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  • Synthèse

Les services d’intérêt économique général (SIEG)

Les “services d’intérêt général”, ou SIG, correspondent à une conception européenne des services publics. Fondée sur la libre concurrence, l’Union européenne a par ailleurs dû encadrer les activités marchandes visant à satisfaire l’intérêt général et conçu le statut de service d’intérêt économique général (SIEG).

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Une définition propre à chaque Etat

Les services publics sont des activités dont l’objectif est de satisfaire un besoin d’intérêt général. Ils doivent pouvoir être mis en oeuvre de façon égalitaire et à un coût abordable (voire gratuitement) pour les habitants d’un territoire.

Ce sont souvent des prestations déficitaires. Ainsi, une région isolée et peu peuplée doit pouvoir être desservie par un réseau de transports, d’eau, d’électricité, de courrier et de télécommunications, même si l’exploitation de ce réseau n’est pas rentable. Le service est alors rendu soit par des collectivités publiques, soit par des entreprises publiques ou privées exerçant une mission d’intérêt général et bénéficiant dans ce cas d’un statut particulier (SIEG) et d’aides financières.

Si les textes européens mentionnent les services d’intérêt général, aucun ne définit précisément ce qu’ils sont. Car l’UE considère comme SIG les services que les Etats membres considèrent eux-mêmes comme d’intérêt général. Ce que confirme un livre blanc de 2004, qui les qualifie de “services marchands et non marchands que les autorités publiques considèrent comme étant d’intérêt général et soumettent à des obligations spécifiques de service public” . Le protocole 26 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), ajouté en 2009, confère quant à lui aux autorités nationales, régionales et locales un “large pouvoir discrétionnaire (…) pour fournir, faire exécuter et organiser les services d’intérêt économique général d’une manière qui réponde autant que possible aux besoins des utilisateurs” .

Que sont les services économiques d’intérêt général (SIEG) ?

Les services économiques d’intérêt général (SIEG) sont une sous-catégorie des services d’intérêt général (SIG).

Les SIEG, comme leur nom l’indique, comprennent uniquement les services économiques, c’est-à-dire correspondant à la vente de biens ou de services. Le livre blanc en donne quelques exemples : “les services fournis par les grandes entreprises de réseaux, comme les transports, les services postaux, l’énergie et la communication” . Ceux-ci restent, dans une certaine mesure, soumis aux lois du marché et de la concurrence (article 106 TFUE). Ils peuvent y déroger si cela est nécessaire à l’accomplissement de leur mission d’intérêt général. Et ont notamment le droit de recevoir une compensation financière “nécessaire et proportionnée” de la part de l’Etat. Dans le cas contraire, les aides non justifiées sont qualifiées “d’aides d’Etat” et sanctionnées par la Commission européenne.

Ce sont les Etats membres qui sont chargés de déterminer, chacun pour leur territoire, ce que sont leurs SIEG. Cependant, la Commission peut remettre en cause cette décision, en cas d’erreur manifeste.

Aujourd’hui, la conception européenne repose sur trois éléments principaux :

  • L’UE reconnait que l’accomplissement d’une mission de service public peut prévaloir sur les règles de la concurrence (à condition que les avantages fournis par l’Etat à l’entreprise qui exerce le SIEG compensent strictement les coûts engendrés par la mission de service public.) ;
  • Le droit européen oblige chaque Etat à mobiliser suffisamment de moyens pour que les missions des SIEG soient accomplies ;
  • L’UE ne se prononce pas sur les choix des services publics, qui sont laissés à l’Etat, ou encore sur la manière de les organiser.
Les services d’intérêt général non économiques sont identifiés pour la première fois dans le droit européen par la directive “services”. Fondés sur une logique de solidarité et de redistribution, ce sont les services que la directive exclut de son champ d’application et qui échappent ainsi aux règles de la concurrence : police, justice, sécurité sociale…

L’émergence des services publics dans le droit européen

On fait rapidement mention des services publics dans le traité de Rome, et plus résolument dans celui d’Amsterdam. La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne en dessine les contours petit à petit. La Commission européenne se charge ensuite de préciser la notion, mais sans pour autant proposer de cadre européen. A la demande de certains Etats membres, comme la Belgique, les Pays-Bas et la France, le traité de Lisbonne y consacre finalement un protocole entier.

