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La Cour de justice, moteur historique de la construction européenne

En interprétant certaines dispositions dans un sens favorable à l’intégration communautaire, la Cour de justice de l’Union européenne (anciennement Cour de justice des Communautés européennes - CJCE) a joué un rôle essentiel dans la mise en œuvre des traités européens. Elle a notamment permis de faire progresser l’intégration du Marché commun.

La Cour de justice, moteur historique de la construction européenne

Créée par le Traité CECA en 1951, la Cour de justice, qui siège à Luxembourg, est composée à l’origine de 7 magistrats (aujourd’hui 28) désignés par les Etats membres siégeant en toute indépendance. Elle est notamment chargée d’interpréter les articles du Traité.

Elle voit ses compétences étendues à la Communauté économique européenne et à l’Euratom avec le Traités de Rome de 1957. Au début des années 60, elle rend une série d’arrêts aux conséquences fondamentales pour l’évolution de la construction européenne.

Effet direct et supériorité des dispositions européennes

En 1963, l’arrêt Van Gend & Loos introduit dans le droit communautaire la doctrine de l’effet direct : le Traité de Rome va au-delà du droit international en s’adressant non seulement aux Etats qui l’ont conclu, mais également aux ressortissants de ces Etats. C’est donner à ce texte une portée plus grande qu’à un traité classique et préparer le terrain à l’institution, trente ans plus tard, d’une citoyenneté européenne attachée à des droits.

La Cour va encore plus loin avec les arrêts Costa (1964) et Simmenthal (1978). Le Traité de Rome n’a pas prévu l’hypothèse d’un conflit entre une norme communautaire et une loi nationale postérieure. Qu’à cela ne tienne : la Cour, invoquant “l’esprit” du Traité, affirme que les dispositions communautaires sont toujours supérieures aux règles nationales. Ce principe de primauté revient quasiment à donner au Traité de Rome un rôle équivalent à Constitution dans un système fédéral.

Par leurs prises de position audacieuses, les juges de Luxembourg ont donc transformé un traité international en fondement d’un ordre constitutionnel nouveau, à forte tendance fédérale. Ce qu’ils reconnaîtront d’ailleurs en 1983 en qualifiant le Traité de Rome de “charte constitutionnelle” des Communautés (arrêt Parti écologique - les Verts).

Vers la reconnaissance mutuelle des réglementations nationales

Le Traité de Rome contient un certain nombre de concepts juridiquement flous. Par exemple, dans le cadre de la libéralisation des échanges entre les Six, il parle de supprimer les restrictions quantitatives et “mesures d’effet équivalent” , sans jamais définir ces mesures. Il n’indique pas non plus ce que sont les dispositions nationales qui “affectent l’établissement et le fonctionnement du Marché commun” et qu’il est nécessaire d’harmoniser. La marge d’appréciation est donc considérable.

Sollicitée à plusieurs reprises, la Cour de justice va se charger de clarifier ces points, généralement dans un sens favorable à l’intégration européenne. Ainsi, certaines normes techniques nationales vont être considérées par la Cour comme des mesures protectionnistes incompatibles avec le Marché commun.

Si le Traité prévoit, sous certaines conditions, la possibilité de déroger au principe de libre circulation afin de protéger, par exemple la santé et la sécurité des personnes, la Cour veille scrupuleusement à l’interprétation de ces dispositions. Il n’est pas rare, en effet, que certains Etats tentent, de façon abusive et injustifiée, de recourir à ces limitations posées par le Traité pour interdire l’importation de marchandises communautaires. C’est ainsi que la Cour, dans son célèbre arrêt Cassis de Dijon (1979), pose des limites à l’utilisation de ces justifications.

Cet arrêt établit le principe selon lequel “tout produit légalement fabriqué et commercialisé dans un État membre, conformément à la réglementation et aux procédés de fabrication loyaux et traditionnels de ce pays, doit être admis sur le marché de tout autre État membre” . Ce qui signifie par exemple qu’un produit destiné à un Allemand peut aussi l’être à un Français. C’est une porte ouverte à la reconnaissance mutuelle des réglementations nationales.

La Commission va se saisir de ce principe de reconnaissance mutuelle pour rédiger en 1985 son Livre blanc sur l’achèvement du marché intérieur, qui précède de l’Acte unique de 1986 et pointe tous les domaines pour lesquels une harmonisation entre les législations est nécessaire. La Cour n’est donc pas étrangère à la relance de l’intégration européenne qui s’est opérée au milieu des années 80.

A travers ces exemples choisis parmi les arrêts les plus significatifs de la Cour de justice, on mesure combien cette institution a joué un rôle central dans la mise en œuvre du Traité de Rome.

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