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Santé : les grands combats de l’Union européenne

Cancer, épidémies, tabac, alimentation, santé mentale, maladies chroniques… si chaque pays garde la main sur sa politique sanitaire, l’Union européenne soutient l’effort de recherche et de prévention sanitaire des Etats. Un appui renforcé depuis la crise du Covid-19, qui amène l’UE à encourager la coopération, notamment dans les régions frontalières.

Médicaments et alimentation saine

En matière de santé publique, si l’UE dispose d’une simple compétence d’appui, c’est-à-dire qu’elle complète l’action des Etats membres, son investissement s’est accru ces dernières années. Et tout particulièrement depuis l’apparition de la pandémie de Covid-19 qui a frappé de plein fouet le continent. La meilleure illustration en étant l’augmentation substantielle du budget alloué au programme de santé européen : de 449,4 millions d’euros sur l’exercice 2014-2020, il est passé à 5,1 milliards d’euros avec EU4Health pour la période 2021-2027, dont 835 millions pour l’année 2022.

La lutte contre les épidémies et les grandes maladies

Dans ce cadre, l’Union européenne participe donc notamment à la lutte contre les épidémies et les grandes maladies. Un réseau de surveillance et de contrôle des maladies transmissibles a été instauré dès 2011. Tirant les enseignements de crises récentes, comme celles de la grippe A H1N1 en 2009 (face à l’ampleur de l’épidémie, une certaine concurrence s’était instaurée entre les Etats membres pour se procurer des vaccins disponibles en quantité limitée), ou de l’épidémie Ebola de 2014-2015 (le virus continue de sévir en Afrique aujourd’hui), l’UE a décidé de renforcer son arsenal. Ce dernier a néanmoins montré ses limites avec l’irruption de la pandémie de Covid-19 sur le continent. Face à l’ampleur de la crise, les Etats membres ont parfois peiné à coopérer, comme en témoigne l’épisode survenu en mars 2020. Les douanes tchèques avaient alors intercepté une cargaison de 680 000 masques et respirateurs envoyés par la Chine à l’Italie, alors en grande difficulté face à l’épidémie. Soupçonnant des entreprises de vouloir spéculer sur la valeur du chargement, Prague l’avait saisi, provoquant la colère de Rome.

Pour faire face à la crise et aider les Etats membres, la Commission européenne a donc pris des mesures économiques pour relancer l’activité (assouplissement des normes budgétaires, plan de relance, nouveau budget pluriannuel) mais aussi sanitaires. En la matière, elle œuvre pour plus d’harmonisation (création d’une plateforme collectant les données des applications de traçage, carte épidémique européenne actualisée par le Centre européen de contrôle des maladies, tests et vaccins reconnus au niveau européen) mais aussi pour plus de souveraineté en taxant les exportations et facilitant les importations de matériel médical pour favoriser leur circulation au sein du marché intérieur.

En 2016, un accord concernant l’achat groupé de vaccins a notamment été entériné par les Etats membres. L’Union européenne a poursuivi son action en ce sens au cours de la crise du coronavirus, s’engageant financièrement dans des opérations de pré-achat auprès des laboratoires privés à la recherche d’un vaccin. L’Agence européenne des médicaments (EMA) joue un rôle particulièrement important puisque c’est elle qui examine les résultats des essais cliniques présentés par les laboratoires. Son avis n’est néanmoins pas contraignant, les Etats membres étant libres d’autoriser ou non la mise sur le marché d’un vaccin, indépendamment du verdict de l’EMA.

Avec l’apparition du coronavirus, l’Europe fait face à un autre défi de taille en matière de santé : préserver sa souveraineté sanitaire. La pandémie a en effet souligné la forte dépendance des Etats membres aux industries chinoise et indienne, qui produisent 80 % des matières premières nécessaires à la confection de médicaments. C’est la raison pour laquelle la Commission européenne, avec son programme EU4Health, a adopté la création de l’Autorité européenne de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA) le 16 septembre 2021. Elle est basé sur le modèle de l’agence biomédicale américaine, la Barda. C’est aussi en ce sens qu’elle a négocié avec les laboratoires pour qu’une partie au moins des vaccins consommés par les Européens soient produits sur le territoire de l’Union.

L’UE a également lancé un corps médical destiné à réagir plus rapidement aux situations d’urgence, en Europe ou ailleurs, et a mobilisé le mécanisme de protection civile ou encore RescEU pour fournir des moyens humains et matériels aux Etats membres en difficulté face à l’épidémie.

Dans le cadre de ses actions de soutien aux pays tiers, la Commission européenne a aussi, en mars 2016, débloqué 10 millions d’euros pour soutenir la recherche sur le virus Zika, qui touchait alors une grande partie de l’Amérique latine.

