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[Le Récap’ des européennes] Dernière ligne droite de la campagne

Cette semaine dans la campagne : J-2 avant le vote en France métropolitaine (et même J-1 pour certaines régions d’Outre-mer), où les candidats tentent encore de convaincre indécis et abstentionnistes. Ailleurs en Europe, le scrutin a déjà commencé pour cette élection qui aura un impact déterminant sur les équilibres politiques européens.

Manon Aubry (LFI), Nathalie Loiseau (LaREM) et François-Xavier Bellamy (LR) sur le plateau de LCI lundi - crédits : LCI (copie d'écran)
Manon Aubry (LFI), Nathalie Loiseau (LaREM) et François-Xavier Bellamy (LR) sur le plateau de LCI lundi - crédits : LCI (copie d’écran)
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En France, on tire à vue

A moins d’une semaine des élections, les débats entre candidats se sont quelque peu envenimés. Lundi 20 mai, 14 têtes de liste n’ont pas raté la moindre occasion de se lancer des piques lors de l’émission télévisée “La Grande Confrontation : Faites votre choix” , organisée par LCI en partenariat avec RTL et Le Figaro. En première partie d’émission, à 18h, ce sont Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière), François Asselineau (Union populaire républicaine), Ian Brossat (Parti communiste), Benoît Hamon (Génération.s), Jean-Christophe Lagarde (UDI), Francis Lalanne (Alliance jaune) et Florian Philippot (Les Patriotes) qui se sont affrontés.

Puis ce fut au tour de Manon Aubry (LFI), Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), Jordan Bardella (Rassemblement national), François-Xavier Bellamy (Les Républicains), Raphaël Glucksmann (Place publique-Parti socialiste-Nouvelle donne), Yannick Jadot (Europe Ecologie-Les Verts) et Nathalie Loiseau (La République en marche-MoDem-Agir) de faire valoir leurs idées… mais surtout d’essuyer les tirs de leurs voisins. Vote des traités de libre-échange par les eurodéputés LR, incapacité de La République en marche à atteindre l’objectif européen de 20 % d’énergies renouvelables en France, absentéisme des eurodéputés RN, projets d’alliance LaREM-Parti socialiste au Parlement… ou encore initiative de “contrôle des naissances en Afrique” pour Nicolas Dupont-Aignan… chacun en a pris pour son grade, au point de rendre beaucoup de propositions peu audibles.

Deux jours plus tard, c’est sur France 2 que la confrontation a eu lieu. En première partie : six têtes de listes et chefs de partis les plus susceptibles d’obtenir des sièges dans le futur Parlement européen. Puis neuf des formations créditées de moins de 5 % des voix les ont remplacés. Criant au “scandale démocratique” car relégués en deuxième partie d’émission par la chaîne, Benoît Hamon (Génération.s), Jean-Christophe Lagarde (UDI) et Nicolas Dupont-Aignan (DLF) ont menacé de boycotter l’événement et préféré débattre juste avant sur le site de Yahoo. Si Nicolas Dupont-Aignan et Jean-Christophe Lagarde étaient au final bien présents sur France 2, c’est finalement le troisième de la liste Guillaume Balas qui a représenté Génération.s. Au menu des discussions : environnement et climat, pouvoir d’achat, place de la France en Europe et dans le monde, et immigration.

Jeudi matin, 14 têtes de liste ont ensuite répondu aux questions des journalistes et du public à l’occasion de la rencontre “Quelle Europe choisissez-vous ?” , organisée par Franceinfo. Enfin, dans le cadre d’une soirée spéciale, les journalistes Apolline de Malherbe et Ruth Elkrief ont reçu jeudi 11 têtes de liste sur le plateau de BFMTV pour une ultime confrontation.

Ultimes manœuvres

Au coude à coude avec le Rassemblement national (RN) dans les sondages (environ 23 % des intentions de vote), le parti présidentiel fait plus que jamais du parti de Marine Le Pen son principal rival dans cette course européenne. Dans un entretien à la presse quotidienne régionale, publié mardi 21 mai et refusé par deux médias, le chef de l’Etat assume pleinement de s’ériger en “acteur” de cette campagne, considérant que l’Union européenne est face à un “risque existentiel” . Le Premier ministre vient également à la rescousse, enchaînant les meetings pour tenter de convaincre les électeurs. “On va gagner” , s’est exclamée Nathalie Loiseau devant les députés LaREM de l’Assemblée nationale, espérant se hisser devant le RN le 26 mai. De leur côté, les Verts semblent “pris en étau entre Mélenchon et Macron” et tentent de tirer leur épingle du jeu à gauche, où l’environnement est au cœur des préoccupations. Tandis que LFI s’inquiète de voir des soutiens historiques rallier la liste du PCF.

