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Angela Merkel : “le nationalisme et l’égoïsme ne doivent plus avoir de prise en Europe”

Angela Merkel face au Parlement européen, le 13 novembre 2018 - Crédits : Mathieu Cugnot, Parlement européen
Angela Merkel face au Parlement européen, le 13 novembre 2018 - Crédits : Mathieu Cugnot, Parlement européen

Après 11 dirigeants européens dont Emmanuel Macron en avril, Angela Merkel est à son tour intervenue, mardi 13 novembre, devant le Parlement européen pour débattre de l’avenir de l’Europe. Un événement délicat pour la chancelière allemande, seulement deux semaines après l’annonce de son retrait de la vie politique allemande à l’issue de son quatrième mandat, qui s’achèvera au plus tard en 2021.

L’âme de l’Europe a été malmenée

Chaleureusement accueillie par la grande majorité des eurodéputés, présents en masse pour écouter et dialoguer avec celle qui dirige la première puissance économique européenne depuis 2005, Mme Merkel a prononcé un discours de 30 minutes à son image : solennel et sans emphase. Dans la lignée des commémorations de la Première Guerre mondiale, qui se sont achevées ce week-end à Compiègne (Oise) et Paris, la cheffe du gouvernement allemand a en effet largement axé son propos autour de l’impérieux besoin de “tolérance” et de “solidarité” , des “valeurs universelles” sans lesquelles aucune communauté ne peut fonctionner, mais qui sont aujourd’hui contestées sur le continent.

Depuis dix ans” , a ainsi fait valoir la chancelière, ce qui fait “l’âme” de l’Union européenne a été “malmené” par les “égoïsmes” et “nationalismes” . Crise des dettes, terrorisme, conflits armés aux portes de l’Europe, flux migratoires, révolution numérique, changement climatique ou encore Brexit : autant de facteurs de déstabilisation, a-t-elle énuméré, auxquels s’ajoutent les atteintes, internes à l’Union, contre l’Etat de droit ou la liberté de la presse. Sans toutefois nommer Viktor Orban, son partenaire au sein du Parti populaire européen (PPE, droite), Mme Merkel a tenu à rappeler qu’en se comportant de la sorte les gouvernements ne portent pas seulement préjudice à leur propre pays, mais à l’UE toute entière.

Annonces pour la politique étrangère et de défense

Dans ce contexte heurté, il est par conséquent indispensable de “rester unis en tant qu’Européens” et illusoire de “penser réussir seuls sur la scène internationale” . Nous ne pouvons plus “compter sur les autres” , a martelé Angela Merkel, faisant une allusion limpide au désengagement international des Etats-Unis de Donald Trump. Pour donner à l’Europe les moyens d’agir, la chancelière a dès lors proposé de renoncer à la règle de l’unanimité en matière de politique étrangère, de créer un “Conseil de sécurité européen” ainsi qu’une “capacité d’intervention européenne” avant, à terme, de pouvoir mettre sur pied une véritable “armée européenne” . Une ambition affirmée une semaine avant par Emmanuel Macron, et qualifiée alors “d’insultante” par Donald Trump.

Ces annonces fortes de la cheffe du gouvernement allemand, très largement applaudies par l’hémicycle alors qu’un député d’extrême droite s’évertuait au même moment à huer chaque parole de la chancelière, auront en définitive été les seules du discours d’Angela Merkel. Car hormis également ses excuses sur sa gestion unilatérale de la crise migratoire en 2015 - l’Allemagne “n’a pas compris qu’il s’agissait d’une tâche européenne” - sa venue au Parlement européen n’aura pas fondamentalement fait avancer les grands sujets en cours.

Balayant en quelques phrases les négociations sur l’union bancaire ou l’établissement d’un budget de la zone euro comme le souhaite la France, la chancelière allemande s’est contentée de rappeler l’engagement de son pays à faire aboutir ces dossiers. De la même manière, s’agissant de la taxe GAFA, ardemment défendue par Paris et le ministre français de l’Economie Bruno Le Maire, Mme Merkel n’a évoqué aucune date quant à son adoption, préférant insister sur la nécessité de trouver un accord international, et non seulement européen.

Je vous souhaite beaucoup de succès

Une certaine frilosité qui explique au moins en partie la nature des réponses de Jean-Claude Juncker, président de la Commission, ou encore d’Udo Bullmann et Guy Verhofstadt, respectivement chefs des sociaux-démocrates et des libéraux au Parlement européen. Prévenants et respectueux à l’égard d’une personnalité incontournable dont le sentiment proeuropéen n’est pas mis en doute, les trois dirigeants se sont en effet succédé pour l’inviter à utiliser le temps qu’il lui reste à la tête de l’Allemagne pour encore renforcer son action européenne.

Pour Udo Bullmann, membre du Parti social-démocrate allemand, Angela Merkel doit en effet faire plus pour que le Fonds monétaire européen aboutisse ou que l’Union économique et monétaire soit approfondie. Offensif à l’égard du PPE à l’approche des élections européennes de 2019, le chef des socialistes et démocrates a également demandé au principal parti de droite européen de clarifier sa position à l’égard de Viktor Orban. Une référence directe à l’ambiguïté entretenue par Manfred Weber, chef du PPE au Parlement européen et fraîchement investi comme chef de file (Spitzenkandidat) de son camp pour les élections européennes.

Se référant à l’histoire récente de l’Allemagne, Guy Verhofstadt, qui devrait lui faire campagne aux côtés d’Emmanuel Macron, a pour sa part regretté que “l’énergie” consacrée à la Réunification au tournant des années 1990 ait entraîné une baisse de “détermination” à Berlin pour œuvrer à toujours davantage d’intégration européenne. “Nous avons vu votre courage lors de la crise migratoire” , a interpelé M. Verhofstadt. Emmanuel Macron aussi est un “Européen convaincu (…) : à vous deux, joignez vos forces pour raviver le rêve européen : je vous souhaite beaucoup de succès” , a-t-il conclu, avec sa verve habituelle.

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