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L’UE, l’Amérique latine et les Caraïbes négocient leur avenir commun

Les 10 et 11 juin 2015, 61 représentations gouvernementales européennes et latino-américaines se sont réunies à Bruxelles dans le cadre du second Sommet UE-CELAC. “Les principaux enjeux de notre travail commun vont vers les nouveaux et les anciens défis mondiaux auxquels nous sommes confrontés, à commencer par le changement climatique, le développement durable, la traite des êtres humains, la non-prolifération, en particulier celle nucléaire, la lutte contre le trafic illicite de drogues. Mais aussi sur le développement économique, nous avons un travail commun à faire”, a résumé Frederica Mogherini, chef de la diplomatie européenne.

Sommet UE-CELAC

De nouveaux partenariats commerciaux

Croissance durable, éducation, lutte contre la pauvreté et les narcotrafiquants, sécurité ou encore le climat sont les principaux thèmes de cette rencontre. Présidé par le président du Conseil européen Donald Tusk et le président équatorien Rafael Correa, le Sommet EU-CELAC a rassemblé 33 États membres d’Amérique Latine et Caraïbes et 28 États membres de l’Union européenne.

Dates clés :

Juin 1999 : premier Sommet bi-régional entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine et Caraïbes EU-ALC à Rio de Janeiro. 5 autres sommets seront organisés en 2002, 2004, 2006, 2008 et 2010.

2010 : les pays d’Amérique latine se rassemblent dans le cadre d’une nouvelle organisation régionale aujourd’hui appelée “Communauté des États latino-américains et Caraïbes” (CELAC)

Dans une optique de renforcement des relations entre les deux régions, le sommet est venu affirmer une volonté de dialogue et de coopération principalement axée sur la redéfinition des partenariats commerciaux entre l’UE et la CELAC.

L’engagement bi-régional en faveur de l’environnement marque la volonté de s’accorder sur un agenda climatique avec pour point d’orgue les futurs accords de Paris sur le climat. Il s’agit avant tout de tendre vers un modèle de développement ambitieux plus juste et équitable. L’UE souhaite, dans les plus brefs délais, la mise en place d’une “Union de l’énergie” . Cette dernière aura pour mission de stimuler l’efficacité énergétique, d’assurer un approvisionnent en énergie et d’encourager l’investissement dans des sources énergétiques propres.

Les mesures destinées à lutter contre le dérèglement climatique sont florissantes dans la région de la CELAC au sein duquel le Brésil et le Mexique font figure de leader. Si le premier concentre ses efforts à la réduction de la déforestation , le second est le premier pays du Sud à promulguer une loi visant à réduire de 25% ses émissions de CO2 d’ici 2030.

Ollanta Humala, président du Pérou

Lutte contre le réchauffement climatique, responsabilité globale et engagement international

L’échec de la conférence des parties de Lima (COP20) en 2014 révèle la difficulté des États à se positionner autour d’un consensus contraignant : limiter la hausse des températures à 2°C d’ici 2100, favorisée par une réduction des gaz à effet de serre (GES).

Dates clés :

Janvier 2013 : premier Sommet UE-CELAC à Santiago (Chili) sur le thème “Travaillons Ensemble pour la Croissance et la Stabilité” .

2014 : les États membres de l’UE déboursent 56,1 milliards d’euros (0,41% du RNB) et deviennent les plus grands pourvoyeurs d’aide publique au développement dans la région

2016 : Rencontre bi-régionale des ministres des Affaires étrangères chargés d’analyser les objectifs fixés lors du Sommet 2015

La timidité des engagements peut s’expliquer par une logique concurrentielle : d’une part, certains pays riches refusent des limitations drastiques quant à leurs émissions face à la Chine ou l’Inde, les nouveaux grands émetteurs de GES qui invoquent un libre droit au développement. D’autre part, les pays en développement et les pays les moins avancés refusent de s’engager tant que les pays développés ne respectent pas des engagements jugés suffisants.

Tous les pays ne sont pas égaux face au changement climatique. Jugés comme les plus vulnérables, les pays en développement et les pays les moins avancés, mettent en avant l’idée d’une injustice écologique et réclament avant tout un engagement différencié des pays en fonction de leur niveau de développement et de leur dette historique face au dérèglement climatique. À cela s’ajoute le respect des engagements tenus à l’encontre d’un mécanisme financier orienté autour des capacités d’adaptation et d’atténuation. Dynamiser la capitalisation du Fonds vert pour le climat est l’un des enjeux majeurs des négociations. La question du changement climatique renvoie directement à une redéfinition des rapports Nord-Sud. Il s’agit de réduire les émissions de GES des pays développés afin d’améliorer les conditions d’existence des pays du Sud pour qu’un avenir commun puisse se concevoir dans l’équité, la justice et la solidarité.