Au total, six listes semblent aujourd’hui en mesure de dépasser la barre des 5 % et d’obtenir des sièges dans le futur hémicycle : le RN, LaREM, LR, LFI, EELV et PS-PP-ND.

Ailleurs en Europe, le scrutin a commencé

Si le scrutin français se déroule dimanche, certains Européens ont déjà commencé à voter. En effet, les Britanniques et les Néerlandais se sont rendus aux urnes jeudi 23 mai afin de choisir leurs eurodéputés. Contrairement au Royaume-Uni qui ne communiquera ses estimations que dimanche, les Pays-Bas ont déjà diffusé leurs résultats de sondages à la sortie des urnes. Contre toute attente, les travaillistes menés par Frans Timmermans, par ailleurs candidat à la présidence de la Commission européenne, emporteraient la mise avec 18% des voix. Suivent les libéraux du Premier ministre Mark Rutte (15%) et les conservateurs de l’Appel chrétien démocrate (12%). Les populistes eurosceptiques de Thierry Baudet, pourtant annoncés vainqueurs par les sondages préélectoraux, ne seraient que quatrièmes avec 11% des voix.

Aujourd’hui vendredi 24 mai, ce sont les Irlandais qui votent, ainsi que les Tchèques (jusqu’à demain). Ces derniers seront rejoints samedi 25 par les Lettons, des Slovaques, les Maltais et les habitants de certains territoires français d’Outre-Mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Guadeloupe, Guyane, Martinique et Polynésie française). Enfin, les 22 autres Etats membres qui n’auront pas encore participé au scrutin le feront le dimanche 26 mai. Le vote sera définitivement clôturé ce même jour à 23 heures, heure de fermeture de bureaux de vote en Italie.

Des estimations des résultats pays par pays, basées sur des sondages à la sortie des bureaux de vote, seront disponibles pour certains Etats membres à la fin de leurs scrutins respectifs. Mais il faudra attendre le 26 mai à 23 heures pour connaître les résultats officiels, même pour les pays ayant voté dès le 23 mai.

Huit Etats membres vont connaître par ailleurs des “super-scrutins” : un ou plusieurs autres votes se tiendront le même jour que l’élection de leurs députés européens. Législatives en Belgique, municipales en Allemagne ou encore référendum sur la réforme de la justice en Roumanie sont ainsi au programme en Europe.

Qu’attendre de ces élections européennes ? D’abord, une très forte abstention. En France, le taux de participation a systématiquement diminué depuis les premières élections du Parlement européen au suffrage universel en 1979 (où il atteignait 60,71 % contre 42,43 % en 2014). Cette année, seuls 45 % des électeurs français comptent se rendre aux urnes selon un sondage de l’IFOP daté du 22 mai. Et à l’Est, la participation est traditionnellement souvent bien plus faible encore. Ainsi, en Slovaquie, le taux de participation en 2014 s’élevait à… 13,05 %, le plus faible de l’UE.

Comment expliquer des niveaux de participation aussi faible ? Les analyses des spécialistes pointent la complexité des institutions européennes, perçues qui plus est comme lointaines par de nombreux citoyens. Sans compter une quasi-absence des actualités européennes dans les médias hors période électorale et un investissement relativement plus faible des partis politiques dans les débats européens. Reste à attendre dimanche soir pour vérifier les prévisions des sondeurs en termes de participation.

Si la participation s’annonce limitée, il n’en demeure pas moins que les équilibres politiques au Parlement européen devraient être considérablement modifiés. Les médias européens ont abondamment traité de la question de la montée des populismes eurosceptiques et nationalistes à l’approche du scrutin. Mais ces derniers sont loin d’être prédits gagnants par les sondeurs, d’autant plus qu’ils peinent à s’allier. Selon l’agrégat de sondages nationaux réalisé par Poll of Polls le 24 mai, la droite conservatrice européenne (PPE) l’emporterait avec 169 sièges, suivie des sociaux-démocrates (S&D), avec 150 eurodéputés.

