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Francophonie, Union européenne : des intérêts communs ?

L’UE et la Francophonie, réseau de 88 Etats qui s’étend sur tous les continents, partagent des intérêts à échanger et à s’associer. En effet, 18 Etats membres de l’Union européenne sont également rattachés à l’Organisation internationale de la Francophonie. Parmi eux, 6 sont membres de l’OIF, 11 sont observateurs et un pays est associé.

Francophonie-UE

Francophone, francophonie, Francophonie : quelles définitions ?

Un francophone est une personne qui parle le français. Une collectivité francophone est une collectivité dont la langue officielle ou dominante est le français. (Source : CNRTL)

La francophonie (f minuscule) est l’ensemble des peuples ou des groupes de locuteurs qui utilisent partiellement ou entièrement la langue française dans leur vie quotidienne ou leurs communications.

La Francophonie (F majuscule) est l’ensemble des gouvernements, pays ou institutions qui ont en commun l’usage du français dans leurs travaux ou leurs échanges. On l’associe en général à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). “De simple mouvement linguistique, la Francophonie se définit aujourd’hui, au sens politique et institutionnel, comme un espace géopolitique fondé sur des valeurs communes et un espace géoéconomique capable de construire de véritables partenariats, des partenariats “gagnant-gagnant” tournés vers un développement solidaire et harmonieux” (Christian Gambotti, La Francophonie, espace géopolitique et géoéconomique, Géoéconomie, 2015).

Plus poétique, pour l’un des “pères fondateurs” de la Francophonie, Leopold Sedar Senghor en 1962, la Francophonie peut se définir comme “un humanisme intégral qui se tisse autour de la terre, une symbiose des énergies dormantes de toutes les races et de tous les continents qui se réveillent à leur chaleur complémentaire.”

La Francophilie ou un francophile est le fait d’aimer la France, les Français et ce qui s’y rapporte (Source : CNTRL).

Comment le concept de francophonie est-il né ?

“L’histoire de la langue française est longue, l’histoire de la Francophonie est courte”, écrit Stélio Frandjis dans Repères dans l’histoire de la francophonie, Hermès, la Revue, 2004. En effet, il faut attendre 1886 pour que le géographe Onésime Reclus évoque pour la première fois le concept de “Francophonie” dans son ouvrage “France, Algérie et colonies” . Il la définit alors comme l’espace de “tous ceux qui sont ou semblent être destinés à rester ou à devenir participants de notre langue” .

Alors que l’Alliance française est créée en 1883, le mot “Francophonie” reste oublié jusqu’en 1960. Il renaît sous les plumes des dirigeants des pays nouvellement décolonisés ayant choisi comme langue officielle le français. Les pionniers de la Francophonie internationale s’appellent alors Norodom Sihanouk (Cambodge), Habib Bourguiba (Tunisie), Hamani Diori (Niger), Jean-Marc Léger (Québécois) et Leopold Sedar Senghor (Sénégal). Selon ce dernier, il s’agit d’établir un “Commonwealth à la française” . Mais la France, réticente à cette idée, préfère établir des relations bilatérales avec ses anciennes colonies.

C’est ainsi sans la France, et de manière presque associative, que la Francophonie se structure entre les pays africains et le Canada. Il faut attendre 1970 pour que la Francophonie s’institutionnalise, avec la création à Niamey (Niger) de l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT). Ce n’est qu’avec l’élection de François Mitterrand dans les années 80 que la Francophonie est réellement investie par la France et qu’elle devient un outil diplomatique. Les chefs d’Etat et de gouvernement ayant le français en partage se réunissent à Versailles pour la première fois en 1996.

L’ACCT devient l’Agence internationale de la francophonie en 1999, avant de prendre son appellation actuelle d’Organisation internationale de la Francophonie. En 2005, lors du sommet de la Francophonie à Antanarivo, une charte est adoptée par l’OIF.

Cliquez sur la carte ci-dessous pour l’agrandir

Carte des 88 Etats et gouvernements de l’OIF

Comment la Francophonie est-elle représentée ?

La Francophonie institutionnelle est apparentée à l’OIF, dont la secrétaire générale est actuellement Louise Mushikiwabo. L’organisation représente aujourd’hui 88 Etats dont 54 de plein exercice, avec un budget de 80 millions d’euros par an.

Mais la Francophonie ne se résume pas à l’OIF. De nombreuses autres associations, institutions et médias se sont développés comme l’assemblée parlementaire de la Francophonie, l’association internationale des maires des capitales francophones, l’agence universitaire de la Francophonie, ou encore TV5 monde…

Parmi les membres de l’OIF, tous n’ont pas pour langue officielle le français. Seuls 32 Etats et gouvernements dans le monde l’ont, seul ou avec d’autres langues.

Chaque pays francophone, à commencer par la France, avec ses instituts français et les Alliances françaises par exemple, tente de promouvoir la francophonie à l’international. Les ambassadeurs francophones, notamment, mettent en place des actions qui visent à promouvoir la culture et la langue française.

