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Europe : que s’est-il passé depuis 5 ans ?

Il y a cinq ans avaient lieu les précédentes élections européennes. L’Europe présentait alors un autre visage : Emmanuel Macron était inconnu du grand public, tandis que la Grèce était conservatrice, l’Italie socialiste et que le Royaume-Uni n’avait pas encore voté pour le Brexit. Quelles sont donc les évolutions politiques majeures qui ont bouleversé le Vieux continent depuis 2014 ?

Matteo Renzi, François Hollande et David Cameron étaient en poste en 2014, respectivement en Italie, France et Royaume-Uni
Matteo Renzi, François Hollande et David Cameron étaient en poste en 2014, respectivement en Italie, France et Royaume-Uni - Crédits : Parti social-démocrate roumain, COP21, Chancellerie lettone

Allemagne : la lente chute d’Angela Merkel

L’Allemagne présente une apparente constance dans la gestion de sa vie politique. En 2014, Angela Merkel est chancelière depuis déjà neuf ans, obtenant même son meilleur score aux élections fédérales de 2013 en manquant de peu la majorité absolue. En 2018, “Mutti” est toujours au pouvoir, mais son aura semble avoir fortement baissé. En effet, les élections allemandes de 2017 entraînent une forte chute de son parti, la CDU, qui reste néanmoins en tête, ainsi que de son partenaire de coalition, le SPD (centre-gauche). Un désaveu inédit profitant notamment à l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), parti d’extrême droite investissant alors le Bundestag pour la première fois.

En cause : la politique d’ouverture de la chancelière à l’égard des migrants, progressivement rejetée par les Allemands. Et depuis, les déboires électoraux se succèdent, la droite traditionnelle ayant été à nouveau sanctionnée lors de scrutins régionaux. En octobre dernier, Angela Merkel en a tiré les conséquences en renonçant à se maintenir à la tête de la CDU et en programmant son retrait de la vie politique au plus tard à la fin de son mandat, en 2021.

Espagne : la crise catalane et la corruption font chuter les conservateurs

En 2014, le conservateur Mariano Rajoy, élu en 2011 avec pour objectif de baisser le taux de chômage, s’apprête à briguer un second mandat. En 2015, affaibli par des scandales de corruption qui affectent son parti (Parti populaire, PP), il n’obtient toutefois pas la majorité absolue, et doit ensuite composer avec la crise catalane. A la suite du référendum organisé du 1er octobre 2017, approuvant à 90% l’indépendance de la Catalogne, le bras de fer entre le PP de M. Rajoy et les indépendantistes s’exacerbe. A tel point que Madrid décide de placer la région sous tutelle et de conduire à l’arrestation ou à l’exil de nombreux responsables indépendantistes.

Mais ce sont bien les affaires de corruption qui porteront le coup fatal au gouvernement, en juin 2018. Une motion de censure déposée par Pedro Sanchez (Parti socialiste ouvrier) aboutit et ce dernier reprend alors les rênes de l’exécutif. Il opte pour une approche plus conciliante vis-à-vis de la Catalogne ainsi que pour une politique moins austéritaire et plus ouverte sur le plan migratoire.

France : la révolution Macron

2014 est l’année où Emmanuel Macron arrive au poste de ministre de l’Economie. Figure nouvelle et inconnue du gouvernement de Manuel Valls, il remplace Arnaud Montebourg et devient bientôt le symbole du tournant social-libéral du quinquennat de François Hollande. En 2017, le jeune ministre, jamais élu, s’émancipe d’un gouvernement en chute libre dans les sondages : il remporte l’élection présidentielle contre Marine Le Pen au second tour, après avoir profité des poursuites judiciaires de François Fillon.

L’alternative centriste et libérale portée par le mouvement En Marche !, qui se détache des partis politiques traditionnels en déclin, l’emporte avant de se confirmer lors des élections législatives. L’ampleur du renouvellement de l’Assemblée nationale est sans précédent. Après 18 mois, la volonté réformatrice du gouvernement est indéniable, mais son orientation résolument libérale est de plus en plus contestée.

Emmanuel Macron, en 2018, lors du 2e One Planet Summit - Crédits : Michael Bloomberg

Emmanuel Macron, en 2018, lors du 2e One Planet Summit - Crédits : Michael Bloomberg

Grèce : la gauche radicale arrive au pouvoir

La Grèce de 2014 était dirigée par le parti conservateur Nouvelle Démocratie. Antónis Samarás, chargé alors de résoudre la crise grecque par des mesures d’austérité drastiques, gouvernait une coalition gauche-droite. Les élections de janvier 2015 marquent alors un tournant pour la gestion de la crise : Syriza, le parti d’opposition de gauche radicale, arrive au pouvoir, promettant de négocier une restructuration de la dette avec la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international).

