De l’assurance à la confirmation
En 1990, il devient l’assistant parlementaire de Frederik (dit “Frits”) Bolkestein, alors commissaire européen et député du parti libéral “Volkspartij voor Vrijheid en Democratie” (VVD).
S’inspirant progressivement des prises de position racistes et xénophobes de ce dernier, Geert Wilders s’oppose à la perspective d’une adhésion de la Turquie en 2004, ce qui provoque sa rupture avec le parti. Il crée alors son propre parti, le Groep Wilders, et s’assure un premier succès au terme d’une campagne contre le traité constitutionnel européen, rejeté en 2005 par les citoyens néerlandais.
Rebaptisé “Partij voor de Vrijheid” (PVV, Parti pour la Liberté), le parti de Geert Wilders se lance dans la campagne législative de 2006 avec un discours anti-Islam et anti-immigration qui lui assurent près de 6% des suffrages et 9 députés sur les 150 de la chambre basse du Parlement néerlandais.
En juin 2009, il connaît un nouveau succès aux élections européennes : avec 17% des voix le PVV obtient 4 des 25 sièges réservés aux Pays-Bas. En mars de l’année suivante, il continue sa progression aux élections municipales, en arrivant premier dans la ville d’Almere et second à La Haye, les deux seules villes dans lesquelles il se présentait.
Xénophobie et philosémitisme
Souvent décrit, notamment par les médias français mais moins par la presse néerlandaise, comme un leader raciste et xénophobe, Geert Wilders se démarque pourtant d’autres extrêmes-droites européennes sur de nombreux points.
La polémique reste bien sûr son fond de commerce : du court-métrage “Fitna” (en arabe : “guerre”) diffusé en mars 2008 et assimilant le Coran à Mein Kampf (qui lui vaut actuellement un procès pour incitation à la haine raciale et religieuse), à l’attaque contre la journaliste Joanie de Rijcke, “atteinte du syndrome de Stockholm” parce qu’elle ne partageait pas sa haine de l’Islam bien qu’ayant subi elle-même un kidnapping de terroristes, en passant par la volonté d’annexer la Flandre aux Pays-Bas (proposition d’un référendum), la demande de rejet de la Roumanie et de la Bulgarie de l’Union européenne, l’homme politique use de sa liberté de parole (qu’il revendique en permanence) pour séduire l’électorat.
“Je n’ai rien en commun avec les fascistes” , “je n’ai rien à voir avec Le Pen” , répète-t-il. Comme son prédécesseur Pim Fortuyn (qui lui-même était homosexuel), Geert Wilders prône l’égalité entre hommes et femmes, mais aussi entre hétérosexuels et homosexuels.
Enfin, sa dénonciation de l’Islam va de pair avec une défense des “valeurs judéo-chrétiennes” : aucune trace d’antisémitisme chez cet ancien employé d’une boulangerie en Israël (entre 1981 et 1983), qui se targue aujourd’hui d’être lié aux services secrets israéliens et se rend régulièrement à Jérusalem.
Ce voyage le conduira vers une réelle fascination pour le pays, dont il rappelle à l’envi qu’il constitue “la seule démocratie au Moyen-Orient” .
Juin 2010 : la déroute ?
Christen-Democratisch Appèl (CDA) - Appel démocrate-chrétien (chrétien-conservateur) - 41 sièges - parti de l’actuel Premier ministre Jan Peter Balkenende.
Partij van de Arbeid (PvdA) - Parti du travail (social-démocrate) - 32 sièges.
Socialistische Partij (SP) - Parti socialiste - 25 sièges.
Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (VVD) - Parti populaire pour la liberté et la démocratie (tendance libéral-conservateur) - 22 sièges - mené par Mark Rutte.
Partij voor de Vrijheid (PVV) - Parti pour la liberté - 9 sièges - mené par Geert Wilders.
GroenLinks (GL) - VertGauche - 7 sièges.
ChristenUnie (CU) - Union chrétienne - 6 sièges
Democraten 66 (D66) - Démocrates ’66 - 3 sièges : parti social-libéral.
Staatkundig Gereformeerde Partij (SGP) - Parti politique calviniste - 2 sièges.
Partij voor de Dieren (PvdD) - parti des animaux - 2 sièges.
Mais l’homme qui, il y a encore quelques mois, se voyait à la tête du gouvernement, pourrait finalement ne pas même en faire partie.
De récents sondages créditent en effet le PVV de 17 sièges (soit tout de même deux fois plus qu’actuellement), derrière les libéraux du VVD (37), les travaillistes du PvdA (28) et les chrétiens-démocrates du CDA (25).
La crise semble en effet avoir relégué l’immigration et l’Islam au second rang, derrière des préoccupations économiques et sociales autour des finances publiques, des réformes budgétaires et des retraites.
Or le programme du PVV en la matière est assez pauvre, tandis que le VVD lui-même a repris certains thèmes chers à M. Wilders, en annonçant des mesures comme l’apprentissage obligatoire de la langue néerlandaise et la suppression de toute aide publique pendant 10 ans pour les étrangers qui obtiendraient le droit de s’installer dans le royaume.
La présentation d’un rapport sur le coût de l’immigration (plus de 7 milliards d’euros) aux Pays-Bas a aussitôt été contrée par des députés relativisant ce coût face à l’ensemble des dépenses sociales, et finalement éclipsée par une polémique sur le manque de démocratie au sein même du parti de Wilders, difficile à digérer par un défenseur des “valeurs occidentales de liberté et de démocratie” prétendument opposées aux valeurs de l’Islam.
Cependant, aux Pays-Bas comme ailleurs, rien n’est sûr : d’infimes marges d’erreur peuvent complètement changer la donne. D’autant que le VVD n’a pas formellement exclu une coalition avec le PVV, ce qui offrirait dès lors un siège de ministre à Geert Wilders.
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Christophe de Voogd : “Aux Pays-Bas, une campagne électorale anti-européenne” - Touteleurope.fr