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Economie : s’appuyer sur la croissance pour renforcer la convergence entre les pays européens ?

2017 aura été une année record pour l’économie européenne. La croissance atteint sa plus forte progression depuis dix ans, avec un chiffre de +2,3% pour l’Union européenne. Tandis que le taux de chômage se situe à son niveau le plus bas depuis 9 ans, à 7,3% (8,7% pour la zone euro). Le contexte apparaît donc propice au renforcement de la convergence et à la réforme de la zone euro, fait valoir la Commission européenne. A plus forte raison car l’endettement reste important et la progression des salaires trop faible.

Croissance, emploi et déficit dans le vert

Le 9 novembre dernier, à la Commission européenne, l’heure n’était pas à la fausse modestie au moment d’annoncer les bons chiffres de la croissance pour l’année 2017. “Après cinq années d’une reprise modérée, la croissance européenne est entrée dans une phase d’accélération. Les bonnes nouvelles s’accumulent : le nombre d’emplois créés augmente, l’investissement se redresse et les finances publiques sont en voie d’assainissement” , déclarait ainsi Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques.

En effet, d’après les estimations de l’exécutif européen, la croissance s’élève à 2,3% en 2017 pour l’Union européenne, et à 2,2% pour la zone euro. Un niveau jamais atteint depuis dix ans et qui augure des performances du même ordre au cours des deux années à venir. Bruxelles table à cet égard sur une croissance de 2,1% en 2018 et 1,9% en 2019.

S’agissant de l’emploi également, les derniers chiffres, publiés par l’institut de statistiques européen Eurostat le 9 janvier, montrent que les voyants sont au vert. Le taux de chômage au sein de l’UE s’élève à 7,3%, soit le meilleur résultat depuis fin 2008. Et si le chômage grimpe à 8,7% pour les seuls pays de la zone euro, il s’agit ici aussi d’un résultat positif car il faut remonter à début 2009 pour trouver un chiffre inférieur.

Enfin, en ce qui concerne le déficit, si les chiffres officiels ne seront rendus publics qu’en avril prochain, Bruxelles prévoit d’ores et déjà des niveaux bas. En effet, alors que le niveau de déficit public s’élève à l’heure actuelle à environ 1,7% du PIB pour l’ensemble de l’UE, la Commission envisage un niveau de 0,9% d’ici 2019, soit largement en-deçà du seuil fatidique des 3% prévus par le Pacte de stabilité et de croissance.

Pour expliquer la bonne santé de l’économie européenne, après plusieurs années de crise suivies d’une reprise modeste, plusieurs facteurs sont à mettre en évidence. Comme l’indique notamment Catherine Mann, économiste en chef à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’Europe a bénéficié, en 2017, de la bonne conjoncture mondiale qui a stimulé le commerce, de la reprise des investissements, ainsi que de la consommation intérieure. Trois éléments de surcroît soutenus par des politiques budgétaire et monétaire précisément destinées à susciter la croissance. “Cette configuration est très positive pour la zone euro cette année” , conclut Mme Mann.

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Fortes disparités

L’ampleur de ce regain d’activité n’est par contre pas la même dans l’ensemble des Etats membres de l’Union. De fait, cinq pays - la Belgique, la France, la Grèce, l’Italie et le Royaume-Uni - ne parviennent pas à dépasser le seuil des 2% de croissance. A l’inverse, sept pays atteignent le niveau enviable des 4% : la Roumanie, Malte, l’Irlande, la Slovénie, l’Estonie, la République tchèque et la Pologne.

Des disparités assez fortes qui sont également visibles en matière d’emploi. En la matière, si la Grèce demeure un cas particulier avec un taux de chômage qui culmine à 21,8%, quatre pays se situent au-delà des 10% : l’Espagne, Chypre, l’Italie et la Croatie. Soit un niveau nettement supérieur à la moyenne européenne de 7,3%.