De façon plus pérenne, l’Union européenne apporte un large soutien au Fonds mondial de lutte contre le sida et à d’autres organismes qui tentent d’endiguer la propagation du VIH (prévention, dépistage, information…). Elle est également la première donatrice mondiale du mécanisme COVAX mis en place par l’OMS et destiné à garantir l’accès à bas coût au vaccin contre le Covid-19 aux pays en développement. D’ici à la mi-2022, l’Union prévoit de donner près 700 millions de doses de vaccin contre le Covid.

S’agissant des maladies non transmissibles, l’Union multiplie par ailleurs les actions contre le cancer, deuxième cause de mortalité sur le continent. Un “partenariat européen pour la lutte contre le cancer” (EPAAC) a notamment été mis sur pied en 2009. Dans sa lignée, l’action conjointe CanCon, lancée en 2014, a permis de délivrer un ensemble de recommandations aux États membres. L’objectif entre 2014 et 2020 était de réduire de 15 % du nombre des cancers. Cependant, en 2020, près de 1,3 millions d’européens sont morts du cancer, soit un chiffre comparable à celui de 2013 ou en 2017.

Depuis 1987, un “Code européen contre le cancer” est ainsi régulièrement actualisé, afin d’informer simplement les citoyens sur les habitudes de vie à adopter pour réduire les risques de développer cette maladie. Des campagnes de dépistage, études scientifiques et programmes technologiques (sur le tri des cellules sanguines ou encore le cancer du sein par exemple) sont également soutenus par l’Union européenne, qui a consacré 691 millions d’euros à la lutte contre le cancer sur la période 2014-2020. La Commission européenne a dévoilé plan européen de lutte contre le cancer en février 2020, suivi d’un plan européen pour vaincre le cancer présenté le 3 février 2021. Au total, 4 milliards d’euros seront alloués aux actions de lutte contre le cancer entre 2021 et 2025 pour renforcer la prévention et la détection précoce et améliorer le diagnostic, les traitements et la qualité de vie des patients.

Enfin, “les maladies chroniques constituent un problème majeur et qui ne cesse de croître, indiquait en 2016 le commissaire européen à la Santé. “Elles sont de loin la principale cause de mortalité : elles représentent environ 86 % de la totalité des décès dans l’UE. Deux millions de personnes meurent chaque année de maladies cardiovasculaires, et on estime que 8 % de la population souffre du diabète, une maladie qui peut parfois être évitée” . Au-delà d’un appel de la Commission européenne, lancé en novembre 2017 aux Etats membres afin qu’ils investissent plus dans la prévention, l’UE tente donc d’agir elle-même contre les principaux facteurs de risque : tabagisme, abus d’alcool, mauvaise alimentation et manque d’exercice.

Alcool, tabac, alimentation… : la promotion de la santé

Alcool. Dans l’Union européenne, l’abus d’alcool est à l’origine de 7 % des maladies et décès prématurés. Cela correspond environ à 2 500 morts par jour. Pour favoriser la coopération entre les Etats membres et échanger les bonnes pratiques, l’UE a mis en place des comités et des forums qui réunissent régulièrement les différents acteurs de la lutte contre l’alcoolisme. Pour limiter les dommages causés par l’alcool, elle avait également adopté des stratégies jusqu’en 2013, puis une action conjointe pour la période 2014-2016. En 2011, à la suite d’une consultation avec les Etats membres, le comité régional de l’Europe à l’OMS avait également publié un “Plan d’action européen visant à réduire l’usage nocif de l’alcool” sur la période 2012-2020. Le plan d’action antidrogue pour la période 2021-2025 comprend également des mesures pour freiner la consommation d’alcool.

Tabac. Le tabagisme constitue la première cause de mortalité évitable dans l’Union européenne : il y tue 700 000 personnes chaque année. Les mesures prises au fil des années pour réduire la part de fumeurs - comme l’augmentation du prix du paquet dans certains pays - semblent avoir eu un impact puisque celle-ci est passée de 40 % dans l’UE en 2002 (15 Etats) à 26 % dans l’UE d’aujourd’hui.

De son côté, la Commission européenne a lancé plusieurs campagnes à destination des jeunes comme “HELP - Pour une vie sans tabac” (2005) ou “Les ex-fumeurs, rien ne les arrête” (2011). Depuis 2016, une directive européenne qui encadre la fabrication, la présentation et la vente du tabac et de ses produits dérivés est aussi devenue applicable dans tous les Etats membres. Elle a notamment permis à la France d’introduire le “paquet neutre” .

Drogues. L’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) estime à 5 141 le nombre de décès par overdose de drogues en 2019 dans l’UE. Cela représente une hausse de 3 % par rapport à 2018. L’article 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) prévoit que “l’Union complète l’action menée par les Etats membres en vue de réduire les effets nocifs de la drogue sur la santé, y compris par l’information et la prévention”. Le traité de Lisbonne a ajouté que l’Union européenne, en matière de lutte contre les drogues, intervient aussi dans les domaines de la coopération judiciaire avec les Etats membres (art. 83 TFUE) et de la prévention du crime (art. 84 TFUE). La stratégie antidrogue de l’UE (2013-2020), qui avait pour objectif de contribuer à réduire la demande et l’offre ainsi que les risques sanitaires et sociaux, reposait ainsi, en partie, sur la coopération judiciaire. La Commission européenne a publié une communication sur sa prolongation pour la période 2021-2025.

