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ACTA : bientôt la fin des négociations ?

Le 11e ’round’ de négociations sur le traité ACTA vient de se terminer à Tokyo et semble mettre fin aux discussions sur ce texte. Il doit maintenant être signé d’ici la fin de l’année. Où en est-on ?

D’après un négociateur européen, “il n’y a rien qui nous oblige à aller plus loin que la réglementation européenne en vigueur actuellement” . Cela signifierait que si la France a une législation plus dure sur la question des auteurs de téléchargements illégaux avec l’Hadopi, les autres pays européens n’ont aucune obligation d’aller dans le même sens. Cependant, l’adoption du rapport Gallo au Parlement européen le 22 septembre montre que le sujet pourrait arriver au niveau européen.

Le traité ACTA donnerait après sa ratification une base légale pour légiférer afin d’établir une “riposte graduée” et pourquoi pas le filtrage du net par les fournisseurs d’accès internet. En effet, faculté est donnée aux autorités compétentes de pouvoir ordonner à ces fournisseurs de livrer aux ayants droits l’identité de leurs abonnés qui sont suspectés de piratage.

Attention : deux limites sont apportées. La première est de ne pas “créer de barrière à des activités légitimes” . La deuxième, plus importante, est de respecter “les droits fondamentaux tels que la liberté d’expression, le droit à un procès équitable et la vie privée” . Toute législation votée devra donc permettre aux internautes suspectés de pouvoir se défendre devant un juge.

Qu’est-ce que l’ACTA ?

L’Accord commercial anti-contrefaçon, ou Anti-Counterfeiting Trade Agreement, est plus connu sous le sigle ACTA. C’est un traité international actuellement en finalisation de négociations. Il repose sur la possibilité d’établir des règles fondées sur le droit de la propriété intellectuelle, touchant Internet et le commerce de produits protégés par ce droit.

Ce texte est négocié au niveau international par plusieurs Etats, dont l’Union européenne. Malheureusement, les négociations de ce traité ont été totalement opaques. Du fait de fuites, une mobilisation “anti-ACTA” est apparue, d’abord sur Internet puis au niveau politique.

Ce traité est très important car le droit de la propriété intellectuelle touche d’autres domaines que simplement la lutte contre les échanges illicites de films, musique ou autre productions culturelles sur Internet. C’est par exemple le cas du secteur de la santé avec les licences des médicaments. Avec ACTA, certaines ONG et certaines personnalités politiques estiment qu’un amalgame serait possible entre faux médicaments et médicaments génériques sans licence. Il tend de fait à considérer tout médicament qui ne respecte pas les brevets comme une contrefaçon. Pour autant, le non-respect des brevets n’indique en rien qu’un médicament est contrefait ou dangereux.

Ainsi, les détenteurs des brevets risquent de faire bloquer par les douaniers les médicaments génériques en transit dans leur pays en attendant le paiement d’une taxe par exemple. Or, les médicaments génériques sont nécessaires dans certains pays du Sud pour sauver des millions de vies.

C’est pour cette raison que, dans le cadre des négociations sur le commerce mondial à Doha en 2001, certains pays avaient imposé une licence obligatoire pour certains médicaments génériques. Mais ceci était au désavantage des grands groupes pharmaceutiques. Ils comptaient sur l’argent rapporté par les brevets pour compenser l’investissement mis dans la recherche pour trouver ce médicament. ACTA risque donc de constituer un retour en arrière sur cette question de santé publique.

Des réactions plutôt négatives du côté politique et associatif

Certaines ONG, sites Internet ou personnalités politiques sont extrêmement mobilisés contre ce texte depuis le début des fuites apparues à son sujet malgré l’opacité des négociations. C’est le cas de Sandrine Bélier, députée d’Europe Ecologie qui sur son blog appelle à “une mobilisation contre une contrefaçon de la démocratie” . L’élue de la région Nord-Est reproche notamment au commissaire européen Karel de Gucht d’avoir imposé une totale confidentialité à la commission parlementaire INTA (commerce international), ce qui a empêché la diffusion de l’information auprès de leurs autres collègues.

Réagissez en twittant vos eurodéputés sur Tweet your MEP sur ACTA ! Notamment Sandrine Bélier et Françoise Castex citées dans cet article.

Le député Kader Arif (PSE) rappelle dans un communiqué de presse que le Parlement européen devra voter le traité pour qu’il soit ratifié, ce qui est une nouvelle obligation issue du traité de Lisbonne. Pour lui, “les sujets de préoccupation sont nombreux : responsabilité des fournisseurs d’accès à internet, accès aux médicaments, liberté des internautes, protection des indications géographiques qui aujourd’hui n’est pas prévue par le texte” . Sa collègue Françoise Castex (PSE) appelle “le Conseil et la Commission à ne procéder à aucune application temporaire de l’accord avant que le Parlement européen n’ait pu exprimer son consentement ou non sur ce texte” .

La principale association mobilisée contre ce texte, La Quadrature du Net, estime que “la publication de ce texte ne doit pas créer l’illusion de transparence, puisque tout le processus de négociations s’est déroulé à huis-clos. En outre, la version actuelle de l’ACTA pourrait profondément altérer l’écosystème d’Internet en transformant les intermédiaires techniques en police privée du copyright” .

Malgré la publication du texte, les débats promettent encore d’être nombreux avant son application concrète dans les différents droits nationaux de l’Union européenne.

En savoir plus

le texte du traité ACTA sur le blog de Sandrine Bélier

ACTA : le Parlement européen prêt à montrer les crocs - Touteleurope.eu

Sandrine Bélier : “la protection des droits des artistes ne doit pas être un motif d’atteinte aux droits des internautes” - Touteleurope.eu

le dossier ACTA réalisé par la Quadrature du Net

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