Toute L'Europe – Comprendre l'Europe
  • Synthèse

Les bouleversements de 1989 en Pologne et en Hongrie

Avant que le mur de Berlin ne tombe dans la nuit du 9 au 10 novembre, les régimes communistes s’étaient déjà effondrés dans ces deux pays du bloc de l’Est.

Les bouleversements de 1989 en Pologne et en Hongrie
30 ans après son exécution pour avoir tenté d’instaurer une démocratie parlementaire, l’ancien chef du gouvernement Imre Nagy reçoit des funérailles nationales le 16 juin 1989. Crédits : Wikimedia Commons / Fortepan adományozó TM / CC BY-SA 3.0

Peu d’observateurs avaient senti le vent tourner. Peu auraient pu prédire, en cette nuit du 9 novembre 1989, que les postes frontières de Berlin s’ouvriraient un à un sous la pression de la foule. Cette année-là pourtant, dans le sillage de la perestroïka impulsée par Mikhaïl Gorbatchev en URSS, d’importants changements avaient eu lieu en Europe de l’Est. Et notamment en Pologne et en Hongrie.

Pologne : la vague Solidarność

En 1989, la République populaire de Pologne est, après l’URSS en février, le premier pays du bloc de l’Est à instaurer des élections partiellement libres.

Au début de l’année, le pays est dirigé par le général communiste Wojciech Jaruzelski. Il sort d’une année marquée par d’importants mouvements étudiants puis ouvriers, qui ont protesté contre la crise économique et sociale. Impuissant à la résoudre, Jaruzelski demande à Lech Wałęsa, leader du syndicat indépendant Solidarność (Solidarité) pourtant interdit depuis 1981, d’apaiser la contestation.

En février 1989, les négociations de la “table ronde” réunissent représentants du pouvoir et du syndicat. Deux mois plus tard, ils aboutissent à un accord : celui-ci prévoit l’organisation d’élections législatives partiellement libres (65% des sièges de la Sejm, la chambre basse du parlement, étant toujours réservés à la coalition gouvernementale composée du parti communistes et d’autres partis satellites, le reste revenant à l’opposition et aux candidats indépendants), ainsi que la création d’un Sénat sans réel pouvoir, et d’un poste de président de la République toutefois réservé à Jaruzelski.

Le 4 juin, Solidarność remporte le premier tour des législatives haut la main : il obtient 160 des 161 sièges ouverts de la Sejm et 92 des 100 sièges du Sénat. A l’inverse, seuls 5 candidats gouvernementaux dépassent alors les 50% de voix nécessaires pour remporter directement leur siège à la Sejm, les 264 autres devant attendre le second tour. Ces résultats totalement imprévus créent alors un profond choc psychologique dans la société polonaise, le pouvoir en sortant délégitimé.

Approuvé par les parlementaires à la présidence de la République (avec une seule voix de majorité, les autres bulletins étant blancs ou nuls), Jaruzelski accepte de nommer un membre de Solidarność, Tadeusz Mazowiecki, au poste de Premier ministre. Celui-ci est investi le 24 août à une écrasante majorité, et devient ainsi le premier dirigeant non communiste d’un pays membre du bloc de l’Est. L’URSS laisse faire, confirmant alors que la “doctrine Brejnev” (prônant l’intervention soviétique dans les États satellites) a bien pris fin, comme l’avait laissé entendre le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev dès son arrivée au pouvoir en 1985.

En décembre, la Constitution polonaise est réformée : toute référence au rôle dirigeant du parti communiste y est éliminée tandis que le pays prend officiellement le nom de “République de Pologne” . Le Parlement approuve également un plan de réformes inaugurant une transition accélérée vers l’économie de marché. Un an après, en 1990, Lech Wałęsa sera élu président de la République au suffrage universel.

Hongrie : une première brèche dans le Rideau de fer

Peu de temps après la Pologne, la Hongrie adopte à son tour le pluralisme politique. Elle est aussi, avant que le mur de Berlin ne tombe, le premier pays à ouvrir sa frontière à l’Ouest.

Le pays est, depuis les années 1970, considéré comme un îlot de relatives prospérité et liberté au sein du bloc de l’Est. La fin des années 1980, marquée par l’inflation, la baisse du pouvoir d’achat et l’apparition du chômage, voit se multiplier les contestations sociales.

En novembre 1988, un jeune cadre réformateur, Miklós Németh, prend la direction du pays. Sous son impulsion, le Parti communiste hongrois accepte, en février 1989, le principe d’une “transition graduelle” vers le multipartisme (à condition que les nouveaux partis acceptent le socialisme).

En juin 1989, les protagonistes de l’insurrection de Budapest de 1956, alors écrasés par l’URSS, sont réhabilités. Parmi eux, l’ancien chef du gouvernement Imre Nagy, exécuté après avoir tenté d’instaurer une démocratie parlementaire, reçoit des funérailles nationales.

En octobre, le PC hongrois devient le premier du bloc de l’Est à s’auto-dissoudre. Les réformateurs créent le Parti socialiste hongrois, acquis au pluralisme, à la démocratie représentative et à l’économie de marché. Puis le parlement réforme la constitution pour instaurer la séparation des pouvoirs, les droits de l’homme et les droits civiques. Le 23 octobre, jour du 33e anniversaire de la révolte de 1956, la quatrième “République de Hongrie” est officiellement proclamée.

Entretemps, la Hongrie a aussi été le premier pays à ouvrir une brèche dans le Rideau de fer. Afin d’échapper à une coûteuse rénovation de la frontière, alors en très mauvais état, le gouvernement décide en février de démanteler les installations de la frontière austro-hongroise. Après l’assurance reçue à Moscou en mars par Miklós Németh de la part du dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev qu’il “n’y aura[it] pas de nouveau 1956”, les barbelés sont coupés au printemps. La frontière est ensuite officiellement ouverte le 10 septembre.

Déjà conséquent depuis l’été, l’exode des Allemands de l’Est, qui transitent par la Hongrie et l’Autriche afin de rejoindre la RFA, devient massif. Celui-ci fragilise davantage encore le régime est-allemand, confronté en octobre à d’importantes manifestations qui participeront elles-mêmes à la chute du mur de Berlin le 9 novembre.

Après la chute du Mur, les autres démocraties populaires d’Europe de l’Est tombent tour à tour : République tchèque (révolution de Velours), RDA et Roumanie en décembre 1989, Bulgarie en février 1990.

Déjà autonomes vis-à-vis de l’URSS depuis les années 1960, l’Albanie et la Yougoslavie changent de régime en 1990. Cette dernière se disloquera progressivement lors des guerres de 1991 à 2001.

Les trois Etats baltes (Lituanie, Lettonie, Estonie) deviennent indépendants en septembre 1991, trois mois avant la dissolution de l’Union soviétique dont ils étaient jusque-là membres.

Votre avis compte : avez-vous trouvé ce que vous cherchiez dans cet article ?

Pour approfondir

À la une sur Touteleurope.eu

Flèche

Participez au débat et laissez un commentaire

Commentaires sur Les bouleversements de 1989 en Pologne et en Hongrie

Lire la charte de modération

Commenter l’article

Votre commentaire est vide

Votre nom est invalide