Alimentation et activité physique. En 2007, la Commission a adopté une stratégie sur les problèmes de santé liés à la nutrition, la surcharge pondérale et l’obésité, ce dernier sujet devenant un enjeu majeur au niveau du continent, où 52,7 % de la population souffrait de surpoids en 2019, d’après Eurostat. Une évolution positive par rapport aux 58 % en 2016, même si ce chiffre reste élevé. Ce livre blanc vise à contribuer à réduire les risques dus aux mauvaises habitudes alimentaires et au manque d’activité physique dans l’Union européenne, où l’augmentation du surpoids devient inquiétante. La Commission européenne préconise une approche intégrée, associant les parties prenantes au niveau local, régional, national et européen. Des initiatives associées portent ainsi sur l’étiquetage des produits alimentaires (tableaux nutritionnels et caloriques, origine des produits, etc.), la promotion du sport ou encore la distribution de fruits et légumes dans les écoles…

Santé mentale. Les problèmes de santé mentale (le plus souvent l’anxiété et la dépression) comptent désormais parmi les principaux motifs de demande de congé maladie, de retraite anticipée ou de pension d’invalidité. Dans certains pays, comme le Danemark et les Pays-Bas, jusqu’à 50 % des congés de maladie de longue durée et des prestations d’invalidité sont imputables aux troubles mentaux. En 2005, l’UE a donc souhaité ouvrir le débat en adoptant un “Livre vert - Améliorer la santé mentale de la population - Vers une stratégie sur la santé mentale pour l’Union européenne”. Une conférence européenne sur la santé mentale a ensuite été organisée en juin 2008, et débouché sur le Pacte européen pour la santé mentale et le bien-être, appelant à l’action notamment contre le suicide, mais aussi l’exclusion et la stigmatisation à l’école ou sur le lieu de travail par exemple. Un plan d’action européen sur la santé mentale a également été lancé entre 2013 et 2020. La pandémie de Covid-19 a aggravé la situation. L’isolement forcé par les confinements et les mesures de restrictions ont pesé sur la santé mentale des Européens. De manière générale, la Commission a mis en place un portail répertoriant les bonnes pratiques en matière de gestion des maladies mentales. De plus, une proposition d’action conjointe (ImpleMENTAL) concernant la réforme du système de santé mentale et des exemples de prévention du suicide est mise en œuvre en 2021. Un programme de lutte contre la dépression doit aussi être mis en place dans le cadre de l’Alliance européenne contre la dépression.

Les politiques de santé transfrontalières

Alors qu’elle est chargée d’encourager la coopération entre les Etats membres, l’UE dirige une partie de ses efforts vers les régions frontalières. Une directive européenne relative aux droits des patients en matière de soins transfrontaliers est ainsi entrée en vigueur en 2011. Elle fixe notamment les conditions selon lesquelles un patient peut se rendre dans un autre pays de l’UE pour s’y faire soigner.

Les Etats eux-mêmes prennent de plus en plus en compte la dimension transfrontalière des soins dans l’UE. Le premier hôpital transfrontalier européen de Cerdagne, situé dans les Pyrénées espagnoles, a ainsi ouvert ses portes en septembre 2014 pour soulager des milliers de Français des Pyrénées Orientales qui devaient jusque-là rouler jusqu’à 100 km pour se faire soigner. La facture de 31 millions d’euros a été réglée à 60 % par le Fonds européen de développement économique et régional (FEDER).

Le traité de Lisbonne a aussi conféré à l’Union européenne, toujours en complément des politiques nationales (article 168 TFUE), des compétences sur la “surveillance des menaces transfrontières graves sur la santé”.

Les considérations sanitaires dans les autres politiques

L’Union européenne doit, plus généralement, assurer “un niveau élevé de protection de la santé humaine” dans “la définition et la mise en œuvre” de toutes les politiques communautaires, peut-on lire à l’article 168 du TFUE.

La protection de la santé des Européens doit donc aussi être l’une des exigences qui guide la règlementation des médicaments, ou les dispositions sur la protection des consommateurs au sein du marché unique, par exemple. Ainsi les obligations en matière d’étiquetage des produits alimentaires, d’utilisation des produits phytosanitaires ou de déclaration des substances chimiques peuvent, elles aussi, être considérées comme des leviers d’action de l’UE en matière de santé.

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1 commentaire

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    Miro

    j entends que l on pourra acheter plus de tabac à l ‘étranger ce que je trouve hallucinant, plus de trafic et plus de morts par le tabac.
    Il faudrait mettre un terme au prix du tabac bradé , comme au luxembourg , pays assez riche pour se passer de ce revenu.
    merci de votre réponse.