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Elections européennes : la constitution de listes transnationales est-elle possible ?

Prévue pour le 29 mars 2019, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne va laisser vacants 73 sièges de députés au Parlement européen. Une opportunité qui remis en avant l’idée de constituer des listes transnationales lors des élections européennes. Le Parlement européen a toutefois refusé de les mettre en place pour le scrutin de 2019.

Elections européennes : vers des listes transnationales ?

Comment fonctionnent les listes transnationales ?

Selon les dernières propositions évoquées pour la constitution de listes transnationales, ces dernières auraient concerné 27 sièges laissés vacants au Parlement européen avec le Brexit. Les listes auraient ainsi été composées de 27 noms de personnalités, soit un par Etat membre de l’UE. Lors du vote, chaque citoyen européen aurait eu deux bulletins à glisser dans l’urne, le premier pour une liste locale ou nationale et le second pour une liste paneuropéenne.

A-t-on déjà proposé la création de listes transnationales ?

L’idée des listes transnationales émerge véritablement après l’adoption de l’Acte unique en 1986 et puis celle du traité de Maastricht en 1992. Ces deux évolutions majeures de la construction européenne apportent une plus grande intégration politique, propice à l’amorce d’un ensemble de réflexions, notamment sur “le lien direct entre le citoyen et la construction européenne” , comme l’indique Charles de Marcilly de la Fondation Robert Schuman. Les listes transnationales sont alors “poussées, notamment par les courants fédéralistes” et évoquées dans plusieurs rapports du Parlement européen. Dans les années 2000, des personnalités politiques comme Laurent Fabius appellent à la création de ces listes.

En 2011, le député européen britannique Andrew Duff élabore un rapport sur la question. Il y suggère la création de 25 sièges de députés pour une circonscription européenne, qui seraient élus en même temps que les eurodéputés nationaux. Acceptée par la commission des Affaires constitutionnelles, sa proposition est toutefois rejetée en séance plénière.

Plus récemment, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a proposé la création de listes transnationales lors de son discours sur l’état de l’Union le 13 septembre 2017. Selon lui, ces listes permettraient de rendre “les élections au Parlement européen plus européennes et plus démocratiques”.

Lors de son discours de la Sorbonne le 26 septembre 2017, Emmanuel Macron a également appelé à utiliser l’opportunité du Brexit pour mettre en place des listes transnationales pour les élections européennes de 2019. Pour lui, ces listes doivent permettre de construire un “espace démocratique inachevé” en donnant la possibilité aux Européens de voter “pour un projet cohérent et commun” .

Quels en seraient les bénéfices ?

Dans une tribune publiée dans le Monde le 17 novembre 2017, les ministres français, italien et espagnol en charge des Affaires européennes affirment que ces listes pourraient amorcer la création d’un espace politique européen. Elles créeraient “une agora européenne” en portant à l’échelle continentale les débats. Selon Charles de Marcilly, l’idée est que sur certains sujets “les listes répondent à des logiques politiques” européennes plutôt qu’à des logiques nationales. Le but est que le débat “dépasse les frontières géographiques” .

Les auteurs de la tribune soutiennent aussi qu’en plaçant les débats au niveau européen, chaque citoyen de l’UE pourrait bénéficier de points de vue étrangers. Cette plus grande diversité d’idées permettrait de mieux se connaître et de renforcer la cohésion européenne.

Dans son rapport sur la composition du Parlement européen, l’ancien député Andrew Duff expliquait en outre que l’espace politique européen a besoin de partis politiques européens forts. M. Duff plaidait donc pour l’attribution de sièges à une circonscription unique, afin de donner plus de poids politique à ces partis. Ce sont ces derniers qui organiseraient les listes et feraient campagne dans toute l’Union.

Quelles en seraient les limites et les obstacles ?

Adopter des listes transnationales pour les élections européennes s’avère toutefois être un projet difficile à mettre en œuvre. En effet, un changement du traité de Lisbonne pourrait être nécessaire à la création de telles listes, entrainant une procédure longue et complexe passant par des ratifications nationales. Par conséquent, tous les Etats membres ne soutiennent pas ce projet.

A cet égard, le groupe de Visegrád (Pologne, Hongrie, République tchèque et Slovaquie) rejette les listes transnationales. Selon les quatre pays, les questions institutionnelles doivent être réglées “en pleine conformité avec les traités et ne devraient pas saper l’équilibre actuel” entre les institutions européennes et les Etats membres.

De plus, la mise en œuvre d’une circonscription européenne peut s’avérer complexe. La composition des listes, par exemple, nécessite de répartir équitablement les candidats de différentes nationalités, dont certains ne seront pas éligibles en raison de leur position sur la liste. De plus, l’organisation du scrutin se heurte à la multiplicité des lois électorales nationales, notamment sur les questions de financement des campagnes.

Les opposants à ces listes paneuropéennes, dont les partis eurosceptiques ou bien certains membres du Parti populaire européen comme le Portugais Paulo Rangel, soutiennent par ailleurs, qu’elles vont accentuer la distance entre les députés européens et leurs attaches locales, créant des élus “hors-sol” . Ce qui accentuerait “l’éloignement” entre députés européens et citoyens.

Certains craignent, en outre, que l’existence de parlementaires élus sur une liste transnationale crée une hiérarchisation entre les députés provenant de listes nationales et ceux de listes paneuropéennes. Ces derniers formant, ainsi, une élite au sein du Parlement européen reléguant les eurodéputés provenant de circonscriptions nationales à un rang inférieur.

Quel avenir pour les listes transnationales ?

Le 7 février 2018, réuni en session plénière, le Parlement européen a rejeté la création de listes transnationales pour les élections européennes de 2019. Cette décision n’enterre toutefois pas définitivement le projet, qui demeure défendue par le gouvernement français. La constitution de telles listes pour le scrutin de 2024 n’est ainsi pas inenvisageable. A cet égard, le Conseil européen du 23 février 2018 a abordé cette question. Les Vingt-Sept ont “conven[u] de poursuivre la discussion, le travail technique et juridique, pour qu’en 2024 ces listes transnationales soient possibles” , a déclaré Emmanuel Macron à l’issue de la rencontre.

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