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Isabelle Autissier : “La France doit être exemplaire dans sa transition énergétique”

Quelles mesures la France doit-elle prendre pour permettre la signature d’un accord lors de la COP21 ? Quel doit être le rôle joué par les ONG ? Isabelle Autissier, navigatrice française et première femme à avoir accompli le tour du monde en compétition, répond aux questions de Toute l’Europe et nous fait part de son expérience sur le terrain. Depuis 2009, elle préside l’antenne française de World Wide Fund for Nature (WWF).

Isabelle Autissier

Touteleurope.eu : Quelles mesures doit prendre la France pour qu’un accord opérationnel soit enfin signé ?

Isabelle Autissier : Elle doit évidemment, et elle le fait dans une certaine mesure, pousser complètement les feux au niveau international, à travers sa diplomatie mondiale, et interpeller l’ensemble des pays pour qu’ils arrivent à signer les choses les plus ambitieuses possible.

Et puis elle doit évidemment être exemplaire dans sa transition énergétique : là aussi on voit des signes, mais on est encore bien timide. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, il y a des choses intéressantes dans la loi de transition énergétique. Mais pourquoi continue-t-on à subventionner les industries fossiles en France ? Pour moi cela reste un mystère… Pourquoi met-on en œuvre un projet comme Notre-Dame des Landes, qui d’un point de vue énergétique est quand même une assez mauvaise idée ? Il y aurait de nombreux exemples, concernant l’industrie, l’agriculture… on ne prend pas vraiment le taureau par les cornes. Et beaucoup de pays au monde sont beaucoup plus exemplaires que la France sur les sujets énergétiques.

Touteleurope.eu : Quel est le rôle de WWF France (que vous présidez depuis 2009) dans la préparation de la COP21 ?

Isabelle Autissier : On discute avec le gouvernement français pour faire en sorte que la proposition d’accord soit la plus ambitieuse possible. Dans l’idéal, il faudrait que tous les pays aient un vrai agenda pour que le réchauffement soit de moins de 2°C d’ici la fin du siècle, et que ces engagements soient vérifiables, contrôlables, et tenus. Et qu’on réalimente le fonds vert pour aider les pays les plus pauvres.

On n’est pas naïfs : on pense qu’on n’y sera pas. Mais on essaie de s’en rapprocher le plus possible, parce que tout le chemin qu’on peut faire maintenant, c’est autant de désagréments évités ensuite.

WWF est aussi présent dans une centaine de pays. On sert un peu de plaque tournante, de relais d’information et surtout de relais de discussion et d’information, dans la mesure où on est une partie de la société civile.

Touteleurope.eu : Vous vous êtes rendue plusieurs fois en Antarctique. Quels signes concrets du réchauffement climatique avez-vous constaté ?

Isabelle Autissier : Pour y être allé plusieurs fois en dix ans, il est sûr que certains endroits qui étaient enchâssés dans la barrière de glace (l’ “ice shelf” , ces morceaux de glaciers qui coulent et qui restent attachés au continent) reculent maintenant. Ça n’est pas la peine d’y aller en bateau à voile pour s’en rendre compte, il suffit de prendre deux photos satellite à quelques années de différence, c’est flagrant. Au point que cela commence à avoir des conséquences sur la vie : lorsqu’il a plu pendant l’été austral 2013-2014, les jeunes manchots sont tous morts parce que leur duvet est fait pour le froid, pas pour la pluie.

Maintenant, quand on y va avec un bateau à voile on n’y va que quelques semaines, et dans une portion très délimitée de l’Antarctique. Donc on ne peut pas se permettre d’avoir un diagnostic global, ça c’est le rôle des scientifiques.

Touteleurope.eu : Quels sont les risques à craindre du réchauffement climatique dans les dix prochaines années dans cette région du monde ?

Isabelle Autissier : L’Antarctique n’est peut-être pas la partie du monde qui est la plus en péril. Mais on peut prévoir une acidification de l’océan, qui va commencer à modifier la composition du plancton dont se nourrissent la quasi-totalité des espèces antarctiques, mammifères ou poissons. Et puis les glaces vont continuer à reculer : ça n’est pas catastrophique en soi, mais ça risque d’amplifier l’augmentation du niveau marin.

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