Un cadre “ambitieux mais réaliste”
“Ambitieux mais réaliste” . C’est ainsi que le président de la Commission européenne, M. Barroso, a décrit le nouveau paquet énergie-climat présenté le 22 janvier à Bruxelles. Le nouveau cadre stratégique pour 2030 cherche à harmoniser les besoins de l’industrie et les exigences environnementales. Pour le commissaire européen à l’Energie, M. Oettinger, avec ces mesures l’UE ira vers “une économie compétitive à faibles émissions de carbone, vers la stabilité des investissements et vers la sécurité de l’approvisionnement énergétique” . La commissaire à l’Environnement, Mme Hedegaard, a, quant à elle, exprimé sa satisfaction pour l’accord trouvé au sein de l’exécutif européen : “la Commission a prouvé à tous ceux qui prétendaient qu’elle ne présenterait aucune mesure ambitieuse aujourd’hui qu’ils avaient tort” .
Que prévoit donc le nouveau cadre 2030 ?
-40% d’émissions de gaz à effet de serre. Tout d’abord, un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). En 2008, lors de l’approbation de la stratégie 2020 sous la présidence française, l’UE s’était fixé un objectif de réduction 20% des GES par rapport à 1990. Aujourd’hui, alors que l’Union est sur la bonne voie pour atteindre ce résultat (-18% en 2012), la Commission revoit les chiffres à la hausse : -40% en 2030.
Un objectif ambitieux ? Oui, selon la commissaire à l’Environnement, “une réduction des émissions de 40% est l’objectif les plus efficace sur le plan des coûts pour l’UE et tient compte de notre responsabilité au niveau mondial” . Cet objectif est en effet “unilatérale” et “domestique” , c’est-à-dire que l’UE s’engage dans ce sens même si ses partenaires mondiaux ne devaient pas aller dans la même direction.
Pour y parvenir, la Commission compte continuer à utiliser le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) et prévoit une “réduction annuelle du ‘plafond’ des émissions des secteurs couverts par le SEQE” de 1,74% aujourd’hui à 2,2% après 2020. De même, pour les secteurs non couverts par le SEQE, “les émissions devraient être réduites de 30% par rapport au niveau 2005” , précise la Commission.
“Mis à part l’objectif de réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre, ces objectifs ne répondent pas aux mesures nécessaires et ne sont pas crédibles auprès de nos partenaires internationaux” , a déclaré le député allemand Matthias Groote (S&D), président de la commission de l’environnement.
“La proposition de la Commission européenne est une base de travail acceptable mais doit être renforcée. Il est décevant que nous ne puissions pas encore confirmer les nombreux bénéfices de l’efficacité énergétique” , a affirmé la Belge Anne Delvaux (PPE), co-rapporteur de la commission de l’environnement.
“L’UE a été toujours été très ambitieuse dans ses politiques et nous devons être sûrs de pouvoir diriger les conséquences de nos choix. Nous devons être pragmatiques lorsque nous établissons les perspectives à long terme” , a commenté l’Italienne Amalia Sartori (PPE), présidente de la commission de l’industrie et de l’énergie.
27% d’énergie renouvelables en 2030. La stratégie “Europe 2020” prévoyait un investissement continu dans les énergies renouvelables pour qu’elles représentent au moins 20% de la consommation totale en 2020. La Commission et les Etats membres restent engagés sur ce point jusqu’en 2020, mais après, un nouvel objectif est annoncé : 27% en 2030. Il s’agit d’un objectif général pour l’Union européenne qui “ne sera pas traduit en objectifs nationaux” , comme c’était le cas dans la stratégie 2020. Que signifie-t-il ? La Commission souhaite laisser aux 28 Etats membres “une certaine souplesse pour transformer le système énergétique d’une manière qui soit adaptée aux préférences et aux spécificités nationales” , explique l’exécutif européen.
Selon M. Barroso il s’agit d’une approche “bottom-up” (qui va du bas vers le haut) et qui garantira une “plus grande flexibilité” sans provoquer une “fragmentation du marché énergétique européen” . Cependant, le choix d’imposer un “objectif contraignant” au niveau européen et non national modifie également le système de suivi actuellement mis en place. Aujourd’hui (et jusqu’à fin 2020), la Commission surveille l’activité des Etats membres en matière d’énergies renouvelables et peut leur adresser des communications dans le cas où ils ne respectent pas les objectifs nationaux fixés : “il n’y aura donc pas de relaxation du système jusqu’en 2020” , affirme une source européenne. Ensuite, les Etats seront tenus à respecter ces objectifs sur la base des engagements pris lors des Conseil européen. “Le travail sera mené différemment : il y aura davantage de discussions ex ante et un meilleur travail commun entre Etats et entre Commission et Etats membres” , poursuit la source européenne.
Un engagement pour l’efficacité énergétique. Le troisième piller de la stratégie 2020 était la réduction de 20% de la consommation par le biais de l’amélioration de l’efficacité énergétique. Cet engagement de l’UE reste valable jusqu’en 2020, ensuite la route est encore à tracer. En effet, la Commission envisage de s’y pencher “de manière plus approfondie” lors d’un examen de la directive actuelle qui aura lieu fin 2014.
Une réforme du système européen d’échange de quotas (SEQE) de l’UE. Le système d’échange de quotas d’émission permet à 12 000 grands établissements industriels européens d’acheter ou de vendre des “droits à polluer” . Les entreprises trop polluantes peuvent donc acheter des quotas auprès d’entreprises plus performantes. Or, depuis 2009 le prix d’un “droit à polluer” (une tonne de CO2 émise) a fortement baissé tandis que le nombre des quotas offerts devance largement celui des quotas demandés : l’offre de tonnes de CO2 est supérieure à la demande. Pour y remédier, la Commission propose d’établir “une réserve de stabilité du marché” en 2021. Elle fonctionnera “selon des règles prédéfinies qui ne laisseraient aucun pouvoir d’appréciation à la Commission ni aux Etats membres en ce qui concerne sa mise en œuvre” . Elle devrait, enfin, diminuer le nombre de quotas disponibles par rapport à ceux qui sont demandés.
Un nouveau cadre de gouvernance. Lors de la conférence de presse à Bruxelles, le président de la Commission européenne a souligné la nécessité de renforcer la “cohérence” entre les choix énergétiques et environnementaux des Etats membres et d’éviter la fragmentation du marché. C’est pourquoi, la Commission introduit avec le cadre 2030 un nouveau système de gouvernance (déjà mentionné dans le chapitre sur les énergies renouvelables). Basé sur une approche commune et sur “un processus itératif entre la Commission et les Etats membres” , ce système devrait garantir l’ambition et la cohérence des plans proposés.
Les retombées économiques du paquet énergie-climat
Les prochaines étapes
Gaz de schiste : la Commission européenne propose des principes communs
La Commission invite donc les Etats qui souhaitent exploiter leurs réserves de gaz de schiste (le faire ou non est une compétence nationale) à : bien planifier les projets en considérant les effet ; évaluer rigoureusement les incidences sur l’environnement ; veiller à l’intégrité des puits ; contrôler la qualité de l’eau, de l’air, des sols avant et après le début des activités ; limiter les émission atmosphériques ; informer constamment le public et, enfin, à appliquer les bonnes pratiques pendant toute la durée du projet.