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Jean-Claude Buchot : “Il a fallu se battre pour faire admettre l’idée que nous n’étions pas chacun dans notre pays détenteur du meilleur enseignement”

Jean-Claude Buchot, directeur des Relations Internationales de l’Université Stendhal de Grenoble, revient sur les origines du programme Erasmus et le rôle du comité national consultatif dans la naissance de ce programme communautaire.

Avez-vous un souvenir précis de la première réunion dont on pourrait dire qu’elle fut fondatrice des programmes de mobilité ?

Tout a commencé avec une réunion des ministres de l’Education en 1976 où l’idée a été évoquée. Par la suite, lors de l’été 1977, j’ai participé avec un autre collègue français à un séminaire organisé à l’université d’Edimbourg qui rassemblait une cinquantaine de personnes représentant les 9 membres de la Communauté européenne.

Nous étions tous d’accord sur le postulat de départ : rien n’inciterait les étudiants à partir tant que deux hypothèques ne seraient pas levées. L’une était strictement académique : la reconnaissance par l’institution de l’enseignement suivi à l’étranger. L’autre beaucoup plus matérielle : donner des moyens financiers susceptibles a minima de combler le différentiel de niveaux de vie entre les Etats membres.

Il a fallu attendre dix ans pour atteindre ces objectifs. Au-delà des aspects psychologiques et de la résistance du milieu, il y avait des difficultés d’ordre juridique et structurelles. Rien, à part peut-être l’exégèse possible d’un article évoquant l’apprentissage, n’existait dans le Traité de Rome qui aurait permis de justifier le financement par la Communauté des programmes de mobilité.

Ainsi, dans les premières années d’expérience, celles des “joint studies programs” , Bruxelles a trouvé la solution originale de subventionner la Fondation Européenne de la Culture - association néerlandaise de droit privé présidée alors par la princesse Margaret de Hollande et financée par les surplus du loto batave - à charge pour elle de gérer la redistribution des fonds.

Sur un plan franco-français, les services des relations internationales des établissements d’enseignement supérieur, supports essentiels de promotion et de gestion, étaient loin de ce qu’ils sont actuellement.

Dans les années 80, notre action s’est développée dans une certaine indifférence et il a fallu se battre pour faire admettre l’idée que nous n’étions pas chacun dans notre pays détenteur du meilleur enseignement supérieur.

Quel a été le rôle du comité national consultatif dans la naissance d’Erasmus ?

Après l’Acte unique européen de 1985, les initiatives individuelles sont entrées progressivement dans une phase plus institutionnelle. En France, le gestionnaire traditionnel des bourses, le CNOUS (Centre national des œuvres universitaires), fut habilité à gérer les fonds communautaires. Le directeur de l’époque, Albert Prevos, avait ressenti la nécessité de réunir ceux qui pouvaient lui apporter réflexions et conseils sur la gestion mais également le développement et la promotion de ce qui, en 1987, deviendrait le programme Erasmus.

La création de l’acronyme particulièrement heureux “Erasmus” revient à Alan Smith dont on ne dira jamais assez le rôle cardinal qu’il a joué à l’époque et sur le terrain dans l’acceptation du principe même des mobilités.

En décembre 1990, vous avez reçu le prix Erasmus, de quoi s’agissait-il ?

C’est un jury présidé par M. Baron Crespo, président du Parlement européen, qui a choisi “pour chaque Etat membre un représentant du monde universitaire dont les efforts ont contribué de façon remarquable au développement du programme Erasmus et à travers lui de l’Europe des universités ” .

Bien sûr, sur le moment il y a toujours une certaine gène à être distingué parmi d’autres qui ont au moins autant œuvré que vous pour la mise en pratique d’une conviction partagée. Mais finalement j’ai perçu ce prix comme la reconnaissance de l’activité de promotion que j’avais menée pendant une décennie.

Propos recueillis le 21/03/07

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