Les avancées jurisprudentielles

La jurisprudence de la Cour de justice va contribuer à baliser la conception européenne du service public, et en particulier les situations dans lesquelles le droit de la concurrence cesse de s’appliquer. Trois arrêts font date :

  • Arrêt Corbeau (1993) : la Cour valide la possibilité pour un Etat de fournir à une entreprise des compensations financières pour qu’elle puisse assurer un service public.
  • Arrêt Commune d’Almelo (1994) : la Cour autorise des restrictions à la concurrence tant qu’elles sont nécessaires à l’accomplissement d’un service public.
  • Arrêt Altmark (2003) : la Cour précise les conditions selon lesquelles une aide à un service public n’est pas considérée comme une aide d’Etat, et est donc autorisée.
Selon l’arrêt Altmark, les compensations apportées par un Etat à une entreprise pour sa mission de service public sont compatibles avec le droit européen si et seulement si : 
1.
L’entreprise bénéficiaire a été clairement chargée de l’exécution d’obligations de service public qui sont elles-mêmes clairement définies. 
2.
Cette compensation est calculée sur des paramètres objectifs et transparents. 
3.
Cette compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés par l’accomplissement des obligations de service public, en incluant un “bénéfice raisonnable” . 
4.
S’il n’y a pas eu de marché public, le niveau de la compensation doit être calculé sur la base d’une analyse des coûts en prenant comme référence une “entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée” .

Les services publics dans le traité de Lisbonne

Contrairement à ses prédécesseurs, le traité de Lisbonne instaure une réelle base juridique pour les SIEG. Le traité les mentionne dans l’article 14 TFUE, et leur consacre un protocole (texte adossé au traité et qui a la même valeur juridique) : le n°26. Si ce dernier texte reste court, il montre toutefois que les SIEG ne sont plus seulement l’expression de valeurs communes, mais bien une catégorie juridique à part entière.

La conception européenne qu’il établit est fondée sur le principe de subsidiarité : les Etats sont libres de définir, d’organiser et de financer les services qu’ils souhaitent qualifier de SIEG, et ce sont les échelons locaux qui ont pour mission de les mettre en place pour répondre aux besoins des citoyens. L’UE n’interfère donc pas dans l’organisation des services publics. Ainsi, les services publics admettent des disparités géographiques, sociales et culturelles.

Le droit européen pose néanmoins la nécessité de garantir un niveau élevé de qualité, une sécurité et une accessibilité, une égalité de traitement et un accès universel pour les services publics.

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1 commentaire

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    mariem

    Les “services d’intérêt général” (SIG) sont une conception européenne des services publics, visant à répondre aux besoins d’intérêt général des citoyens. Ces services peuvent être fournis par des collectivités publiques ou des entreprises publiques ou privées, bénéficiant d’un statut particulier de service d’intérêt économique général (SIEG) et d’aides financières pour couvrir les déficits. Bien que l’Union européenne (UE) reconnaisse la nécessité d’accomplir une mission de service public, elle encourage la concurrence pour garantir une qualité et un coût abordable de ces services. Les États membres ont ainsi la liberté de déterminer quels sont leurs services économiques d’intérêt général (SIEG) geotoposervice.com et de les soumettre à des obligations spécifiques de service public, mais la Commission européenne peut remettre en cause leur décision en cas d’erreur manifeste. Les services publics non économiques sont exclus de l’application des règles de la concurrence. Bien que la notion de services publics ait été rapidement mentionnée dans le traité de Rome et plus explicitement dans celui d’Amsterdam, c’est avec le traité de Lisbonne qu’un protocole entier est consacré à cette question.