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Brexique : le lexique du Brexit

Fait inédit dans l’histoire de la construction européenne, le Brexit a entraîné l’utilisation de nombreux mots ou expressions créés de toutes pièces ou peu employés auparavant. De quoi ajouter de la complexité à une situation qui n’en manque pourtant pas ! Toute l’Europe publie un court “brexique”, afin que les termes du débat n’aient plus aucun secret pour vous.

Brexit - Crédits : Artystarty / iStock
Brexit - Crédits : Artystarty / iStock

Brexit

Contraction de “British” et “exit” , ce mot désigne la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Celle-ci a été approuvée le 23 juin 2016 par 51,9% des Britanniques prenant part au référendum lancé par le Premier ministre David Cameron.

Après des mois d’affrontement entre les partisans du “Remain” (rester) et du “Leave” (quitter), ce vote entraîne la démission de M. Cameron, auquel succède Theresa May, également issue du Parti conservateur.

L’article 50 du traité sur l’Union européenne, qui permet à un Etat membre d’en sortir, est activé le 29 mars 2017. Il est alors prévu que le retrait du Royaume-Uni intervienne le 29 mars 2019 à minuit.

Article 50

Sans lui, le Brexit n’aurait peut-être jamais eu lieu ! Introduit le 13 décembre 2007 par le traité de Lisbonne, il permet à un Etat membre de quitter l’UE. Le pays désireux de sortir de l’Union doit simplement le faire savoir au Conseil européen. Une fois activé, l’article 50 laisse un délai de deux ans à l’Etat membre pour négocier un accord de sortie avec l’UE, lequel déterminera sa future relation avec cette dernière. Ce délai peut être prolongé à la demande de l’Etat concerné, avec l’accord unanime du Conseil européen.

Fait inédit, le Royaume-Uni a activé l’article 50 le 29 mars 2017. Près de deux ans après, n’ayant toujours pas réussi à s’entendre avec les Européens sur les modalités de son départ, il pourrait demander à bénéficier d’une extension du délai de deux ans prévu par les traités. Si les Etats membres refusaient, le Royaume-Uni sortirait de manière “sèche” de l’UE. Cette possibilité qualifiée de no deal (voir plus bas) est majoritairement considérée comme catastrophique de part et d’autre.

Accord de sortie

Un accord de sortie a été formalisé entre le gouvernement britannique et Bruxelles en novembre 2018. S’il était ratifié, il éviterait un divorce brutal le 29 mars à minuit : une période de transition serait mise en place du 30 mars 2019 au 31 décembre 2020, afin de laisser le temps aux deux parties d’organiser leurs futures relations.

Cet accord a toutefois été rejeté massivement par le Parlement britannique le 15 janvier 2019. La Première ministre Theresa May n’est pas parvenue à convaincre les élus de son propre camp de valider un point particulièrement délicat : la question de la frontière irlandaise et du “backstop” , auquel s’opposent les Brexiters et les députés unionistes nord-irlandais.

Ces derniers ont soutenu, le 29 janvier 2019, un amendement conservateur visant à réclamer des “mesures alternatives” à ce filet de sécurité dans l’accord de sortie, sans quoi il ne serait pas validé par le Parlement britannique. Mais au regard des difficultés de conciliation entre Européens et Britanniques, la renégociation ne s’annonce pas aisée. A deux mois du Brexit, un divorce brutal ou un report de la date de sortie sont finalement tout aussi probables.

No deal

L’hypothèse du “no deal” désigne la sortie brutale du Royaume-Uni de l’UE le 29 mars 2019 : “sans accord” . Le pays se retrouverait alors dans une situation similaire aux autres États n’appartenant pas à l’UE, et uniquement lié à cette dernière par les traités internationaux (OMC…).

Tant que le Parlement britannique ne valide pas l’accord de retrait, cette possibilité est jugée tout à fait envisageable. Qualifié de “pire scénario” par Theresa May, le “no deal” aurait de lourdes conséquences pour les deux parties.

Du point de vue du commerce, les barrières douanières prévues par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) seraient immédiatement rétablies. Cela affecterait en premier lieu l’économie britannique, qui aurait bien plus de mal à exporter vers l’UE qu’auparavant. Du côté des importations, les prix de certains biens de consommation augmenteraient, tandis que d’autres pourraient se retrouver en rupture de stock.

Les résidents britanniques installés dans l’UE, de même que les citoyens européens vivant au Royaume-Uni, perdraient quant à eux, du jour au lendemain, tous les avantages et la protection juridique dont ils disposent actuellement au nom du principe de libre circulation.

Enfin, point particulièrement sensible tant du point de vue des échanges qu’au regard de leur histoire récente, la frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande serait rétablie.

Période de transition

Cette expression désigne la période qui devrait suivre la sortie effective du Royaume-Uni de l’UE, prévue le 29 mars 2019 à minuit, si l’accord de sortie est adopté par les parlementaires britanniques.

Selon un autre accord de principe trouvé par les Vingt-Huit dès janvier 2018, cette période de vingt-et-un mois, qui s’achèverait le 31 décembre 2020, laisserait le temps aux Britanniques et aux Européens de préparer leur relation future.

Le Royaume-Uni demeurerait ainsi membre du marché unique de l’UE jusqu’en 2020. La libre circulation des biens, mais aussi des personnes, seraient par conséquent maintenues. Les citoyens européens s’installant au Royaume-Uni pendant cette période auraient donc les mêmes droits que ceux arrivés avant le Brexit.

En contrepartie, les Britanniques seraient tenus d’appliquer l’ensemble des lois européennes actuelles, de même que celles qui seraient adoptées pendant la période de transition, alors même qu’ils ne siègeraient plus dans les institutions et ne pourraient donc plus participer à leur élaboration.

