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Analyse : une abstention massive, qui profite à la droite, aux écologistes et aux partis identitaires

A l’échelle européenne, ces élections confirment la prépondérance des partis de droite, qui accentuent leur avance sur des sociaux-démocrates à la peine. Les partis écologistes et les formations identitaires voient leur présence s’accroître dans le nouvel hémicycle. Mais ces résultats ne doivent pas faire oublier que l’abstention continue de progresser.

La démocratie européenne à la peine

C’est la première fois que les citoyens des vingt-sept pays membres de l’Union européenne étaient appelés à désigner, au même moment, leurs représentants au Parlement européen. Pour ce scrutin, l’objectif premier des institutions européennes était d’enrayer une abstention en hausse croissante depuis trente ans. Pari raté : avec plus de 56 % d’abstention dans l’ensemble de l’Union (2 points de plus qu’en 2004), ce Parlement est le plus mal élu depuis que les députés sont désignés au suffrage universel direct.

Une si faible mobilisation pèsera sûrement sur la légitimité d’une assemblée qui, dans la lettre, s’affirme pourtant comme une institution aux pouvoirs croissants et qui, dans l’esprit, a repris le flambeau de l’intégration européenne à une Commission moins entreprenante que par le passé.

Deux interprétations peuvent être avancées pour expliquer ce résultat décevant pour la démocratie européenne : celui-ci témoignerait soit d’un regain d’euroscepticisme dans l’UE, soit d’un désintérêt pour la désignation des députés européens. Il faut sans doute mettre ce phénomène en rapport avec la progression générale de l’abstention en Europe, tous scrutins confondus, symptomatique d’une crise plus profonde de la démocratie représentative.

Les conservateurs, grands bénéficiaires de la crise économique

A quoi ressemblera le prochain Parlement ?



Selon les estimations du Parlement européen en milieu de journée, le PPE-DE reste majoritaire avec 265 sièges, suivi du PSE (162 sièges), de l’ADLE (80 sièges) et des Verts (51 sièges).

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La crise du capitalisme qui a servi de toile de fond à la campagne n’aura pas profité aux sociaux-démocrates. En dépit d’un programme commun, le Manifesto, porteur d’une relance économique et sociale à l’échelle européenne, les formations affiliées au PSE enregistrent des scores médiocres (particulièrement en France, en Espagne et au Royaume-Uni). S’il risque de perdre une cinquantaine de sièges, le PSE restera néanmoins le deuxième groupe du Parlement avec près de 160 députés.

Les conservateurs s’affirment comme la première force politique à l’échelle du continent. En Allemagne, en Italie et en France, la droite de gouvernement est arrivée assez largement en tête, échappant au vote sanction qui frappe souvent les partis au pouvoir lors d’élections intermédiaires. En Espagne et au Royaume-Uni, l’opposition de droite a également réalisé les meilleurs scores. Dans les pays de la “nouvelle Europe” , conservateurs, libéraux et partis de centre droit sont en tête quasiment partout.

En dépit de la scission annoncée des conservateurs britanniques (qui souhaitent créer un nouveau groupe eurosceptique avec l’aide de députés tchèques et polonais), le PPE restera vraisemblablement la première force politique du prochain Parlement. Est-ce à dire que la reconduction de José Manuel Barroso à la tête de la Commission est assurée ?

Si le Président sortant, soutenu par la quasi-unanimité des gouvernements européens, bénéficie de l’élan que lui confère la première place de son camp, il lui faudra s’assurer du soutien de la majorité du Parlement européen s’il veut être réinvesti (majorité simple des présents selon les règles du Traité de Nice, majorité absolue avec le Traité de Lisbonne, qui pourrait être adopté cet automne). Comme le PPE n’aura pas la majorité à lui seul, la constitution d’un front anti-Barroso est théoriquement possible. Nul doute que certains vont y travailler d’arrache-pied dans les prochains mois.

La percée des écologistes : épiphénomène ou tendance lourde ?

En France, les listes Europe Ecologie ont créé l’événement en se hissant à hauteur du Parti socialiste, avec plus de 15 % des voix. Si elle est loin d’être aussi spectaculaire dans le reste de l’Europe, la montée des partis écologistes est l’un des phénomènes marquants de cette élection.

Les enquêtes d’opinion conduites à l’échelle européenne au cours des dernières années ont montré l’importance croissante chez les citoyens des préoccupations liées à l’environnement. Alors que la plupart des formations intègrent désormais ces préoccupations dans leur offre politique, les partis qui ont mis ces thématiques au cœur de leur programme semblent bénéficier d’une prime auprès des électeurs. Les prochains scrutins dans l’ensemble des Etats membres diront s’il s’agit d’un succès conjoncturel ou d’une tendance plus profonde des sociétés européennes.

Conséquence de cette percée : le groupe des Verts au Parlement européen devrait obtenir une dizaine de sièges supplémentaires dans la prochaine assemblée européenne et en devenir le quatrième groupe, derrière l’alliance des libéraux et des démocrates. Une position non négligeable, à l’heure où l’Union européenne s’apprête à discuter de mesures supplémentaires sur le plan climatique dans le cadre de la conférence de Copenhague.

Succès locaux des partis identitaires et nationalistes

Sur le plan européen, ces élections auront aussi bénéficié à des formations qui mettent en avant auprès des électeurs la défense de leur identité.

Défense d’une “identité européenne” , fortement teintée d’anti-islamisme pour le FPÖ autrichien et le PVV de Geert Wilders aux Pays Bas, qui réalisent tous deux de très bons scores. Défense des spécificités nationales pour le parti britannique UKIP (qui milite pour une sortie de l’Union européenne), pour le SPS slovaque, le Jobbik hongrois, pour le Parti de la Grande Roumanie. Dans les pays d’Europe centrale et orientale, la montée de formations qui, pour certaines d’entre elles, professent des idées explicitement xénophobes, intervient dans une période de crise économique qui fait craindre un réveil des tensions interethniques et des irrédentismes.

Si la structuration de ces formations au niveau européen est toujours problématique (difficile pour des nationalistes de se constituer en groupe cohérent au PE), leur voix portera davantage dans la prochaine mandature.

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