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Jacques Gravegeal : “N’oublions pas que l’Europe est le premier vignoble du monde”

Jacques Gravegeal, Président des vins de pays d’Oc, analyse la crise du secteur vitivinicole et le projet de réforme de l’Organisation commune du Marché, présenté le 4 juillet 2007 par la commissaire à l’Agriculture, Mariann Fischer Boel.

La Commission européenne vient de proposer une réforme de l’Organisation Commune du marché viticole européen. L’arrachage de 200 000 hectares de vigne est prévu. Comment cette réforme est-elle accueillie par les viticulteurs ?

L’arrachage en Languedoc-Roussillon, dans les années 1980, a déjà sévi sur 135 000 hectares, et a provoqué une délocalisation du vignoble au profit du reste du monde mais aussi de certaines régions françaises.

Nous revenons, aujourd’hui, à la case départ avec le danger de déplacer la majorité de la viticulture européenne vers le reste du monde.

N’oublions pas que l’Europe est le 1er vignoble du monde et le 1er lieu d’échange.

Un contingent de près de 150 000 hectares de plantations illicites, constaté par l’Organisation Commune du Marché, produit du vin depuis 1998 et amène, par son volume de production, le marché européen dans une situation de déséquilibre et d’excédent.

Il est encore temps de faire arracher ces plantations illégales, cela ne coûterait rien à la Communauté Européenne et nous pourrions procéder ensuite à l’expertise d’un arrachage effectif.

Il semblerait que certains viticulteurs approuvent les mesures d’arrachage comme “solution” contre la crise que traverse leur secteur d’activité confronté à la concurrence des pays du Nouveau Monde. Que pensez-vous de cette résignation ?

A l’évidence, les plantations illicites ont provoqué le déséquilibre du marché viticole européen et du marché national en commençant d’ailleurs par les Appellations d’Origine Contrôlée.

Depuis deux ou trois ans, la filière est confrontée à des prix indécents qui ne rémunèrent plus les investissements et qui amènent certaines exploitations à épuiser leur trésorerie et à se retrouver en déficit de paiement.

Inéluctablement, l’arrachage devient la seule issue pour arrêter l’hémorragie financière, en donnant une “solution” d’apport de trésorerie à court terme.

Voilà ce que l’on peut appeler de la résignation.

La pyramide des âges est aussi un paramètre à prendre en compte, la population viticole française est également concernée par le phénomène du “papy boom” et des départs en retraite. C’est aux plus jeunes que je pense. Les jeunes viticulteurs qui se sont installés récemment, ont investi pour s’engager sur un projet d’avenir et sont pour la plupart dans des situations économiques extrêmement critiques.

Face à l’arrachage, les risques directs et indirects de notre secteur d’activité sont lourds de conséquences, j’insisterais sur trois points :

une désertification du territoire et un abandon du paysage à la friche,
une déstabilisation de l’environnement avec ses conséquences écologiques
une désorganisation économique des populations rurales attachées à leur territoire et une destruction de l’emploi direct et induit en particulier pour le Languedoc-Roussillon avec le secteur touristique.


Propos recueillis le 05/07/07

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