Hémicycle du Parlement européen à Bruxelles - Crédits : Crédits : Treehill / Wikimedia CommonsHémicycle du Parlement européen à Bruxelles - Crédits : Crédits : Treehill / Wikimedia Commons

Cependant, alors que les coalitions entre les deux groupes étaient monnaie courante pendant les précédentes mandatures, un tel schéma ne suffira plus : PPE et S&D ne représenteront plus, à eux deux, la majorité absolue des députés si ces prévisions venaient à se réaliser. Les deux groupes devront alors trouver un troisième auquel s’allier. Celui qui arrivera en troisième position sera donc doté d’un considérable pourvoir d’influence sur la prochaine coalition.

Ce poids dans l’hémicycle européen pourrait revenir aux libéraux de l’Alliance des démocrates et libéraux européens (ADLE), lesquels pourraient occuper 105 sièges dans le futur Parlement européen, notamment s’ils accueillent une vingtaine de nouveaux députés LaREM. Conscients de la nouvelle configuration à venir de l’hémicycle européen, certains au Parti socialiste européen (PSE qui appartient au groupe S&D) prévoient d’éventuelles alliances avec l’ADLE après le vote du 26. A l’instar des membres du Parti démocrate italien, dont est issu l’ancien président du Conseil des ministres Matteo Renzi. Ou encore du Premier ministre socialiste portugais Antonio Costa, pourtant associé à la gauche radicale au niveau national, qui a récemment apporté son soutien à Emmanuel Macron.

Mais les partis eurosceptiques et nationalistes, dont plusieurs (Ligue italienne et RN notamment) ont tenu un grand meeting de campagne à Milan le 18 mai, pourraient ravir cette troisième place aux libéraux. Et ainsi constituer une forte minorité de blocage qui risquerait de freiner le fonctionnement du Parlement européen. Et ce malgré les déboires qu’ils connaissent en Autriche. Le vice-chancelier d’extrême droite Heinz-Christian Strache (FPÖ) (allié du RN au sein du groupe ENL au Parlement européen) s’est ainsi vu contraint de démissionner après que des soupçons de collusion avec la Russie ont été révélés, rompant ainsi la coalition avec les conservateurs au gouvernement.

Les partis eurosceptiques et nationalistes sont aujourd’hui divisés en trois groupes parlementaires : l’Europe des nations et des libertés (ENL, au sein duquel siègent notamment la Ligue italienne et le RN), l’Europe de la liberté et de la démocratie directe (ELDD, où l’on trouve, par exemple, l’europhobe britannique Nigel Farage, chef du Brexit Party, et le Mouvement 5 étoiles italien) et le groupe conservateurs et réformistes européens (CRE, qui comprend notamment le parti Droit et Justice (PiS) de Pologne). D’après les prévisions actuelles, c’est l’ENL qui obtiendrait le plus d’eurodéputés, avec 73 sièges.

Quoi qu’il en soit et malgré leur proximité sur la question de l’immigration, ces trois groupes auront bien du mal à s’allier au sein du Parlement européen. Hors de question, en effet, pour le PiS polonais de se lier pour l’heure avec Marine Le Pen et Matteo Salvini, qu’il estime bien trop proches de la Russie. Il en va de même pour Nigel Farage, qui voit dans le RN un parti dont “l’ADN” est lié à l’antisémitisme. Quant au Premier ministre hongrois Viktor Orban, figure du nationalisme en Europe et chantre de l’ “illibéralisme” , il appartient toujours, même si son parti en est suspendu, au PPE. L’ancien conseiller de Donald Trump Steve Bannon mène toutefois un intense lobbying pour tenter de rassembler ces partis populistes et “anti-migrants” .

A l’équation politique du futur Parlement européen, il faut aussi ajouter la présence, selon l’agrégateur de sondages nationaux Poll of Polls, de 44 députés qui seront potentiellement non-inscrits ou appartiennent à des nouveaux partis dont l’affiliation politique est encore incertaine.

Le suspense quant à l’impact qu’auront ces élections européennes sur l’avenir politique de l’Union européenne reste donc entier…

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