Donald Tusk

La France, un pays leader en termes de politique climatique

Nous nous rencontrons, les Européens, les Latino-américains, pour parler essentiellement du climat, puisque c’est la priorité de la diplomatie française pour la préparation de la Conférence” , a déclaré le président français François Hollande à son arrivée au sommet. Le chef de l’État accompagné de Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères et du Développement international, a été le premier à prendre la parole à propos du climat.

Au cours de la seconde session de travail sur le thème “Relever ensemble les défis mondiaux” , le Président Hollande s’est exprimé sur la nécessité d’adopter une position commune en faveur du climat en soulignant l’importance d’une coalition entre les membres de la CELAC. Dès lors, ce sommet tend à favoriser un dialogue commun entre les 33 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, autour des négociations climatiques. Enfin, le président français a participé à deux entretiens bilatéraux avec le président du Panama et le président de la Bolivie.

Le développement économique au prisme du développement durable

Si le climat occupe une place de choix au sein des négociations, le volet économique n’en est pas moins occulté. La CELAC, malgré un PIB de 4 600 milliard d’euros soit 8,8% du PIB mondial, reste la région la plus inégale au monde avec 30% de sa population (soit 167 millions de personnes) vivant dans la pauvreté. 118 millions d’euros d’aide au développement des entreprises ont été débloqués par l’UE avant même l’ouverture du Sommet. Cette aide supplémentaire vise à consolider la coopération bi-régionale dans les secteurs des investissements et des entreprises, l’UE reste alors le plus grand pourvoyeur d’aide publique au développement (APD).

L’UE apporte son soutien au processus de paix en Colombie

Autre thème abordé durant ce sommet : la sécurité et la lutte contre le narcotrafic. Les pays membres de l’UE ont manifesté leur soutien en appuyant le processus de paix en Colombie. “La patience des Colombiens n’est pas infinie et donc toute pression pour accélérer le processus de paix est la bienvenue” , a déclaré le président colombien Juan Manuel Santos. L’UE a décidé d’apporter son soutien en créant un fonds international destiné à financer l’après-conflit. Cette nouvelle mesure vise à renforcer une pression internationale pour déboucher au plus vite sur des accords de paix afin de mettre un terme au conflit armé qui sévit depuis plus de 50 ans dans le pays.

Nous sommes ici pour parler affaires, mais permettez-moi de rappeler que notre relation va au-delà de nos seules relations économiques” , a insisté Federica Mogherini. “De fait, il s’agit d’économie et de commerce, mais aussi d’un dialogue politique et d’une coopération dans une perspective ‘multi-sectorielle’. Nous avons identifié trois dimensions - dialogue politique, relations commerciales et aide au développement - qui forment les trois ‘piliers’ de notre association” , a-t-elle précisé.

Le Sommet UE-CELAC a également souligné l’importance récente des échanges commerciaux entre la Chine et la CELAC. En 2013, la Chine est devenue la locomotive de l’Amérique latine en achetant massivement des ressources naturelles et des matières premières, marquant son ambition de devenir le premier partenaire commercial de la région. En janvier dernier, lors de la première réunion ministérielle du forum Chine-CELAC, le président chinois Xi Jinping envisageait un commerce annuel atteignant 500 milliards de dollars au cours de la décennie. Une stratégie qui modifierait un équilibre mondial en faveur de l’Asie. Dès lors, l’enjeu sous-jacent du Sommet EU-CELAC réside dans la stimulation des échanges commerciaux et des investissements.

Un transfert de technologies, de connaissances scientifiques et de connaissances favoriserait le développement de la CELAC. “En Amérique latine et aux Caraïbes, il faut stimuler les processus d’innovation, production et transfert de technologie” , a rappelé le président équatorien Rafael Correa au cours du sommet. Lutter contre la pauvreté et le changement climatique passerait avant tout par la mise en place de ces transferts. Ces derniers prendraient la forme d’une assistance financière et technique de la part des pays riches en faveur des pays en développement et des pays les moins avancés. Faute de ressources pouvant satisfaire les besoins d’une démographie galopante, le développement économique de la région repose majoritairement sur l’exploitation des ressources naturelles. Un pilier aussi fragile qu’éphémère.


* Article écrit en collaboration avec Elsa Salomé Andrade et Myriam Brando dans le cadre du Forum Devenir Reporter organisé par Open diplomacy le 18 avril 2015, partenaire de Touteleurope.eu

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