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5 questions sur les quotas laitiers

Depuis le 22 août, les producteurs laitiers manifestent devant le siège du groupe Lactalis, accusé de ne pas les payer suffisamment. Le 2 septembre, les ministres européens se retrouvent à Chambord (Loir-et-Cher) pour discuter de la crise survenue depuis la fin des quotas laitiers en 2015, et plus généralement de l’avenir de la Politique agricole commune (PAC). Quel impact a eu la suppression des quotas sur la situation actuelle des éleveurs ? Le tour du sujet en 5 questions.

5 questions sur les quotas laitiers

Les quotas laitiers : qu’est-ce que c’est ?

C’est en 1984 qu’a été mis en place le système des quotas laitiers au niveau européen. Outil de la politique agricole commune (PAC), son objectif était de réguler le prix du lait, notamment pour permettre aux éleveurs de vendre leur production à un prix qui les satisfaisait.

Ces quotas ont été instaurés 2 ans seulement après la mise en place de la PAC, pour faire face à une crise de surproduction européenne. A l’époque, le mécanisme des prix garantis permettait à un éleveur de vendre sa production à un prix minimum fixé par la Communauté européenne (l’ancien nom de l’Union européenne), quelle que soit la quantité produite. S’il ne parvenait pas à en écouler la totalité sur le marché, la Communauté lui rachetait l’excédent.

 

Un mécanisme qui a rempli son objectif, mais au prix de dépenses européennes qui se sont rapidement révélées incontrôlables. D’où la décision d’instaurer des quotas pour limiter la production laitière.

Comment fonctionnaient-ils ?

A partir de 1984 et jusqu’en 2015, la Communauté puis l’Union européenne a instauré chaque année une limite de production laitière par Etat membre. Celle-ci était répartie ensuite entre producteurs selon une organisation propre à chaque pays. En cas de dépassement, les Etats devaient payer une pénalité. Avec la mise en place de ces quotas laitiers, le budget de la Communauté européenne dédié au rachat des excédents de production a pu ainsi diminuer.

Par la suite, c’est le système des prix garantis lui-même qui a été progressivement supprimé. Le prix de vente des productions agricoles se fixait non plus par une décision européenne mais par le marché, en fonction de l’offre et de la demande. Plus l’offre était importante (à demande constante), plus les prix de la production diminuaient. Mais concernant le lait, le système des quotas a permis d’éviter que la production européenne ne s’envole.

Limités dans leur production, les éleveurs ont pu compenser une partie de leur manque à gagner grâce aux subventions de la PAC (les aides directes, toujours en vigueur aujourd’hui).

Pourquoi les quotas ont-ils été supprimés ?

L’instauration des quotas laitiers avait été décidée pour une période de 5 ans. Elle aurait donc dû prendre fin en 1989. Mais, sous l’impulsion de la France en particulier, son abrogation a été plusieurs fois repoussée. De 2009 à 2015, ils ont ainsi été augmentés de 1 % par an jusqu’à leur suppression définitive le 1er avril 2015.

Pour quelles raisons ? La Commission européenne souhaitait favoriser la compétitivité des produits laitiers pour répondre à une demande mondiale en augmentation. Notamment de la part de l’Asie (Chine) et de l’Afrique. L’idée première a donc été d’ouvrir le marché du lait à la concurrence pour favoriser les exportations européennes.

D’autre part, certains pays bénéficient particulièrement de cette ouverture : ainsi l’Allemagne, premier producteur européen, ou encore les Pays-Bas et l’Autriche. Pendant près de trente ans, ces trois pays ont régulièrement du payer des pénalités pour avoir dépassé leurs quotas laitiers…

Quelles conséquences a eu leur disparition ?

Conséquence prévisible de la fin des quotas laitiers : la production européenne s’est envolée et a entraîné une crise de surproduction, ainsi qu’une chute des prix de plus de 10%. Ainsi qu’une concurrence accrue entre Etats européens. En Allemagne par exemple, la taille des sociétés agricoles et le coût de la main d’oeuvre permet aux éleveurs de produire plus pour moins cher, ce qui pénalise les producteurs français. Ainsi, en juillet ces derniers ont vendu leur lait 27,7 centimes le litre en moyenne : un prix jugé inférieur au coût de production…

D’autres facteurs sont également entrés en jeu, comme l’embargo de la Russie, qui a de fait réduit la demande en produits laitiers.

Cette baisse des prix est ainsi pleinement ressentie par les éleveurs. D’où les manifestations depuis fin août devant le siège du groupe Lactalis, accusé de ne pas les payer suffisamment. L’industriel lui-même, l’un des plus importants en France, justifie la baisse de ses prix d’achat par “une crise de surproduction” . Reste à savoir si ses marges ne lui permettraient pas d’augmenter le prix d’achat aux producteurs. D’autant qu’en France, le volume de production est fixé par un contrat entre producteurs et laiteries.

Autre conséquence à prévoir sur le moyen terme : la concentration des productions laitières au sein de grandes entreprises et dans certaines régions, au détriment des producteurs de petite taille.

Quelles solutions ?

La réinstauration des quotas européens étant difficilement envisageable, d’autres réformes de la PAC sont-elles possibles pour faire face à la chute des prix du lait ? C’est ce sur quoi doivent notamment plancher les ministres de l’Agriculture lors d’une rencontre le 2 septembre à Chambord.

Plusieurs syndicats français souhaitent qu’un autre mécanisme européen soit mis en place en cas de crise de surproduction. En parallèle, d’autres tablent sur le regroupement des producteurs au sein d’organisations et sur la négociation des contrats avec les transformateurs.

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