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Jean-Luc Mélenchon, ou l’Europe ambiguë ?

C’est en novembre dernier, lors d’une convention à Saint-André-lez-Lille (Nord), que Jean-Luc Mélenchon a présenté ses dix mesures prioritaires pour 2017. Depuis la création de son nouveau parti en février 2016, le candidat de La France insoumise (FI) affûte son programme. Et dans le discours du député européen, réélu en 2014, l’Europe occupe une place particulière. A ce sujet, ses convictions ont évolué, particulièrement dans les dernières semaines de la campagne présidentielle.

Jean-Luc Mélenchon

La politique d’Angela Merkel, cible privilégiée de Mélenchon

Depuis 2010, la dette est devenue un thème central dans la zone euro. Critique depuis toujours envers le modèle allemand, Jean-Luc Mélenchon a basé le volet Europe de son programme sur un rejet de la politique d’Angela Merkel. En cause, la politique d’austérité de la chancelière allemande accusée d’avoir imposé à travers l’Union européenne une cure d’austérité à certains pays comme la Grèce.



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Jean-Luc Mélenchon critique ainsi le Mécanisme européen de stabilité (MES) qui a pour but de fournir une aide financière aux Etats membres qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement. Le candidat reproche notamment la prise de décision du MES dont certains pays comme l’Allemagne mais également la France et l’Italie sont des acteurs majeurs, et qui peuvent imposer leurs conditions et exigences.

En juillet 2015, Jean-Luc Mélenchon ne cache à cet égard pas sa vive opposition au plan de sauvetage proposé à la Grèce et formule des critiques acerbes à l’encontre de la troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) et de l’Eurogroupe.

Madame Merkel n’est pas la chancelière de l’Europe (16/04/17, Paris)

Quelques mois plus tôt, le député européen publiait un ouvrage dans lequel il dénonçait “le poison” que constitue selon lui l’Allemagne pour l’Europe. Intitulé “Le Hareng de Bismarck, le poison allemand” (Plon, 2015), le livre fait allusion à un cadeau - des harengs - offert par la chancelière au président François Hollande lors d’une visite de ce dernier sur la Baltique, un geste dans lequel Jean-Luc Mélenchon voit “une allusion au chancelier Bismarck, le vainqueur de la guerre franco-allemande [de 1870]” .

Ce positionnement lui permet de se rapprocher un temps du parti d’Alexis Tsipras et depuis d’autres figures politiques de la gauche radicale en Europe.

“L’Europe, on la change ou on la quitte”

Le résultat du référendum sur le Brexit, le 23 juin dernier, accentue le positionnement de Jean-Luc Mélenchon et confirme sa volonté de sortir des traités européens. “L’Europe, on la change ou on la quitte” : c’est à partir de ce message que le candidat à l’élection présidentielle oriente son programme. Pour y parvenir Jean-Luc Mélenchon s’appuie sur un programme bâti par plusieurs économistes et propose d’abord un plan A, puis un plan B.



Consultez également notre synthèse du programme de Jean-Luc Mélenchon pour l’Europe, ainsi que le fact-checking de ses mesures par la presse française.

Dans ce premier “plan A” , Jean-Luc Mélenchon propose une sortie concertée des traités pour renégocier de nouvelles règles plus conformes à la politique qu’il souhaite pour la France et pour l’Europe. L’une de ses principales mesures est de s’exonérer du Pacte de stabilité et des règles européennes encadrant les déficits. Il envisage de “mettre fin à l’indépendance de la Banque centrale européenne, modifier ses missions et statuts, [et] autoriser le rachat de la dette publique directement aux Etats” . Même si pour y parvenir, il lui faudrait le soutien unanime des Etats membres, et donc de l’Allemagne qui aujourd’hui y est farouchement opposée. Et en définitive, ces nouveaux traités seraient soumis à un référendum.

En cas d’échec du “plan A” , Jean-Luc Mélenchon propose un “plan B” dans lequel il envisage la sortie de la France de l’Union européenne et de l’euro. “L’heure du plan B va sonner” , annonce-t-il alors dès le lendemain du vote des Britanniques.

Il évoque la possibilité de trouver d’autres formes d’alliance. “La tactique a de l’importance. On part avec ceux qui sont d’accord avec nous et on fait autre chose. La France n’est pas pieds et poings liés à l’Union européenne, aux pays baltes, à la Lituanie, à l’Estonie, à la Lettonie. Ce n’est pas vrai. Nous avons d’autres environnements possibles. L’Europe de la Méditerranée, ce n’est pas rien. La francophonie politique, ce n’est pas rien. La France n’est pas dos au mur” , explique le candidat.

Entre plan A et plan B, l’ambiguïté demeure. A quelques jours du premier tour, Jean-Luc Mélenchon, et alors que sa progression dans les sondages indique qu’il pourrait se hisser au second tour, semble vouloir rassurer une certaine partie de son électorat. “Ne croyez pas ce qu’ils vous disent : ‘Il veut sortir de l’Europe, de l’euro’ (…), allons, un peu de sérieux” , a-t-il déclaré le 18 avril dernier, ouvrant ainsi la voie à un positionnement moins radical vis-à-vis de l’Europe.

De Podemos à Die Linke, quels soutiens en Europe ?

En attendant une hypothétique mise en oeuvre de ses deux plans pour l’Europe, il n’en demeure pas moins que le positionnement du député européen face à l’Allemagne l’a rapproché de certaines personnalités politiques en Europe. Après avoir soutenu en Grèce le Premier ministre Alexis Tsipras, il s’est rapproché de l’ancienne présidente du parlement grec Zoé Konstantopoulou qui a créé son propre parti en 2016. Cette figure charismatique de Syriza a pris ses distances vis-à-vis du Premier ministre grec depuis l’accord passé par ce dernier en juillet 2015 avec les créanciers du pays, et apparaît très engagée dans la démarche du “plan B” pour l’Europe proposé par le Jean-Luc Mélenchon.

Cette semaine, Toute l’Europe se plonge dans les projets européens des principaux candidats. Consultez nos articles d’analyse sur François Fillon, Benoît Hamon, Marine Le Pen et Emmanuel Macron.

En Espagne, la formation de gauche radicale Podemos est divisée. Le secrétaire général du parti Pablo Iglesias, qui sera à Paris aux côtés du candidat 48h avant le premier tour, et la majorité des membres de la direction soutiennent Jean-Luc Mélenchon. Mais certains membres du parti se sont officiellement déclarés en faveur du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) de Philippe Poutou.

Moins médiatique que Syriza ou Podemos, en Allemagne le parti de gauche radicale Die Linke pèse autant dans le système parlementaire allemand que le parti des Verts. Jean-Luc Mélenchon peut compter sur le soutien de la vice-présidente du parti, Sahra Wagenknecht, mais qui pourrait conclure une alliance avec le candidat du Parti social-démocrate Martin Schulz en vue des prochaines élections en septembre prochain. Un accord de nature à dégrader les relations entre La France insoumise et Die Linke, dans la mesure où M. Mélenchon se refuse, du moins pour l’instant, à tout rapprochement avec le Parti socialiste, dont il est pourtant un ancien membre, et alors qu’il partage nombre de points communs avec Benoît Hamon - à l’exception notable et peut-être décisive de l’Europe. Le député européen ayant fait partie des plus farouches critiques du quinquennat de François Hollande.

Sahra Wagenknecht, Pablo Iglesias et Zoé Konstantopoulou

Par Alexandra Lesur

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