Une pluie de critiques
Dimitri Konovalov et Vadislav Kovalev, tous deux âgés de 25 ans, avaient été condamnés pour leur responsabilité supposée dans l’explosion du 11 avril 2011 à la station Oktiabrskaïa du métro de Minsk, respectivement pour “acte de terrorisme” et pour “complicité” . Cet attentat avait engendré quinze morts et cent-soixante blessés, soit l’attaque la plus meurtrière connue en Biélorussie depuis l’indépendance du pays en 1991.
L’Union européenne n’avait eu de cesse que de demander au gouvernement d’Alexandre Loukachenko de ne pas exécuter ces deux détenus, au nom de la protection de la dignité humaine. Le Conseil de l’Europe, par l’intermédiaire de son secrétaire général Thorbjørn Jagland, a déclaré qu’en “bafouant les droits de l’homme et les principes démocratiques, le gouvernement biélorusse isolait encore davantage son pays et son peuple du reste du monde” .
Catherine Ashton, haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a quant à elle partagé sa compassion pour les familles des victimes mais a rappelé que les deux condamnés n’avaient pas eu la possibilité de bénéficier d’un procès équitable et du droit de se défendre. Si Dimitri Konovalov a reconnu sa responsabilité, Vadislav Kovalev a toujours clamé son innocence.
La possibilité d’un complot visant à justifier la répression
De fait, toute la lumière n’a pas été faite sur cet attentat du 11 avril 2011, et encore moins sur les noms des coupables ou sur les responsabilités respectives. Les observateurs internationaux dénoncent la rapidité de l’enquête, l’absence de mobile des condamnés ou encore le manque de preuves matérielles. Tout ceci porte donc à croire que le gouvernement biélorusse a souhaité mettre un voile sur la vérité de l’attentat, comme le pensent des organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme.
D’autre part, la thèse selon laquelle le gouvernement biélorusse lui-même aurait une part de responsabilité se voit renforcée par cette double exécution. Les défenseurs de cette théorie accusent les services de sécurité d’être à l’origine d’un complot visant à justifier la répression à l’encontre des ennemis politiques d’Alexandre Loukachenko. Ce dernier s’était d’ailleurs empressé de décrire l’attentat comme une tentative de déstabilisation du régime.
Le dialogue UE - Biélorussie dans l’impasse
Une chose est certaine : les relations entre la Biélorussie et l’Europe se trouvent considérablement dégradées. Le pays fait d’ores et déjà l’objet de sanctions en raison d’arrestations d’opposants au gouvernement, qui se sont multipliées depuis la réélection d’Alexandre Loukachenko en 2010. De nombreux journalistes et personnalités politiques de l’opposition se sont par exemple vus interdire de sortir du territoire, comme Stanislav Chouchkevitch, ancien chef de l’Etat, qui n’a pu quitter le pays pour se rendre en Lituanie, dimanche, jour de l’exécution.
Au fond, peut-être est-il possible de voir ici une réponse d’Alexandre Loukachenko aux contestations émanant de Bruxelles. Ces dernières semaines, les Etats membres de l’Union européenne ont rappelé leurs ambassadeurs présents à Minsk après que la délégation européenne ainsi que l’ambassadeur de Pologne en Biélorussie ont été forcés de quitter le pays. En outre, l’Union a refusé l’entrée à vingt-et-un Biélorusses travaillant pour le gouvernement. Ces manœuvres sont considérées par le gouvernement biélorusse comme des “pressions unilatérales rendant la normalisation des relations impossible” .
Economiquement, le pays est aujourd’hui dépendant de ses relations avec la Russie, seul interlocuteur à ne pas se prononcer contre Alexandre Loukachenko. A cet égard, Vladimir Poutine a déclaré “regretter les désaccords entre l’Europe et la Biélorussie” mais assurer que “cela n’affecterait pas ses propres relations avec Minsk” .