Le processus de convergence des revenus réels” donne “des signes de reprise” , mais “la situation est toutefois différente d’un Etat membre à l’autre” , reconnaît Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission en charge de l’Euro et du Dialogue social. Pour Pierre Moscovici, la stratégie à adopter est simple. Il est nécessaire d’agir sans attendre pour relancer le processus de “convergence structurelle” des économies et “renforcer la zone euro” . Il s’agit, selon lui, des “deux conditions essentielles pour que la croissance résiste mieux à de futurs chocs et devienne un véritable moteur de la prospérité commune” .

En outre, fait valoir M. Moscovici, l’actuelle conjoncture favorable devrait être utilisée par certains Etats membres pour la consolidation des finances publiques. Une recommandation probablement adressée à des pays comme l’Italie, dont le niveau de dette publique s’élève au niveau alarmant de 132% du PIB (soit plus du double de la limite autorisée par le Pacte de stabilité), ou encore à la France, dont le déficit public équivaut à 2,9% du PIB. Une opinion partagée par François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, selon qui les dépenses publiques françaises devraient être réduites afin de se rapprocher de la moyenne européenne en la matière.

Moins impressionnants que celles de certains Etats membres comme la Roumanie ou l’Irlande qui affichent des taux de croissance très élevés, les performances économiques de l’Allemagne n’en demeurent pas moins au beau fixe. Avec un accroissement de l’activité de 2,2% en 2017, le pays atteint même un record depuis six ans. Tandis que l’excédent commercial allemand équivaut désormais à 1,2% du PIB. Déjà proche du plein emploi, le taux de chômage ne devrait s’élever qu’à 3,2% en 2019.

Maintenir les investissements, accroître les salaires

Ces éventuels efforts budgétaires ne devront pas empiéter sur les investissements, prévient néanmoins l’OCDE, qui prône plutôt de les accroître afin de pérenniser la croissance européenne. En effet, l’Organisation, tout comme la Commission européenne, anticipe un ralentissement de l’activité en 2018 et 2019, en raison de la baisse de la croissance chinoise et de la possible fin des politiques dites accommodantes. Le programme de rachats de dette de la Banque centrale européenne (BCE) a par exemple été réduit de moitié en janvier 2018, passant de 60 milliards d’euros par mois à 30 milliards d’euros.

Pour de nombreux observateurs, l’un des principaux chantiers est celui de la formation et de l’apprentissage. Investir dans ce domaine apparaît comme une priorité car de nombreux postes demeurent vacants en Europe en raison d’un manque de compétences dans certains métiers du numérique, de l’industrie et du bâtiment. Une “sous-utilisation de la main d’œuvre” , pour reprendre les mots de Pierre Moscovici, responsable pour partie du niveau du chômage.

Et outre un accroissement des qualifications professionnelles, une hausse des salaires est également souhaitée par la Commission européenne, afin de soutenir la consommation. La croissance européenne ne profite en effet que modérément aux travailleurs dont le niveau de rémunération reste stable, engendrant d’ailleurs un taux d’inflation de seulement 1,5% pour l’année 2017. Un niveau jugé ni “suffisant” ni “durable” par Mario Draghi, président de la BCE.

A l’heure où les institutions et pays européens ont pour ambition de faire de l’Union un “triple A social” et essaient de rendre les économies plus “inclusives” , comme l’a encore répété Valdis Dombrovskis en novembre, la hausse des salaires est appelée à devenir un sujet de préoccupation majeur. Particulièrement alors que les inégalités apparaissent comme un facteur déterminant du vote pour les partis populistes et que si elles restent à des niveaux inférieurs à ceux des Etats-Unis, de la Russie ou des pays émergents, elles sont en légère augmentation depuis les années 1980. En témoigne une étude élaborée notamment par l’économiste Thomas Piketty, indiquant qu’en 2016, les 10% les plus riches ont concentré 37% des revenus en Europe.

Les chiffres de la croissance en 2017 indiquent un important ralentissement de l’activité au Royaume-Uni. Le pays, qui s’était relevé de la crise de 2008 plus rapidement que la majeure partie de ses voisins, pâtit aujourd’hui du Brexit. D’après les prévisions de la Commission européenne, il fait même partie des rares Etats européens à connaître une croissance plus faible en 2017 qu’en 2016 (1,5% contre 1,8%). En 2019, année où le Brexit devrait être achevé, une croissance de 1,1% est à cet égard prévue.

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