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  • Synthèse

Histoire de la politique commune de la pêche

Aujourd’hui compétence exclusive de l’Union européenne, la politique commune de la pêche (PCP) était à l’origine intégrée à la politique agricole commune. Ce n’est qu’à partir des années 1970 qu’elle va progressivement devenir autonome.

Créée en 1970, la politique commune de la pêche est révisée environ tous les 10 ans
Créée en 1970, la politique commune de la pêche est révisée environ tous les 10 ans - Crédits : fmajor / iStock

Bien que l’on trouve dès le traité de Rome les premières préoccupations pour le secteur de la pêche, il faut attendre 1970 pour que le Conseil adopte le premier texte sur le sujet. A l’époque, de nombreux Etats sur d’autres continents s’octroient des zones économiques exclusives (ZEE) allant jusqu’à 200 milles des côtes, poussant les Européens à réagir.

La Communauté économique européenne établit alors une organisation commune des marchés pour les produits de la pêche fixant des règles communes visant à stabiliser le marché. Parmi celles-ci, un tarif extérieur commun pour taxer les importations et des normes communes de commercialisation définissant des niveaux de fraîcheur et des catégories en fonction de la taille des poissons. L’exécutif met également en place des aides financières visant à moderniser le secteur et définit le droit d’accès aux eaux d’un autre Etat membre.

L’adhésion du Royaume-Uni, de l’Irlande et du Danemark à la Communauté européenne le 1er janvier 1973 change la donne, en raison de l’importance du secteur halieutique dans ces pays, difficile à concurrencer pour les membres fondateurs. Afin de protéger les intérêts économiques et sociaux des populations côtières, le principe fondamental de liberté d’accès aux eaux côtières d’un autre État membre est suspendu, tandis qu’une zone de droits exclusifs de pêche côtière (jusqu’à 12 milles nautiques) est mise en place pour chacun. Les Européens acceptent alors de confier la gestion de leurs ressources halieutiques à la Communauté européenne.

1983 : la PCP est établie

Une décennie plus tard, la politique commune de la pêche autonome est créée, avec pour objectif d’assurer une répartition harmonieuse des ressources entre Etats membres qui partagent les mêmes zones de pêche. Le règlement 170/83, du 25 janvier 1983, établit le concept de “stabilité relative des stocks” et prévoit des mesures conservatoires de gestion, visant à préserver les stocks de ressources halieutiques. Des mesures basées sur les des totaux admissibles de captures (TAC) et des quotas de pêche.

TAC

Désormais définis chaque année, les totaux admissibles de captures (TAC) sont les quantités maximales fixées pour la capture des principaux stocks de poisson.

Suivant le mouvement international, les Etats membres sont également autorisés à porter leurs “zones économique exclusive” à 200 milles marins. La PCP doit ensuite s’adapter au retrait du Groenland de la Communauté en 1985, à l’adhésion de l’Espagne et du Portugal en 1986 et à la réunification de l’Allemagne en 1990, trois événements ayant à nouveau un impact sur la taille, la structure et la capacité de capture de la flotte européenne.

1992 : l’Europe prend conscience de la surcapacité de pêche

En 1992, un nouveau règlement s’efforce de remédier au grave déséquilibre entre la capacité de la flotte et les possibilités de capture. L’accès aux ressources est ainsi réglementé, en introduisant progressivement de nouvelles licences pour les pêcheurs, afin de réduire la surcapacité. De plus, la réduction de la flotte communautaire s’accompagne de mesures structurelles pour en atténuer les conséquences sociales.

Mais celles-ci ne sont efficaces qu’un temps et l’épuisement des stocks poursuit son accélération. Outre la surpêche, un livre vert de 2001 pointe les problèmes liés à la lenteur du processus décisionnel, au manque de contrôles, à la baisse de la rentabilité et de l’emploi, ainsi qu’à la diminution des stocks dans les pays tiers ayant des accords avec l’UE.

2002 : nouvelle réforme et vision à long-terme

Face à ce constat, le Conseil adopte en décembre 2002 trois règlements, relatifs à la conservation et à l’exploitation durable des ressources halieutiques, aux modalités des actions structurelles et à l’établissement d’une mesure pour la démolition des navires de pêche.