Le Royaume-Uni a obtenu le droit d’entamer des négociations commerciales avec des États tiers (ce que les traités européens interdisent pour les États membres), mais des traités bilatéraux ne pourraient entrer en vigueur qu’à l’issue de la période de transition.

Toutefois, cet état transitoire pourrait ne jamais voir le jour si le “no deal” s’imposait (voir plus haut).

Backstop

Ce terme, traduit par “filet de sécurité” en français, correspond à la solution trouvée dans l’accord de sortie négocié entre les Européens et le gouvernement de Theresa May en ce qui concerne la frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande à l’issue du Brexit. Elle a pour but d’éviter de remettre en place une frontière physique entre les deux Irlande, tel que l’exige l’Accord du Vendredi saint, signé en 1998 pour mettre fin à trente ans d’un sanglant conflit entre unionistes et indépendantistes nord-irlandais.

Le “backstop” consisterait à maintenir l’ensemble du Royaume-Uni dans une union douanière avec l’UE, tant qu’aucune alternative satisfaisante n’aurait été trouvée. Concrètement, il s’agirait de maintenir en Irlande du Nord un ensemble limité de règles liées au marché unique, et ce de manière plus poussée qu’au Royaume-Uni. Une option qui préserverait la libre circulation des biens entre les deux Irlande (le Royaume-Uni devrait également appliquer à ses frontières extérieures les tarifs douaniers européens, et ne pourrait pas mettre en œuvre d’accords commerciaux bilatéraux avec les pays tiers). A défaut d’un accord commercial alternatif signé entre l’UE et les Britanniques avant la fin de la période de transition, ce “filet de sécurité” éviterait donc le rétablissement d’une frontière dure en Irlande.

Mais beaucoup au sein de la majorité de Theresa May s’y opposent, arguant que cette solution - censée être provisoire - pourrait conduire à un maintien de liens profonds entre l’UE et le Royaume-Uni pendant de nombreuses années, ou refusant que l’Irlande du Nord soit traitée différemment que le reste du royaume (les règles européennes qu’elle aurait à respecter seraient plus poussées que celles qui continueraient de s’appliquer dans le reste du pays). Ces députés estiment même qu’un “no deal” serait préférable à cette solution, sur laquelle l’UE refuse pourtant de transiger.

Union douanière / Marché unique

Le marché unique européen, mis en place depuis 1986, englobe l’ensemble des Etats membres de l’UE, y compris le Royaume-Uni, et s’articule autour des “quatre libertés” : libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes. En son sein, l’union douanière de l’Union européenne garantit l’absence de droits de douane entre Etats membres et un tarif douanier commun aux frontières de l’UE.

En vertu du “backstop” , le Royaume-Uni quitterait le marché unique et ne serait donc plus tenu d’appliquer la libre circulation des personnes. Mais il y conserverait un accès en étant maintenu dans un “territoire douanier unique” avec l’UE, qui lui permettrait au moins de préserver la libre circulation des biens. Il devrait en contrepartie appliquer à ses frontières les tarifs douaniers européens pour les pays tiers. Et il ne pourrait pas mettre en œuvre d’accords commerciaux bilatéraux avec eux.

Brexiters

Les Brexiters sont, au Royaume-Uni, les plus farouches partisans du retrait de leur pays de l’UE. Ils souhaitent une relation avec elle la plus limitée possible, essentiellement réduite aux échanges commerciaux. Une importante part des députés siégeant au sein de la majorité conservatrice de Theresa May au Parlement sont des Brexiters.

Parmi eux se trouvent notamment Boris Johnson, ministre des Affaires étrangères de juillet 2016 à juillet 2018, et David Davis, ministre chargé du Brexit à la même période, tous deux partisans d’un “Brexit dur” (“hard Brexit”). Ils ont démissionné en même temps du gouvernement, suivis par d’autres dans les mois suivants, en raison du Brexit trop doux (“soft Brexit”) qui se profilait selon eux.

Hard / Soft Brexit

Le “hard Brexit” désigne une sortie totale du Royaume-Uni des traités européens le 29 mars. Le pays n’aurait alors plus accès au marché unique et reprendrait totalement le contrôle de ses frontières, notamment en termes d’immigration. Cela laisserait aussi la possibilité aux Britanniques de négocier les accords commerciaux bilatéraux qu’ils souhaitent. C’est le Brexit souhaité par la plupart des Brexiters, qui se disent prêts en ce sens à affronter le “no deal” .

Le “soft Brexit” désigne quant à lui une sortie partielle du Royaume-Uni des traités européens. Le Royaume-Uni conserverait un accès total au marché unique mais devrait en échange garantir les “quatre libertés” , y compris donc la libre circulation des personnes. Cela établirait une relation “à la norvégienne” entre Européens et Britanniques, la Norvège appartenant à l’Espace économique européen et appliquant la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes avec les États membres de l’UE. Elle n’a cependant pas la possibilité d’influer sur les lois européennes, tout comme le Royaume-Uni si un “soft Brexit” était mis en place.

Passeport européen

Le “passeport européen” n’existe pas en tant que tel. Cela correspond simplement, pour une personne ou une entreprise, au fait d’être ressortissante d’un État membre de l’UE, ce qui lui donne un accès total au marché unique et lui permet donc de bénéficier des quatre libertés de circulation qui le caractérisent.

Au Royaume-Uni, la perte du “passeport européen” inquiète notamment le secteur financier. La City, principale place financière mondiale, est fortement interconnectée avec les places boursières européennes. Elle perdrait sa position privilégiée en cas de suppression de la libre circulation des capitaux avec l’UE (en cas de “hard Brexit”), ce qui fragiliserait considérablement sa compétitivité.

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