S’ouvrent de longs mois de bras de fer, ponctués d’un référendum, convoqué par le Premier ministre Aléxis Tsípras afin de rejeter les exigences des créditeurs de son pays. Afin d’éviter un Grexit, ces dernières seront finalement acceptées, permettant la normalisation des relations avec Athènes. Et si les Grecs ont payé le prix fort sur le plan social, la situation économique et politique du pays s’est aujourd’hui stabilisée : le soutien financier à la Grèce s’est officiellement arrêté en août 2018, ouvrant la voie à un retour de l’autonomie économique.

Italie : de la gauche aux populistes

L’arrivée du socialiste Matteo Renzi en tant que Premier ministre en février 2014 annonçait un tournant réformateur. Après deux années et demie au bilan contrasté, notamment sur le plan économique, le chef du Parti démocrate italien démissionne cependant en décembre 2016 à la suite du rejet par référendum de sa réforme constitutionnelle. Son bras droit, Paolo Gentiloni, prend le relais l’espace de 18 mois, le temps de bâtir un nouveau système électoral.

Et en mars 2018, ce sont les partis populistes du Mouvement 5 étoiles (M5S) et de la Ligue (extrême droite) qui sont plébiscités par les électeurs, portés par les crises économique et migratoire. Après plusieurs semaines de tractations, le M5S et la Ligue parviennent à former une coalition, en dépit de leurs programmes a priori inconciliables. Depuis, Rome est en conflit ouvert avec Bruxelles, particulièrement sur la question épineuse du budget.

Matteo Salvini, vice-Premier ministre italien (extrême droite) en octobre 2018 - Crédits : ministère de la Défense italien

Matteo Salvini, vice-Premier ministre italien (extrême droite) en octobre 2018 - Crédits : ministère de la Défense italien

Pologne : le virage populiste

En 2014, la Pologne fête son 10ème anniversaire au sein de l’Union européenne. Le pays est alors gouverné par le parti libéral-conservateur de la Plate-forme civique (PO) et son poids est croissant parmi les 28. En atteste la nomination de l’homme fort du PO Donald Tusk à la tête du Conseil européen. Le paysage politique polonais change toutefois profondément l’année suivante avec l’accession au pouvoir pour la deuxième fois du parti ultra-conservateur et eurosceptique Droit et Justice (PiS). Cinq ans après la mort de l’ancien président et cofondateur du parti Lech Kaczyński, son candidat Andrzej Duda est élu président de la République avant que le PiS ne remporte les élections législatives.

Le point de départ d’une série de mesures jugées autoritaires et liberticides par Bruxelles et la majeure partie des Vingt-Huit. La réforme de la Cour suprême polonaise, visant à évincer les juges les moins favorables au PiS fait, à cet égard, office de symbole de la politique menée par Varsovie. En conséquence, une procédure pour activer l’article 7 du traité sur l’Union Européenne (TUE), pouvant aboutir à des sanctions pour non-respect de l’Etat de droit, a été lancée par la Commission européenne. Les récentes élections régionales d’octobre 2018 reflètent une victoire mitigée pour le parti au pouvoir, ses scores s’avérant plus modestes dans les grandes villes.

La Roumanie est, pour sa part, en proie à une grande instabilité gouvernementale. Depuis 2014, huit personnalités différentes se sont succédé au poste de Premier ministre. A l’origine de cette instabilité politique : la lutte anti-corruption qui a conduit à la condamnation de nombreuses personnalités de premier plan. Toujours empêtrée dans les affaires, la classe dirigeante roumaine et particulièrement le Parti social-démocrate, font aujourd’hui face à la défiance de la population ainsi qu’à la critique des institutions européennes. Le pays pourrait même, à terme, être sanctionné pour atteintes à l’Etat de droit.

Royaume-Uni : le choix du Brexit

En 2014, le conservateur David Cameron était encore aux commandes du Royaume-Uni et le néologisme “Brexit” n’était pas encore dans le dictionnaire. Tout juste le Premier ministre a-t-il promis à l’aile eurosceptique des Tories un référendum d’appartenance à l’Union européenne en cas de réélection en 2015. Effectivement reconduit au 10 Downing Street, M. Cameron tient sa promesse et, après une renégociation de la place de son pays dans l’UE jugée insuffisante par les électeurs, ces derniers se prononcent, le 23 juin 2016, en faveur du Brexit. David Cameron, ainsi que les travaillistes, ont bien fait campagne pour rester dans l’Union, mais les thèmes de l’immigration et de la souveraineté nationale, martelés par les “Brexiters” , ont obtenu gain de cause.

Depuis, Theresa May, ancienne ministre de l’Intérieur devenue Première ministre, a la lourde tâche de négocier avec Bruxelles les modalités du divorce. Une mission d’autant plus ardue que des tensions internes complexifient l’établissement d’un accord, notamment avec une Ecosse europhile et une Irlande du Nord qui craint le rétablissement d’une frontière physique avec la République d’Irlande et dont le statut reste incertain.

Article dirigé par Toute l’Europe et réalisé avec des élèves de Sciences Po dans le cadre d’un projet collectif

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