec des entités privées telles que des entreprises ou des ONG, dans le but de travailler plus rapidement et plus efficacement. Par exemple, l’unité de signalement des contenus sur Internet d’Europol pourra contacter directement un fournisseur de service de réseau social, tel que Facebook, pour lui demander de supprimer une page web gérée par l’État Islamique (EI), afin d’empêcher plus rapidement la diffusion de propagande terroriste, explique le site du Parlement européen. Des moyens qui doivent permettre d’arrêter plus facilement les terroristes sur le sol européen.

Sécurité : les chantiers de la Commission européenne

Adopté par la Commission européenne le 28 avril 2015, le programme européen en matière de sécurité constitue un socle de mesures pour lutter contre le terrorisme pour la période 2015-2020. Depuis son adoption, plusieurs avancées peuvent être citées. Les principaux domaines faisant l’objet d’une attention particulière ont été renforcés par les plans d’action adoptés en décembre 2015 sur les armes à feu et les explosifs par exemple. Actuellement, les députés européens se penchent sur une révision de la directive européenne afin de renforcer le contrôle des armes tirant à blanc ou désactivées.

En février 2016, un plan sur le renforcement de la lutte contre le financement du terrorisme a été adopté. Il s’agit principalement d’une part de tracer les terroristes en surveillant les mouvements financiers et de les empêcher de transférer des fonds et d’autre part de déstabiliser les sources de revenus utilisées par les organisations terroristes, en s’attaquant à leur capacité de lever des fonds.

Par ailleurs cette année deux communications ont été adoptées, l’une sur les “systèmes d’information plus robustes et plus intelligents au service des frontières et de la sécurité” et la seconde sur la “mise en œuvre du programme européen en matière de sécurité pour lutter contre le terrorisme et ouvrir la voie à une union de la sécurité réelle et effective” .

Comme promis au lendemain des attentats du 13 décembre 2015 par les ministres européens de l’Intérieur un nouveau corps européen de garde-côtes et de garde-frontières a été créé. Inauguré en octobre dernier, ce nouvel acteur doit mener une coopération renforcée avec d’autres agences et organisations en surveillant les frontières extérieures.

Pour accroître la sécurité au sein de l’espace Schengen, la Commission européenne a également proposé une modification du code frontières Schengen consistant à instaurer des vérifications systématiques obligatoires pour les citoyens de l’UE aux frontières extérieures terrestres, maritimes et aériennes. Selon le rapport 2016 des sénateurs Simon Sutour et Philippe Bonnecarrière, ces vérifications seront effectuées dans des bases de données comme le système d’information Schengen, la base de données d’Interpol sur les documents de voyage volés ou perdus et les systèmes nationaux pertinents, et permettront de s’assurer que les personnes qui arrivent ne représentent pas de menace pour l’ordre public ou la sécurité intérieure.

La Commission souhaite également que soient vérifiés les identifiants biométriques dans les passeports des citoyens de l’UE en cas de doute quant à l’authenticité du passeport ou à la légitimité de sa détention. Désormais, les vérifications seront également obligatoires à la sortie de l’Union européenne.

Vers un PNR européen en 2018

Les données des dossiers passagers (PNR) sont les informations fournies par les passagers et recueillies par les transporteurs aériens au cours des procédures de réservation et d’enregistrement.

Jusqu’à présent l’utilisation des données des dossiers passagers PNR n’était pas réglementée au niveau européen. Après un long bras de fer, le Parlement européen a adopté en avril 2016 une proposition qui vise à harmoniser les dispositions des États membres sur la collecte et le traitement des données PNR.

Les États membres disposent maintenant de deux ans pour transposer la directive en droit national. Selon le rapport des sénateurs Simon Sutour et Philippe Bonnecarrière, le texte reprend “trois conditions âprement négociées par le Gouvernement français” : une durée de conservation des données de cinq ans, avec une procédure simplifiée de consultation des données après leur masquage, qui intervient au bout de six mois (comme aux États-Unis), l’inclusion des vols intraeuropéens et des vols “charters” et l’inclusion dans le champ de la directive des infractions nationales, et pas seulement transnationales, comme certains l’avaient souhaité.

Certains États membres disposent déjà d’un système sur les données des dossiers passagers (PNR) (comme le Royaume-Uni) alors que d’autres ont adopté de nouvelles lois ou sont en train de tester des systèmes de données PNR.

Un nouveau commissaire européen chargé de la Sécurité

Crée en août 2016, le portefeuille de commissaire spécialement dédié à l’union de la sécurité a créé la surprise en étant attribué à un Britannique. Le Royaume-Uni appartenant toujours à l’Union européenne, il fallait trouver un remplaçant pour représenter le pays après la démission post-Brexit de Jonathan Hill, favorable au maintien du Royaume-Uni dans l’UE.

Le nouveau commissaire européen est assisté par une task-force qui doit mettre à profit l’expertise de l’ensemble de la Commission pour faire avancer les travaux et garantir l’application des mesures. La première réunion de cette task-force a eu lieu le 22 septembre 2016.

Par Alexandra Lesur

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