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Biographie : Pierre Werner (1913-2002)

Pierre Werner figure au premier rang des inspirateurs de l’Union économique et monétaire à l’origine de l’euro. Cet humaniste et homme de culture s’est également engagé en faveur du rapprochement culturel des peuples d’Europe, une démarche jugée indissociable de la mise en oeuvre de mécanismes de solidarité monétaire.

Pierre Werner
Pierre Werner © Archives familiales Pierre Werner. Source : CVCE.eu by Uni.lu

Sa vie

Propos choisis

“J’étais convaincu profondément dès 1949 de la nécessité impérieuse pour nos pays d’Europe occidentale d’entreprendre la construction économique et politique de l’Europe unie. Les expériences de mon travail international, notamment la prise de conscience de la faiblesse et de la division de l’Europe, en faisaient presque une obligation intellectuelle.”
Itinéraires luxembourgeois et européens, in Mémoires 1945 à 1985, Editions Saint Paul, Luxembourg, Tome 1, 1992, p. 34-35.

“L’Euro constitue une grande nouveauté sur les marchés financiers internationaux. Il deviendra sans doute à la longue une monnaie de réserve, sans aspirer nécessairement à un monopole. (…) La monnaie unique à l’aube du 3ème millénaire est une grande performance de l’entente et de la concorde entre les hommes.”
In L’Euro, vision, histoire, réalité, Conférence de Pierre Werner lors de l’inauguration du Centre culturel de la Caja de Asturias, 24 octobre 1998.

Pierre Werner naît le 29 décembre 1913 à Saint André, près de Lille, de parents luxembourgeois.

Il étudie à la Faculté de droit de l’Université de Paris et à l’Ecole libre de Sciences politiques (1935-1938). Il s’engage dans plusieurs associations étudiantes aussi bien luxembourgeoises qu’internationales, telles que “Pax Romana” dont il devient le vice-président en 1937.

Après son doctorat de droit au Luxembourg en 1938, il travaille dans le secteur bancaire. A la fin de la guerre, Pierre Werner devient attaché au ministère des Finances luxembourgeois, pour devenir en 1945 commissaire au contrôle bancaire jusqu’en 1949 tout en exerçant conjointement la fonction de Conseiller du gouvernement.

Il est alors responsable de l’organisation du contrôle bancaire, du marché du crédit et de la collaboration financière internationale, ce qui lui permet de se familiariser avec deux institutions financières nouvellement créées, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale.

Militant au sein du Parti chrétien social (PCS), le parti démocrate-chrétien luxembourgeois, il devient ministre des Finances et de la Force armée en 1953, après le décès du président du gouvernement Pierre Dupong.

Pierre Werner occupe le poste de Président du gouvernement de façon ininterrompue de 1959 à 1974, puis de 1979 à 1984. Parallèlement, plusieurs portefeuilles ministériels, notamment celui du Ministère des Finances, lui permettent de jouer un rôle majeur dans la promotion du Luxembourg au rang de place financière internationale.

Le rapport Werner

Dans le sillage du sommet européen de La Haye de 1969 et du plan Barre de 1970, il se voit confier en mars de la même année, à la demande du Conseil de la Communauté économique européenne (CEE), la présidence d’un groupe spécial d’études.

Celui-ci est chargé de l’établissement d’un plan par étapes d’Union économique et monétaire (UEM). Le travail de ce groupe aboutit au “Rapport Werner” , présenté le 8 octobre 1970 à la Commission européenne et aux gouvernements des Etats membres.

Ce texte, très novateur, représente une avancée majeure dans le processus de construction européenne. Il prévoit la création d’une union économique et monétaire impliquant, en matière de politique financière, d’importants transferts de responsabilités des Etats vers la Communauté européenne.

Cette réalisation doit s’effectuer en deux temps :

  • pendant la première étape, qui doit s’étaler sur trois ans et débuter le 1er juin 1971, les orientations fondamentales de la politique économique et monétaire sont peu à peu définies en commun. Les relations de change entre les monnaies de la Communauté sont progressivement resserrées et l’ampleur des fluctuations entre les pays membres doit être contenue dans des limites relativement stables, ce qui suppose une solidarité des banques centrales nationales ;
  • le deuxième temps prévoit la poursuite des actions entreprises, mais de manière plus contraignante. Un Fonds européen de Coopération Monétaire (FECOM) est créé en 1973, destiné à assurer ultérieurement les interventions nécessaires sur le marché des changes pour maintenir la cohésion monétaire des pays membres. Un conseil, chargé de définir la politique macroéconomique des Six, est institué. Il est responsable devant un Parlement européen élu au suffrage universel et doté de pouvoirs accrus.

L’Union économique et monétaire

Prenant pour base le “Rapport Werner” , la Commission européenne élabore son propre plan, adopté par les Six le 22 mars 1971.

Ce programme, divisé en trois phases, doit conduire à une union économique et monétaire avant la fin de la décennie. En dépit de la volonté politique de ses membres, cet objectif, dont la création du Serpent monétaire l’année suivante est une des premières réalisations, est partiellement compromis par la crise monétaire mondiale du printemps 1971, avec la fin de la convertibilité du dollar qui remet gravement en cause le système monétaire né de Bretton-Woods, et le choc pétrolier de 1973.

Ce n’est qu’en 1978 qu’une certaine stabilisation plus générale se fait jour et que le fil de l’intégration est repris dans le Système Monétaire Européen (SME), basé sur la monnaie de compte du traité, l’ECU.

La démission du Parlement et la fin de sa carrière politique

En 1971, en hommage à son engagement européen de longue date, notamment aux côtés de Jean Monnet au sein du Comité pour les Etats-Unis d’Europe, Pierre Werner reçoit la médaille d’or Robert Schuman.

Il est élu au Parlement européen huit ans plus tard, en 1979. Cette même année, au Luxembourg, le PCS, passé dans l’opposition depuis 1974, remporte les élections législatives luxembourgeoises.

Pierre Werner démissionne alors de son mandat parlementaire pour retrouver la présidence du gouvernement. Il occupe ce poste jusqu’en 1984, tout en dirigeant le département des Affaires culturelles et des Cultes. Il règle ainsi les litiges linguistiques du duché en faisant voter une loi qui déclare le luxembourgeois langue officielle.

En juillet 1984, il quitte la scène politique pour se consacrer au projet de diffusion satellitaire de la télévision luxembourgeoise, en tant que président du Conseil d’Administration de la Société européenne des Satellites, de 1989 à 1996, dont il devient ensuite le président d’honneur.

En octobre 1998, il a reçu des mains du Prince Felipe d’Espagne le prix du Prince des Asturies “pour sa contribution au processus d’union monétaire qui a culminé dans la création de l’Euro.”

Pierre Werner est décédé le 24 juin 2002.

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