La Francophonie se réduit-elle à la promotion de la langue française ?

L’objectif du concept de Francophonie est de fédérer les pays qui ont en partage la langue française. En effet, selon le rapport 2018 de l’Observatoire de la langue française, le monde compterait 300 millions de locuteurs francophones et 130 millions d’apprenants du/en français. Celle-ci serait en outre la 5e langue la plus parlée dans le monde et la 3e langue des affaires dans le monde.

Mais la Francophonie va plus loin que la langue française. Elle a recouvert une dimension plus large, promouvant des valeurs universelles telles que les droits de l’Homme, la paix, l’égalité hommes-femmes, auxquelles souhaitent adhérer des pays qui n’ont pourtant pas la langue française en partage.

Parallèlement à la promotion de la langue en tant que telle, ce sont ses usages diplomatiques et économiques qui se révèlent cruciaux. Des études montrent ainsi que le fait que deux pays partagent la langue française rend leurs échanges commerciaux plus intenses, plus stables en temps de crise et surtout plus rentables, grâce à un gain de temps dans les échanges et à une confiance accrue (voir notamment Céline Carrère, Maria Masood “Poids économique de la francophonie : impact via l’ouverture commerciale”, Revue d’économie du développement 2015/2 (Vol. 23), p. 5-30.).

Enfin, la Francophonie ne se résume pas à la promotion du français à l’exclusion des autres langues. “Derrière une langue, il y a des valeurs, une culture, du droit, une conception de la société” , résume Christian Philip (La francophonie en péril ? Géoéconomie, 2015). Pour l’OIF, il n’est pas question de se replier sur soi-même et d’entrer en “lutte” contre l’anglais par exemple. L’objectif est au contraire de promouvoir le multilinguisme ainsi que la diversité culturelle.

Comment la francophonie est-elle présente au sein de l’UE ?

Au sein de l’Union européenne, le français est la langue officielle unique en France, c’est également la langue co-officielle de la Belgique et du Grand-Duché du Luxembourg. Si on élargit le champ aux pays membres de l’Association européenne de libre-échange (AELE), alors la liste des pays francophones s’enrichit de la Suisse, dont l’une des langues officielles est le français.

Tout comme à l’échelle internationale, où la Francophonie se compose à la fois d’Etats véritablement francophones, avec en particulier un noyau dur de l’Afrique de l’Ouest et à la fois d’Etats dont le caractère francophone est loin d’être évident, la Francophonie au sein de l’Union européenne forme un “ensemble hétérogène et polymorphe” (Agence universitaire de la Francophonie). Des foyers de francophones et de francophiles vivent au sein des pays de l’Union européenne, notamment dans les pays de l’Europe centrale et orientale.

La francophonie est plus largement présente au sein des institutions européennes grâce à l’usage de la langue française. Historiquement, avant que le Royaume-Uni n’entre dans l’Union européenne et encore jusqu’au début des années 1990, le français était la langue de travail dans les couloirs des institutions. Bien qu’ayant perdu de l’influence, elle reste l’une des trois langues officielles de travail de l’Union européenne avec l’allemand et l’anglais et sert de “langue pivot” pour les traductions dans les 24 langues officielles de l’UE. Elle demeure également l’une des trois langues obligatoires pour les concours spécialisés de la fonction publique européenne. 80% des fonctionnaires de la Commission européenne parlent ainsi le français, dans cette institution installée au coeur d’une ville largement francophone.

La Cour de justice de l’Union européenne, qui fait figure d’exception, rédige ses documents en français et rend ses jugements dans la langue de Molière, avant d’être traduits dans les autres langues officielles.

A Bruxelles, la Représentation permanente de la Francophonie, son ambassadeur et le groupe des Ambassadeurs francophones de Bruxelles défendent les intérêts de la Francophonie auprès de l’Union européenne.

Pourquoi la Francophonie est-elle importante pour l’UE ?

Pour l’OIF, promouvoir le français au sein de l’Union européenne, c’est également promouvoir la diversité des cultures et surtout refuser qu’une langue, en l’occurrence l’anglais, devienne omnipotente. A travers une langue, ce serait des manières de penser, des cultures, une histoire qui se diffusent.

La devise de l’Union européenne, “Unis dans la diversité” , fait écho à l’idée selon laquelle une union s’enrichit de la pluralité des cultures et traditions nationales. C’est cela que souhaitent véhiculer les acteurs de la Francophonie.

Le partage du français est également mis en avant comme un atout pour l’Union européenne dans la gestion des crises dans les pays du bassin méditerranéen et de l’Afrique subsaharienne. Certains pays africains francophones sont en effet en proie à des situations de guerres et de crises humanitaires. Pour ces pays, les Etats francophones de l’UE sont des interlocuteurs précieux, notamment dans la gestion de la crise migratoire et le développement économique.

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