La Communauté suit alors une approche à plus long terme de gestion des pêches, en adaptant les captures à la situation biologique réelle de chaque stock tout en tentant de garantir des revenus et des emplois stables dans le secteur. Elle met alors à plat les TAC fixés en 1992 et définit des plans pluriannuels de gestion ou de reconstitution pour les stocks les plus fragilisés. Ces programmations fixent pour plusieurs années les volumes acceptables de capture par espèce et par zone de pêche.

En 2005, la Cour de justice des Communautés européennes condamne la France à régler une astreinte record de 58 millions d’euros en plus d’une amende de 20 millions d’euros, pour manquement au droit communautaire en matière de pêche.
Quelques années plus tôt, la Grèce avait également été réprimandée pour des faits similaires.

En créant des conseils consultatifs régionaux, elle souhaite également faciliter la participation de l’ensemble des parties prenantes à l’élaboration de la stratégie de gestion des pêches (pêcheurs, industriels, commerciaux, organisations de consommateurs, organisations de protection de l’environnement, organisations de développement…).

Par ailleurs, la réforme met fin aux aides publiques à la construction de navires et réoriente les soutiens financiers. Tout en poursuivant le développement d’accords de pêche bilatéraux avec les pays tiers. Elle renforce également les contrôles des navires et les sanctions à l’encontre des Etats membres.

Créée en 2005, l’Agence européenne de contrôle des pêches, basée à Vigo, coordonne la coopération entre les activités nationales de contrôle et d’inspection.

Mais un nouveau livre vert en 2009 déplore que les objectifs de 2002 concernant la viabilité du secteur halieutique n’aient pas été atteints. 88 % des stocks communautaires sont encore surexploités, tandis que la rentabilité et les finances des flottes de pêche sont mises à mal.

La Commission européenne souligne alors cinq problèmes structurels :

  • Une surcapacité des flottes ;
  • Des objectifs stratégiques flous qui se traduisent par un manque d’orientations pour la prise de décision et la mise en œuvre ;
  • Un mécanisme décisionnel qui encourage une vision à court terme ;
  • Un cadre qui ne responsabilise pas suffisamment le secteur ;
  • Un manque de volonté politique pour faire respecter la réglementation et un faible respect de cette réglementation par le secteur.

2013 : garantir la durabilité du secteur

La Commission poursuit son ambition de réformer la PCP tous les 10 ans. Le nouveau règlement 1380/2013 adopté poursuit les objectifs de son prédécesseur en ajustant certaines mesures.

Les Etats membres sont contraints dès l’année suivante de définir des quotas en accord avec le “rendement maximal durable” (RMD), tenant compte du volume de poisson pouvant être pêché afin que le stock puisse se reproduire pendant l’année. Des sanctions sont d’ailleurs mises en place pour pénaliser des flottes jugées surdimensionnées.

Les pêcheurs quant à eux sont désormais contraints de débarquer l’ensemble des prises effectuées en mer.

Enfin, l’Union européenne adapte ses financements en instaurant le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP). Contrairement aux programmes précédents, ce dernier affecte une partie notable des ressources à l’accroissement de la durabilité et de la rentabilité de la pêche.

Des avancées qui, selon un rapport de l’Assemblée nationale en juillet 2019, font cependant “face à des difficultés majeures de mise en œuvre” et qui ne permettent pas d’atteindre les objectifs fixés par la Commission européenne pour 2020.

2021 : quel effet “Brexit” ?

La sortie définitive du Royaume-Uni de l’Union européenne le 1er janvier 2021 a particulièrement inquiété les pêcheurs européens. L’accord commercial trouvé le 24 décembre 2020 entre Londres et Bruxelles prévoit de garantir l’accès des navires européens aux eaux britanniques pendant une période transitoire de cinq ans et demi, pendant laquelle ils devront progressivement renoncer à 25 % de leurs captures. Des ajustements qui seront à prendre en compte pour la prochaine révision de la PCP.

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