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19 août 1989 : le pique-nique paneuropéen, une des premières brèches dans le Rideau de fer

Il y a 30 ans, le 19 août 1989, un “pique-nique paneuropéen” avait lieu à la frontière austro-hongroise. Un événement qui a permis à environ 600 Allemands de l’Est de fuir vers l’Allemagne de l’Ouest. Organisée par des opposants au régime communiste hongrois, cette manifestation marque l’une des premières brèches dans le Rideau de fer, dont le démantèlement par la Hongrie participera à la chute du mur de Berlin.

Monument commémorant le
Monument commémorant le “pique-nique paneuropéen” , par le sculpteur hongrois Miklós Melocco, près de Sopron en Hongrie

9 novembre 1989, le mur de Berlin s’effondre. Un fait historique qui marque la fin de la Guerre froide et du Rideau de fer, frontière idéologique et physique qui a déchiré pendant plus de 40 ans l’Europe entre l’Ouest et l’Est. En amont de cet événement majeur, la décision officielle de la Hongrie de démanteler, à partir du 2 mai 1989, “son” rideau de fer le long de la frontière avec l’Autriche, d’une longueur de 360 kilomètres.

C’est ce choix des dirigeants hongrois qui permettra, au cours d’un “pique-nique paneuropéen” organisé quelques mois plus tard, le 19 août, à environ 600 “touristes” est-allemands de franchir pour la première fois massivement la frontière entre l’Est et l’Ouest, et ainsi de rejoindre la RFA. Plusieurs dizaines de milliers suivront à partir du 11 septembre de la même année, lorsque la Hongrie ouvrira définitivement sa frontière avec l’Autriche. Cet exode contribuera à rendre la situation politique intenable pour le gouvernement est-allemand, rapidement ébranlé par d’importantes manifestations en octobre 1989.

L’une des revendications des manifestants est alors de pouvoir voyager librement, ce que le gouvernement est-allemand finit par accepter le 9 novembre, jour de la chute du mur de Berlin.

Le Rideau de fer hongrois, premier à tomber

Le 24 novembre 1988, le réformateur Miklós Németh, favorable à une libéralisation politique et économique du régime communiste, devient Premier ministre hongrois. Et très rapidement, au cours d’un voyage à Moscou en mars 1989, il fait part au dirigeant de l’URSS Mikhaïl Gorbatchev de son intention de démanteler la clôture à la frontière austro-hongroise, devenue obsolète et dont la reconstruction aurait coûté une fortune à la Hongrie. Ce dernier décide alors de le laisser maître du destin de son pays et de s’abstenir d’intervenir.

Dès le 2 mai, les Hongrois commencent donc à faire officiellement tomber le rideau de fer (Miklós Németh affirme en août 2019 à l’AFP qu’il ne s’agit que de la date où la décision a été rendue publique mais que le démantèlement avait commencé dès le mois d’avril). Le 27 juin, les ministres des Affaires étrangères autrichien Alois Mock et hongrois Gyula Horn coupent, dans un geste de communication à l’attention de la communauté internationale, les fils de la clôture face aux caméras de télévision non loin de Sopron, à la frontière entre leurs deux Etats.

Cette rencontre suscite l’espoir en Allemagne de l’Est : en juillet, des dizaines de milliers de citoyens est-allemands se rendent en Hongrie. Si le pays attire à l’époque tous les étés de nombreux touristes d’Allemagne de l’Est, cette année-là leur nombre est bien plus important. Car beaucoup d’entre eux espèrent profiter du démantèlement de la frontière pour passer en Autriche.

C’est à quelques kilomètres de l’endroit où s’étaient rencontrés les ministres des Affaires étrangères hongrois et autrichien que se tient le fameux “pique-nique paneuropéen” du 19 août. Autre événement symbolique, celui-ci va jouer, selon l’historienne Elisabeth du Réau, “un rôle important en catalysant l’espoir des citoyens est-allemands” . Il s’agit d’une initiative du mouvement paneuropéen, créé par Richard Coudenhove-Kalergi à Vienne en 1926 et dirigé à cette période par Otto de Habsbourg, organisée par des opposants hongrois et ayant pour objet la célébration de la réconciliation entre l’Autriche et la Hongrie.

C’est ainsi que les autorités du pays ouvrent, pour quelques heures, un poste frontière afin que les Autrichiens puissent rencontrer les Hongrois. Environ 600 Allemands de l’Est prennent alors l’initiative de franchir la frontière sans autorisation. Bien qu’ils aient encore l’ordre de tirer dans de pareils cas, les garde-frontières décident de ne pas le faire. Cette ouverture ne dure cependant pas plus de trois heures.

Trois semaines déterminantes

Fin août, on dénombre plusieurs dizaines de milliers de citoyens est-allemands (65 000 selon les estimations), dont le flux vers la Hongrie n’a cessé de s’amplifier depuis plusieurs mois, désirant passer à l’Ouest et bloqués dans le pays. Ces réfugiés se logent très précairement et campent pour beaucoup de manière sauvage. Le gouvernement hongrois n’a pas les moyens de les prendre en charge. Et celui-ci se retrouve très vite confronté à un problème sanitaire et humanitaire majeur, faisant craindre le pire si la situation venait à s’éterniser, notamment avec l’arrivée du froid. Une solution doit donc vite être trouvée.

Le 22 août, l’exécutif hongrois se met d’accord sur le principe de l’ouverture des frontières. Miklós Németh en informe le chancelier de la RFA Helmut Kohl, au château de Gymnich près de Bonn. A ce dernier lui demandant si Mikhaïl Gorbatchev approuve cette décision, le Premier ministre hongrois répond qu’il n’a pas besoin de lui demander la permission. Le chancelier allemand préfère cependant contacter directement le dirigeant soviétique, qui lui fait part de son accord tacite.

Le 10 septembre, la Hongrie annonce l’ouverture de sa frontière, laquelle prend effet le lendemain. A partir de cette date, les choses s’accélèrent. Deux mois plus tard, et alors que selon Miklós Németh “personne n’a pensé que ça irait aussi vite” , le mur de Berlin tombe.

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