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Copenhague : par-delà la question du financement global, des avancées concrètes déjà à l’œuvre

Jean-Michel Debrat est Directeur général adjoint de l’Agence Française de Développement (AFD). Alors que se tient à Copenhague la 15e Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques du 7 au 18 décembre, il revient sur l’un des enjeux majeurs de ces négociations internationales : le financement de la lutte contre le réchauffement climatique.

“A quelques jours de l’ouverture du sommet de Copenhague, les prévisions vont bon train sur un “échec annoncé” des négociations. Face aux craintes suscitées par un évènement qui se doit d’être à la mesure des enjeux, examinons plutôt les avancées concrètes sur lesquelles les décideurs peuvent d’ores-et-déjà s’appuyer.

“L’Europe, qui a par ailleurs été la première puissance à se fixer d’ambitieux objectifs pour elle-même, a chiffré l’effort nécessaire à 100 milliards d’euros par an d’ici 2020”

Au rang des sujets brûlants, le financement de la lutte contre le réchauffement climatique. Alors qu’au Nord il est présenté comme une “dépense” , il traduit en réalité les investissements nécessaires à la recherche de modes de développement et de croissance durables pour tous.

Si le Nord se doit de reconvertir ses appareils de production dans le but de réduire ses émissions et d’augmenter son efficacité, le Sud doit quant à lui concevoir une croissance qui néanmoins participe à l’effort global d’atténuation.

Et un autre défi le concerne au premier chef : celui de son adaptation aux effets du dérèglement climatique. Elévation du niveau des mers, menaces sur l’agriculture, épuisement des ressources naturelles : les pays en développement sont, déjà, les plus durement touchés.

Or pays du Nord et du Sud ne sont pas sur un pied d’égalité face à ces défis : c’est ici que le financement devient un enjeu de relations internationales.

Car les besoins financiers des pays en développement sont considérables : l’Europe, qui a par ailleurs été la première puissance à se fixer d’ambitieux objectifs pour elle-même, a chiffré l’effort nécessaire à 100 milliards d’euros par an d’ici 2020 - environ autant que les montants de l’Aide Publique au Développement.

Parallèlement, la France souligne que pour le seul continent africain, c’est 400 milliards d’euros qu’il est nécessaire de mobiliser dans les vingt prochaines années.

Mais le grand débat des engagements chiffrés ne doit cependant pas dissimuler celui, d’apparence plus technique, de la mise en œuvre de ces financements. S’agissant de réorienter l’ensemble de l’économie mondiale dans un sens plus durable, c’est la totalité des acteurs politiques et financiers, privés comme publics, qui sont concernés ; et tous les outils de financement qui doivent être mobilisés.

La vraie question est donc de définir l’architecture financière internationale dont le monde a besoin pour lutter contre le réchauffement climatique. Mais comme souvent lorsqu’elle est confrontée à un défi global, la communauté internationale est tentée de créer une nouvelle structure financière ad hoc.

“La vraie question est donc de définir l’architecture financière internationale dont le monde a besoin pour lutter contre le réchauffement climatique”
Un fonds mondial dédié au climat répondrait en effet à un double impératif de solidarité (reflétant la générosité mondiale face à un problème certes commun mais devant lequel nous ne sommes pas égaux) et d’organisation (constituant le lieu de production de normes communes).

Toutefois si la création d’un tel fonds était retenue, des écueils devraient être évités. En particulier celui de céder au “gigantisme” d’un fonds dirigé par un “comité central de la politique mondiale du climat”…

Une option qui laisserait bien peu de place à la flexibilité et aux collaborations entre acteurs financiers ; et constituerait une nouvelle forme de domination du monde par quelques institutions ou grands Etats.

Le risque est donc d’apporter de fausses solutions à un vrai problème. Or les réponses les plus rapides et efficaces à la lutte contre le réchauffement climatique résident non pas dans l’idéologie mais dans le pragmatisme.

Car derrière les financements évoqués se trouvent des réalités territoriales concrètes : des politiques nationales de production d’énergie, d’efficacité énergétique, de transport, d’aménagement urbain, forestier, etc.
“Qui sait que la KfW allemande, l’AFD française et la JICA japonaise représentent 20% de l’aide publique globale et 80% de l’aide bilatérale sur le climat ? Qui sait que l’Europe a su définir des mécanismes efficaces de cofinancement entre la Commission, la Banque Européenne d’Investissement et les Etats membres permettant de mettre sur la table des volumes de financement crédibles ?


De multiples politiques et projets locaux convergent ainsi vers les objectifs mondiaux.

Les solutions concrètes ne manquent donc pas pour s’atteler au défi du changement climatique ; et bon nombre de pays du Sud sont d’ores et déjà passés à l’action. Ainsi les “plans climat” développés par le Mexique, l’Indonésie ou le Kenya sont des avancées tangibles sur la voie des grands objectifs qui seront chiffrés à Copenhague.

Ces initiatives seront accompagnées et financées par les institutions financières existantes- bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux, banques régionales de développement ou institutions des Nations Unies, prêtes à prendre le relais des négociations sur le terrain.

Ces dernières ont acquis depuis plusieurs décennies une expérience et une pratique diversifiée sur lesquels il est indispensable de s’appuyer pour obtenir des résultats rapides.

Qui sait que la KfW allemande, l’AFD française et la JICA japonaise représentent 20% de l’aide publique globale et 80% de l’aide bilatérale sur le climat ? Qui sait que l’Europe a su définir des mécanismes efficaces de cofinancement entre la Commission, la Banque Européenne d’Investissement et les Etats membres permettant de mettre sur la table des volumes de financement crédibles ?

L’ampleur des défis à relever et le caractère massif des financements à mettre en œuvre plaident pour une mobilisation générale de l’ensemble des acteurs territoriaux, économiques et financiers, en particulier le secteur privé qui joue un rôle indispensable. La communauté internationale pourrait efficacement tirer partie de la valeur-ajoutée de chacun de ces acteurs.

Par-delà les montants, les négociateurs de Copenhague seraient donc avisés de se pencher sur les mécanismes de coordination et de mise en œuvre des financements. En privilégiant une approche à la fois systémique et pragmatique, et en capitalisant sur les savoirs-faires et les projets-pilotes de toute nature, ils pourraient utilement apaiser les craintes et faire de Copenhague le succès auquel peu s’attendent” . 

En savoir plus

L’Agence Française de Développement

Dossier spécial Copenhague

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