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Histoire des droites françaises : une division nommée Europe

Que pense la droite de l’Europe ? En 60 ans de construction européenne, la ligne des droites françaises a profondément évolué.

De gauche à droite : Emmanuel Macron, Laurent Wauquiez, Marine le Pen.
De gauche à droite : Emmanuel Macron, Laurent Wauquiez, Marine le Pen. Photo : Profil Facebook officiel, iStock, Parlement européen. 

L’Europe, facteur de clivage après la guerre

Peu après la Seconde Guerre mondiale, l’Europe est déjà un sujet de débat entre les 4 principales familles politiques à droite. Démocrates-chrétiens, libéraux, gaullistes et nationalistes se différencient entre autres par leur attitude vis-à-vis de la construction européenne. Pour l’historien Gilles Richard, auteur de l’Histoire des droites en France (1815-2017), la question européenne est ainsi centrale dans le clivage qui oppose les nationalistes fondamentalement hostiles à l’Europe aux autres partis de droite. Mais elle crée également des désaccords et des tensions entre les autres partis, voire en leur sein.

Très présents sur la scène politique française à la sortie de la Guerre, les démocrates-chrétiens s’engagent totalement dans la construction européenne. Ils lient leur destin politique à celui de l’Europe, qu’ils perçoivent comme un garant de la paix et de la justice sociale auxquelles ils aspirent. Dans cette mission, ils s’associent étroitement aux libéraux, enthousiastes à l’idée de faciliter les échanges entre pays voisins. De l’autre côté, les gaullistes et les nationalistes sont contre le principe de l’intégration de la France dans une Europe supranationale et fédérale.

CEE : Charles de Gaulle rompt avec les nationalistes

Charles de Gaulle reste d’abord sur une ligne d’opposition dure vis-à-vis de l’Europe. Mais un tournant s’opère quand il revient au pouvoir en 1958, et accepte d’appliquer le traité de Rome (signé en 1957 par Guy Mollet) pour mettre en œuvre la Communauté économique européenne. Les gaullistes se séparent alors nettement des nationalistes, qui refusent la perte de souveraineté qu’implique le traité.

Par la suite, les gaullistes défendent une Europe des nations où les gouvernements coopèrent en faveur de l’économie et de la culture européenne sans perdre leur souveraineté. Charles de Gaulle est opposé au projet de l’Europe supranationale par l’intégration économique ainsi qu’à la Communauté européenne de défense. Le principe d’une armée européenne comprenant des contingents allemands et placée sous le commandement de l’OTAN (c’est-à-dire américain), lui paraît une remise en cause inacceptable de la souveraineté nationale.

Cependant, au plus fort de la guerre froide, l’anticommunisme est un moteur pour les gaullistes, ils voient l’Europe unie comme un rempart pour préserver les valeurs chrétiennes et occidentales chères aux droites européennes.

Valéry Giscard-d’Estaing président : les libéraux pro-européens au pouvoir

Après le retrait du général de Gaulle en 1969, les rapports de force évoluent au sein de la droite française. Les démocrates-chrétiens perdent progressivement de leur influence et ont du mal à se renouveler après la crise du parti entraînée par la sécularisation de la société. De leur côté, les gaullistes s’enferment dans l’héritage de la politique de de Gaulle, pour finalement disparaitre peu à peu.

Les libéraux pro-européens prennent alors la place laissée vacante à droite en France, jusqu’à l’apogée de leur influence lorsque Valéry Giscard-d’Estaing devient président en 1974. Ce dernier défend l’idée d’une troisième voie entre l’Europe des Etats et l’Europe supranationale. En tant que libéral, il participe à l’entrée en application des nouveaux outils économiques européens, considérés comme des préalables à l’Union économique et monétaire, comme le système monétaire européen. Lui-même deviendra député européen en 1989.

Dilemme à droite : l’impossible conciliation entre libéralisme et nationalisme

Depuis le mandat de Valéry Giscard-d’Estaing, les nationalistes gagnent en puissance en s’opposant au projet européen des libéraux. Aujourd’hui, la droite française est divisée en deux grands courants qui semblent irréconciliables : les néo-libéraux et les nationalistes. La République en marche tend à monopoliser la position néo-libérale et le Rassemblement national (ex-Front national) la position nationaliste, avec l’Europe comme point de clivage essentiel.

L’euro est un parfait exemple de ces dissensions. Pour les néo-libéraux, il représente un vecteur idéal de libéralisme économique, quand les nationalistes le voient comme la quintessence de la perte de souveraineté qu’implique l’adhésion à l’UE. La dernière élection présidentielle illustre ce clivage dans les urnes. Le second tour a vu s’affronter un candidat néo-libéral européiste, Emmanuel Macron, contre une nationaliste hostile au processus de construction européenne, Marine le Pen.

Actuellement, le parti Les Républicains doit trouver sa place sur l’échiquier politique français, où les positions de néo-libéralisme et de nationalisme sont déjà occupées par les partis la République en marche et le Front national. Son hésitation pourrait lui coûter cher lors des prochaines élections du Parlement européen, en mai 2019.

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